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Biographie

Ni

Formé en 2009 sur les cendres du groupe Diatrib(a), Ni en est la réincarnation avec un nouveau bassiste, et non des moindres puisque provenant de JMPZ. Changement de membre et de nom donc, pour un nouveau départ, toujours aussi loufoque et drôle, mais avec une réelle personnalité. Ni est bien ancré dans un math-rock déroutant et guilleret et a déjà grâce à son premier EP une personnalité bien affirmée. Les quatre fêlés de Bourg-en-Bresse à priori fans des Monty Python ne tardent pas à sortir un second EP, éponyme lui aussi, en 2012. A mi-chemin entre Naked City et Mr Bungle, de nouvelles compositions seront couchées sur un album entier en 2015, Les Insurgés de Romilly, abrité par deux labels de bon goût, Atypeek Music (Enablers, Kill The Thrill, Schlaasss) et Dur et Doux. puis tournée dans la foulée avec PoiL, d'autres cinglés créatifs de nos campagnes.

16.5 / 20
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Pantophobie ( 2019 )

Tel un furoncle tenace Ni et les créatures surréalistes qui le composent n'en finissent plus de perpétuer leur espèce de noise jazz-rock délicatement foutraque. Après les turgescents Insurgés de Romilly, puis une fusion incestueuse avec Poil donnant lieu à une entité inédite nommée Piniol, voilà que le quatuor nous rajoute une nouvelle couche de pus magnifique en long format. Une Pantophobie qui explore nos angoisses multiples pour s’en nourrir et les recracher sur nos visages innocents. A commencer par un visuel détaillé à flinguer des rétines, signé Davor Vrankić.

L’expérience débute avec la peur morbide de la lumière du soleil, une Héliophobie farcie de textures et de contre-jours malaisants, où la basse procède au ravalement de notre façade pendant que l’ensemble nous contorsionne la nuque avec souplesse. De puissants rayons transpercent la boite crânienne et font surchauffer les cerveaux pas préparés, ce qui nous place dans les meilleures dispositions pour appréhender la peur panique des poulets, Alektorophobie, investie de lourdeur métallique, suivie d’une dissection de Lachanophobie, peur provoquée par les légumes, sur fond de rock jazzeux saturé, déconstruit, ensevelit progressivement sous le bruit. Pas tellement vegan. S’ensuit l’un des sommets de la psychanalyse ici présentée, Leucosélophobie ou l’angoisse de la page blanche, illustré par un riffing menaçant, constructeur de faux murs et de doubles fonds, pourtant gavé comme une oie d’inspiration. Plus loin c’est l’Athazagoraphobie qui interpelle et disserte en deux parties afin d’éclairer sur la peur d’être oublié.e ou ignoré.e. L’amorce est enveloppante, les guitares cristallines et sincèrement empathiques, alors que l’issue est vénéneuse, ultra percussive, procurant une forme de transe incertaine. Sentiment accentué avec la flippe absolue de l’échec, la Kakorraphiophobie, s’écrasant de tout son poids sur nos épaules d’éternels perdants.

On ne tortillera pas longtemps du boule pour caguer dans l'axe avant de savourer pleinement ce qui constitue la production la plus puissante de l’équipe Rhodanienne, un rendu qui éclate le faciès autant pour des guitares bien en chair et une (putain de) basse expressives, que pour une batterie aussi gracile que plombée, cassant les rythmes comme elle respire. La Pantophobie est finalement la thématique idéale pour une formation qui accumule les pètes au casque, démontrant une nouvelle fois que Ni affronte sereinement ses peurs, à cloche-pied la nuit sur l’autoroute.

Bandcampophobie.

A écouter : sans crainte.
16 / 20
1 commentaire (18.5/20).
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Les Insurgés de Romilly ( 2015 )

Les plus vieux auront sans doute capté la référence évidente au Sacré Graal des Monty Python, tandis que les plus jeunes devront soit se contenter de la dinguerie musicale des Burgiens, soit s’enfiler dans le même temps l’intégrale des œuvres de la troupe Anglaise, référence incontournable de l’absurde. Les Insurgés de Romilly, premier long jet de Ni, pourrait en effet servir de matière sonore pour les créateurs du ministère des marches stupides, et le visuel (fort joli) de l’objet semble d’ailleurs directement sortir du cerveau malade de Terry Gilliam, confectionné en fait par un certain Jacques Deal.

On peut sans mal rapprocher Ni de PoiL, voisins de région au moins aussi atteints, adoptant une approche moins abrasive, plus « jazzy », même si au final les deux sont totalement pétés. Ils étaient donc destinés à tourner ensemble, ce qu’ils ont fait dernièrement, avec la manière. Ces entités étranges rappellent le vivier que représentent nos caves en terme de musique avant-gardiste d’obédience plus ou moins humoristique, se réappropriant la démence héritée de Mr Bungle, Magma, Naked City et consorts, pour en digérer une version toute personnelle, investie de plans math ou noise rock explosés à s’en faire un coup du lapin. Les labels Dur et Doux et Atypeek en sont d'ailleurs des acteurs à suivre d'extrêmement près.

Et Ni excelle dans sa « catégorie » plus lourde et métallisée que celle des poilus, faisant cracher une basse aussi ronde que rugueuse et des guitares grassouillettes aux moments opportuns (Butor, Flaquadin), douze cordes qui n’hésitent pas à tricoter nerveusement mais modérément, alignant les notes casse-gueule et riffs sirupeux sans transition (Cuistre, Rodomont). Les huit gifles administrées par le quartet sont garnies d’inventivité, notamment via un batteur fulgurant (aussi dans L’Effondras), en osmose permanente avec le reste, sachant autant martyriser son instrument que le caresser avec subtilité, et surtout par une construction générale qui se révèle précise, étonnamment réfléchie après une petite dizaine d’écoutes, Torfesor achevant le bestiau en une orgie tribalo-mystico-matheuse absolument jouissive.

Les Insurgés de Romilly est plus facile d’excès que d’accès, il finit néanmoins par couler de source dans les oreilles averties après en avoir pris toute la mesure. Cette démence-là est savamment orchestrée mais affiche une sincérité inébranlable, suintant le "rock n’ roll pornographique" par tous ses pores. Les prestations scéniques délirantes et possédées qui en découlent en sont la plus flagrante démonstration. Ni !

6,66 € sur Bandcamp.

A écouter : Ni, ni, ni !

Ni ( 2010 )

Au pays du mathrock, mises à part quelques exceptions, on est tout de même un poil concentré sur la complexité des plans nécessitant quatre décomptes en même temps dans la tête, le moins de bière possible dans les artères et une attitude intello bien fière de la complexité du travail accompli. Tout cela est bien sérieux et manque franchement de fun pour pouvoir expérimenter la danse sur du onze temps et demi en ternaire sans craindre les gros yeux de l’entourage direct de la fosse. Il faut dire que faire oublier la complexité n’est pas si simple, et même si le mathrock, quand c’est bien fait, ça poutre sévère, il n’y a guère que Battles qui y ait insufflé une bonne dose de fun bien groovy pour pouvoir filer la banane en quelques notes sur un plan pas piqué des hannetons rythmiques. En France, il y avait Diatrib(a), qui nous jetaient bien du pain dessus à chaque concert, monstres d’autodérision et de démonstrations techniques sans le moindre sérieux dans le regard, loufoques et rigolos. Seulement ils sont morts. Oui c’est triste je sais bien, car ils n’ont pas eu la reconnaissance qu’ils méritaient, clairement. Mais leur âme n’est pas morte, elle n’est ni dans les limbes ni dans une fac de maths, elle a juste retrouvé une nouvelle incarnation. Bon le corps n’est pas le même, il a changé un membre, mais à peu de choses près on y est, d’autant plus que le nouveau membre n’est autre que le bassiste dans les peu catholiques JMPZ. Et tout ça, ça donne Ni, qui en quelques mois d’existence montre déjà de quoi il est capable.

Essayons de ne pas tomber dans une vulgaire comparaison avec Diatrib(a) voulez-vous. Oui, on nage toujours en pleins plans avec un débordement de demi-temps placés n’importe où, de polyrythmies joyeuses, mais Ni a déjà une personnalité forte. Là où son ancêtre pouvait se révéler plus noisy et expérimental, Ni tient un propos on ne peut plus structuré et cohérent dans la forme. En quatre titres, seulement, le quatuor donne l’impression de traverser mille phrases mélodiques, accompagné par une basse qui gronde en rondeur et tient souvent la dragée haute au milieu de canons de guitares chaudes. Et c’est réellement une force de la nouvelle formation, Ni se révèle être excellent dans l’enchevêtrement de mélodies immanquables agencées en pièces riches en rebondissements et toujours efficaces. On nage même pour ainsi dire dans la légèreté tant musicale que sentimentale, entre rock jazzy, maths à vapeur metalliques loin vers l’horizon et Zeuhl en godasses de sport. Et ce premier disque se révèle même aussi efficace que complexe, mais pour une fois c’est la complexité qui passe au second plan, à tel point que dodeliner sur des mesures en 13/16 devient naturel et plaisant et ne nécessite même pas de chapeau pointu.

Ni, non content de savoir jouer du mathrock comme peu savent en faire, sans trop en faire justement, se paie le luxe d’y mettre une sacrée dose de jovialité sans user d’artifices à la pouet-pouet tut-tut, simplement par la légèreté de ses mélodies et la richesse de ses quatre premières pièces qui se révèlent foutrement palpitantes. On attend la suite, on en veut plus, et il est bien sur que le potentiel d’une formation qui a déjà autant de personnalité d’un premier jet est plus que prometteur.

Le disque est à écouter intégralement sur le myspace du groupe.

A écouter : Balafr� par une dinde morte.