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Biographie
Naam naît à New York de l'association deux, puis trois musiciens: Ryan Hamilton, John Bundy et Eli Pizzuto. La bande de Brooklyn crève véritablement l'écran en 2009 en sortant coup sur coup un premier EP et un premier album chez Tee Pee Records. L'entrée en matière est fracassante pour le groupe et son Rock Psychédélique se retrouve régulièrement cité voire porté aux nues en dépit d'une existence encore relativement courte. C'est fort de cet accueil et d'un statut de groupe à suivre que le groupe posera ses bagages en Europe en 2011, faisant notamment une prestation remarquée au Roadburn Festival. Outre un agenda de tournée bien rempli, l'attente de trois ans séparant Naam de la nouvelle sortie originale de la formation se voit ponctuée par la sortie d'un 7" de reprises de Nirvana qui vient confirmer après un premier album à la croisée des chemins, que Naam refuse de se laisser enfermer dans la case psychédélique, Le groupe revendique d'ailleurs haut et fort son amour pour le Rock de la première moitié des années 90.
The Ballad Of Starchild (Movements I -V) atterrit dans les bacs durant l'été 2012, toujours chez Tee Pee Records.
Se lancer bille en tête, mettre à feu et à sang à peu près tout ce qui se trouvait sur leur chemin, des scènes Stoner Doom à celles du Rock rocailleux (Naam) dans un premier temps pour mieux profiter de la panique générale et s'élever avec force et finesse, tout en Space Ritualeries (...Starchild) pour rafler la mise dans la catégorie espoirs était un plan brillant. En 2013 les gars de Naam sont désormais attendus comme des patrons et leur Vow avait donc plutôt intérêt à être costaud. Petit décryptage.
Avec une dizaine de minutes de plus au compteur que The Ballad of the Starchild sur ce nouveau jet, Naam, qui avait pour ambition de présenter un véritable album, se devait nécessairement d'aller à l'essentiel. Soit, en somme, de procéder à l'exact inverse de sa précédente sortie, récréation de qualité supérieure mais complètement phagocytée par son morceau titre. En présentant onze compos en moins de quarante minutes à la pesée les américains semblent effectivement vouloir condenser leur propos mais à regarder le détail, avec quatre titres au delà des 3'50, une grosse envolée en fin de face B et quelques courtes transitions bien ficelées pour le liant, Naam n'a en définitive pas vraiment décidé de changer de catégorie ou de revoir ses ambitions à la baisse. Tout juste a-t-il condensé un peu le propos mais, même s'il est peut être le seul à pouvoir précisément le situer sur le créneau surpeuplé dans lequel il mène son entreprise, le groupe a trouvé son cap et ne le lâche plus. Chez Naam le Rock est expansif, brut et enveloppé d'épaisses volutes de fumée. Forts de cette identité musicale vite affirmée et sans cesse affinée depuis, en dépit d'une liste d'indices longue comme le bras laissée à chacun de leurs passages en studio, les gars de NYC persistent néanmoins à nous glisser systématiquement entre les doigts. A peine pense-t-on les avoir saisis que les voici qui reparaissent un peu plus loin dans la zone de confort à qu'ils se sont aménagé à la rencontre des deux territoires Rock total des early 70's et des années 90. Vow ne déroge pas à la règle. Naam ne sait selon toute vraisemblance pas vraiment faire une seule chose à la fois et s'entête à croiser dans le grand fourre-tout de sa messe électrico-space l'héritage de trois générations de musiciens. C'est donc toujours sans la moindre gène et de nouveau servi par ce son mêlant rugosité late 60's, urgence Punk latente et branlitude désarmante que Naam déconstruit ses classiques avec passion et, semble-t-il, le plus tranquillement du monde ("Midnight Glow", le superbe "Beyond", "On the Hour") les saupoudrant ici de Psych orientalisant, là, les noyant d'effets Space à souhait fournis par le dernier arrivé dans l'aventure, John “Fingers” Weingarten, dont les claviers font merveille (la doublette "Silent Call" / "Vow" d'ouverture). Dans le genre "on se la boucle et on bosse", les auteurs de Vow se posent là tant la démonstration, en plus d'être convaincante et immédiate parvient à rester personnelle et authentique car hors du cliché passéiste pour un groupe qui enfile les références comme des perles (Hawkwind, Black Sabbath, Vanilla Fudge, Led Zeppelin ou encore Deep Purple pour le quota de name-dropping évident). Mais voilà, évoquer ne rime pas obligatoirement avec recopier et Naam l'a très bien compris. Le temps pour nous d'assimiler pleinement le bouzin, il y a fort à parier que le quatuor aura déjà repris son bâton de pèlerin pour venir crapahuter par chez nous avec de nouvelles inspirations sous le bras. Tee Pee peut se jeter des fleurs pour avoir parié sur les gaziers il y a quelques années: ils le méritent (comme souvent).
Avec un peu de mauvaise volonté on pourrait s'arrêter au constat que Vow ne fait que confirmer ce que nous savions. En surface irréprochable dans son exécution - tous les points de contrôle du psychrock-o-meter sont franchis haut la main - le style des New Yorkais y reste en prime aisément identifiable. Référencé, certes, mais encore singulier voire atypique dans ses petits détails, le Rock du quintet de Brooklyn continue de les différencier du gros du peloton revivaliste et même de leurs petits camarades - tout aussi doués mais - un brin monomaniaques (Kadavar, Uncle Acid&the Deadbeats, Aqua Nebula Oscillator, Golden Void et autres Graveyard pour ne citer que ceux qui font l'actu). Avec ce disque follement halluciné sans être contemplatif, Vow prouve de nouveau que si ses auteurs maîtrisent leur leçon sur le bout des cordes, ils ne laissent leurs influences s'exprimer qu'à travers une fenêtre de lecture qui leur est propre et n'apprécient que très très modérément de laisser la poussière s'y accumuler. "Confirmer", oui, tout simplement. Enn long, en large et en travers. Et Naam, sur les ultimes sonorités d'"Adagio", d'apporter la dernière touche à sa stratégie en trois coups (et demi): réaliser le hold-up parfait sur la foisonnante scène Néopsyché des années 2000-10. Tout en toucher. Echec et Mat.
L'été s'en va et voici Naam qui revient. Destination: plus loin, plus haut, plus psych. Ce plan de route, ce n'est pas la jaquette dans la continuité de celle du self titled qui l'annonce, mais le mec qui signe en bas aujourd'hui après avoir effectué le voyage avec un plaisir non feint. Le verdict est sans appel car l'évolution flagrante et le trip à la hauteur de ce que l'objet ne vend pas.
Lorsque Naam avait débarqué dans les bacs il y a trois ans, le groupe tenait avec son Mountain EP un bon grower en puissance dont l'inspiration fut vite reprise et confirmée sur un Naam costaud, alliant purs moments de lévitation et puissance (très) brute dans un moule psyché bien dans l'air du temps. Un mariage de styles casse gueule souvent excellent mais un peu foutraque et frustrant qui plaçait alors les gars de Brooklyn dans le bon wagon. Celui des groupes poil à gratter sur lesquels on ne parvient décidément pas à se faire un avis définitif et que l'on garde de fait à portée de diamant - petit exploit au moment ou le créneau du revival Psyché se met sérieusement à (re)déborder. Avec cette question qui reste en suspens en raison d'un éventail de possibilités trop large: quid de l'étape suivante?
Et bien la voici. Le rythme de sortie semble honnête et les New Yorkais ont eu la bonne idée de nous refaire le coup du format semi-court. Demi plantage ou moitié de réussite, l'affaire, par son ambition mesurée, avait au moins pour elle qu'il ne serait ni trop compliqué de l'assimiler ni de l'oublier si le besoin s'en faisait sentir. Le quatuor et sa musique multidirectionnelle, plutôt que de faire un choix forcément contraignant, trace d'emblée une diagonale vers les sommets en travers des univers de ses nombreux mentors. La tendance met le temps de la première écoute à se dégager nettement mais Naam recentre indéniablement le tir, se disperse moins. La prise de recul fonctionne et la fougue du s/t fait place à une sorte de classe évanescente en bluejean usé. Celle la même que Naam laissait déjà par deviner intermittence mais perdait un peu entre sa fascination pour le Rock féroce, les Nuggets le Blues crade, Hawkwind, ses envies d'en découdre et le(s) (cheveux) gras d'Al Cisneros (OM, Sleep). Un mal connu par les voisin canadiens de Quest for Fire, notamment, qui optaient d'ailleurs en 2010 pour une solution approchante quoiqu'à la réflexion moins finement ciselée. Au lieu de sauter d'une envie à l'autre Naam prend le temps de faire les choses, d'intégrer ses influences et envies d'exploration à une progression envisagée de façon bien plus globale, passant d'un Rock Psychédélique protéiforme ultra référencé à la réalisation d'une oeuvre véritablement intelligente et équilibrée. Le résultat est certes moins explosif lors du premier contact mais The Ballad Of The Starchild, alors qu'il n'invente rien sur le fond, se révèle être un exercice aussi virtuose que rafraîchissant, richement vêtu de sonorités et d'une image travaillées sans pour autant se pavaner grassement. La basse, profonde, énorme, aspire inexorablement vers le haut, le clavier marque la progression et la tension, masquée par un chant lascif et hypnotique se créé dans une retenue que ne parvient bien évidemment pas à totalement respecter une batterie riche en revirements. Naam, comme en apesanteur, déroule un Rock revival hybride, croisement de Garage et d'Acid Folk, de Space Rock et de Blues cramé qui aurait refusé d'arrêter les compteurs en 1975. Bien évidemment, le morceau titre de 11 minutes culmine tranquillement au dessus de la mêlée mais c'est bien comme une œuvre complète qu'il faut aborder cet EP. De statut de formation talentueuse mais brouillonne et cabotine un peu malgré elle, Naam vient de passer sans grande démonstration à celui d'orfèvre en devenir d'un Rock fidèle à ses racines mais qui se refuse à la contemplation béate et à la répétition appliquée assistée, bien entendu, à grands coups de production. A un Naam mutin et déjà fort bon ses auteurs ont logiquement opposé quelque chose de plus fort, de plus fin pour revenir en patrons. Imparable. On ne criera certainement pas à la révolution, surtout pas avec si peu, non, mais un son, comme toute création, cela s'entretient, se nourrit, se patine. Libre à chacun de faire le pari risqué de laisser le temps faire son affaire et de s'en remettre à la chance pour le reste, ou de choisir sciemment quelles teintes donner d'emblée à son œuvre. Quitte à décevoir ou déboussoler. Ce qui, ici, est très finalement loin d'être le cas.
En une toute petite demi-heure (5 titres / 26 minutes) Naam s'impose enfin véritablement. Personnalité affirmée, éparpillement stylistique en recul, le Naam cuvée 2012 est apaisé et sur de sa force. Plus solide, tout simplement, malgré une ou deux premières écoutes au gout de trop peu. Mais dans le fond c'est aussi parfois là que réside la force d'un bon disque. Inviter à la patience, permettre une assimilation lente et attiser l'envie plutôt que de satisfaire les appétits les plus voraces en priorité. Et sur ce point, The Ballad of Starchild est une franche réussite.
A écouter : Très certainement!
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