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Biographie

Mono

Difficile d'arrêter une date sur la formation de Mono. Le Tokyoïte Takaarita Goto commence à travailler sur le projet en janvier 2000 et fignole quelques compositions, en partie influencées par le guitariste Loren Connors. Sa quête de musiciens, commencée un an plus tôt, trouve un premier aboutissement en l'arrivée de son ami de toujours, Yoda, bientôt rejoint par la bassiste Tamaki et le batteur Yasunori Takada.

Le groupe enregistre un premier ep intitulé Hey You sur le label Forty 4. Ce dernier est suivi par le premier album, Under The Pipal Tree, qui obtient de très bonnes critiques de la part de la presse spécialisée. En 2003, Mono termine l'enregistrement de son deuxième opus, One Step More And You Die. La tournée qui s'ensuit aux Etats-Unis et en Suède laisse, toutefois, dans l'esprit des membres un goût d'insatisfaction due notamment au comportement de certains spectateurs. Un peu déçu, Mono se reconcentre sur son projet de remixes de son dernier album. New York Soundtracks se veut une réponse directe aux attentats du 11 septembre 2001 le groupe japonais associant à sa conception plusieurs personnalités de la scène parmi lesquelles Loren Connors. Dans la foulée le groupe sort son troisième album, Walking Cloud And Deep Red Sky, Flag Fluttered And The Sun Shined à la suite duquel démarre une nouvelle tournée.
Après une collaboration avec la formation japonaise World's End Girlfriend sur Palmless Prayer / Mass Murder Refrain, Mono enregistre You Are There et se lance dans une grande escapade qui passe par l'Australie, les States, aux côtés de High On Fire, ainsi qu'en Europe. Pour l'année 2007, les Japonais sortent une collection de tous leurs eps, ainsi qu'un dvd documentaire intitulé The Sky Remains The Same As Ever.

Suivront ensuite Hymn To The Immortal WindFor My ParentsThe Last Dawn et Rays Of Darkness. Après un split avec The Ocean en 2015, Mono revient en 2016 avec Requiem For Hell, puis en 2019 avec Nowhere Now Here.

14.5 / 20
3 commentaires (16/20).
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Nowhere Now Here ( 2019 )

Il y a quelque chose d’évanescent dans la musique de MONO. Elle est faite de moments qu’il ne faut absolument pas rater et saisir dans l’instant, sous peine d’arriver à la fin de l’album en ayant l’impression qu’ils n’ont jamais existé, qu’ils ont été fantasmés plus que véritablement ressentis. Si les prestations scéniques du quatuor japonais mettent l’accent sur l’intensité et la puissance, rendant ces instants plus évidents, ses disques ont toujours davantage joué la carte de la contemplation et demandé un effort supplémentaire à l’auditeur. Alors que Requiem For Hell proposait une vision relativement "concise" de la musique du groupe, Nowhere Now Here s’étend sur plus d’une heure, n’évitant pas au final une légère impression d’ennui, mais faisant preuve des qualités indéniables.

Mêlant comme à son habitude Post-Rock, Ambient et Minimalisme, MONO nous offre un album fidèle à ce que l’on peut attendre du groupe. Pas de grosse surprise, mais un résultat qui tient largement la route, à condition que l’on se laisse prendre par l’univers familier exploré par les Japonais depuis maintenant vingt ans, et dans lequel on est presque certain de retrouver un clin d’oeil à d’autres géants du Post-Rock. Les cuivres de l’intro, God Bless, font immédiatement penser à l’extraordinaire Storm de GY!BE. Le morceau titre lorgne du côté des Texans d’Explosions In The Sky. L’ombre de Mogwai vient également à plusieurs reprises se poser sur le chemin emprunté par le quatuor. Réduire un album de MONO à une simple cousinade, en particulier dans un genre où il est difficile de ne pas, à un moment donné, marcher sur les pas d’un collègue, serait cependant injuste.

Sur Nowhere Now Here, MONO prend l’apocalypse comme point de départ. Cataclysmique, After You Comes The Flood semble avoir pour objectif de faire table rase d’entrée pour repartir sur de nouvelles bases. Le chant (oui, il y a du chant sur cet album), de la bassiste Tamaki Kunishi sur Breathe permet ensuite de découvrir une autre facette du groupe, forcément plus expressive, mais toujours aussi mélancolique. Le reste de Nowhere Now Here se montre cependant plus classique, jouant souvent la carte minimaliste (Far and Further, Parting). Alors que les guitares restent au centre de la musique de MONO (Sorrow), piano et cordes s’invitent très souvent et créent une ambiance sereine et relativement optimiste malgré tout. Se plaindre d’une telle livraison peut sembler exagéré, tant les Japonais maitrisent leur sujet et nous offrent un ouvrage aux finitions délicates. Malheureusement, la longueur de l’album vient clairement avec son lot de temps morts qui, sans être rédhibitoires, viennent atténuer l’effet grisant des compositions.

Il faut pourtant persister, prendre cette oeuvre dans sa globalité pour ensuite apprécier davantage des morceaux de bravoure comme Meet Us Where The Night Ends, où l’incursion de l’électronique rend la tempête finale, organique, encore plus dévastatrice. Le contrat sur Nowhere Now Here est très clair : c’est d’une certaine apathie que doivent naître les moments de frisson. Il n’y a aucune raison de ne pas le signer.

14 / 20
3 commentaires (14.17/20).
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Requiem For Hell ( 2016 )

Albert Einstein nous l’a prouvé avec la relativité restreinte, le temps peut se dilater et les distances se contracter en fonction du point de vue duquel on envisage les événements qui nous entourent. La discographie des Japonais de Mono incarne, de mon point de vue, cette théorie remettant en cause notre conception des principes de base de l’univers. Alors que certains de leurs albums exercent sur moi un effet euphorisant, rendant futile toute notion de longueur, d’autres provoquent au contraire un ennui poli, que le talent d’interprétation du groupe ne parvient pas toujours à tromper. Neuvième passage en studio de MonoRequiem For Hell illustre parfaitement ce sentiment, alternant moments inspirés et réchauffage, exaltation et frustration. Si les premières secondes de Death In Rebirth semblent familières, tout comme le titre du morceau, c’est qu’il s’agit en fait d’une version légèrement retravaillée de Death In Reverse, qui figure sur Transcendental, le split partagé l’an passé avec leurs collègues de label (Pelagic Records) de The Ocean. Alors que le résultat ne montre pas de défauts rédhibitoires et s’écoute avec suffisamment de plaisir pour ne pas avoir envie de passer à autre chose, il lui manque définitivement quelque chose pour sortir du lot.
 
Ce « recyclage » s’étend au deuxième morceau, Stellar, qui reprend et extrapole la fin du même Death In Reverse, jouant la carte de cordes réconfortantes, d’un glockenspiel et d’un piano qui, s’ils évoluent de façon cohérente, manquent d’intensité. Il n’est évidemment pas aisé de se réinventer dans un style aussi codifié que le Post-Rock, même si les Texans d’Explosions In The Sky ont prouvé cette année avec le somptueux The Wilderness qu’un changement d’approche et une prise de risque suffisante pouvaient aboutir à un résultat aussi surprenant que réussi. De risque, il n’est pas vraiment question sur Requiem For Hell. Le morceau-titre, pièce de résistance de l’album, nous emmène sur les terres des chapitres les plus épiques écrits par Godspeed You! Black Emperor. La puissance qu’est capable de produire Mono reste impressionnante, à défaut d’être mise au service d’une composition très originale, et il serait bien malvenu de bouder son plaisir devant le final apocalyptique de ces 18 minutes s’achevant dans le bruit et la fureur. 

Parmi les points forts de ce disque, et n’y voyez aucune ironie, figure sa durée relativement réduite (46 minutes), évitant à une trop grande lassitude de s’installer et gommant en partie les défauts des passages les moins prenants. Ely’s Heartbeat, par exemple, dont l’objectif semble être un retour au calme salutaire après la déflagration des 5 dernières minutes de Requiem For Hell, finit par tourner en rond et laisse une impression de tiédeur et de redite qui n’ajoute rien au crédit du quatuor. Très cinématographique, comme son nom pouvait le laisser présager, The Last Scene conclut l’album sur une bonne note, jouant totalement la carte de l’ambiance sans se soucier d’avoir à gérer une quelconque explosion, laissant simplement la mélodie suivre son chemin et mourir d’elle-même, de façon presque naturelle. Si l’on peut regretter que Mono ne se mette pas davantage en danger, il faut lui reconnaître le mérite de ne pas forcer les choses, lui évitant ainsi de basculer dans le cliché le plus total.

Mono était de passage récemment à Paris avec Alcest. Le compte-rendu de ce concert se lit ici.

Holy Ground : NYC Live ( 2010 )

Sur scène, Mono n'est pas le groupe le plus spectaculaire qui soit. Pour le quatuor, l'important est l'émotion suscitée par les vibrations, par les notes qui s'échappent nonchalamment, s'envolent dans les nappes éthérées, s'entrechoquent dans le chaos le plus renversant. Pour fêter ses dix ans, le groupe a souhaité être accompagné par le Wordless Music Orchestra dans le Holy Ground de New York. Certes l'alliance n'est pas des plus extraordinaire, mais n'est pas non plus une hérésie tant la musique de Mono se marie parfaitement avec les caresses des cordes. Prétentieux alors ? Pas tant que çà, surtout lorsqu'on voit la mise en scène opérée lors du concert. Le groupe centré au devant de la scène, seule Tamaki en station debout, se confondant quasiment avec l'orchestre, au second plan. De l'humilité, de la modestie aussi dans ces plans fixes, essentiellement filmés de loin pour accentuer cette notion symbiotique entre Mono et le WMO, alternant parfois avec des gros plans capturés caméra sur l'épaule, à la prise hésitante, au rendu parsemé de grésil, presque flouté genre bootleg, images volées d'un concert où rien ne doit interférer.
Groupe assez hermétique, la prestation de Mono peut paraître ulcérante, légèrement ennuyeuse pour le néophyte. Un chapitrage inexistant - pas d'incrustations de titres - une lumière tamisée, peu agressive, l'ambiance est intime, quasiment funèbre et doit prendre une drôle de dimension dans ce lieu mystique. Devant l'écran le sentiment est bien évidemment autre et le dvd ne retranscrit que partiellement le ressenti de la nombreuse assemblée, d'où la sensation d'être le spectateur d'un happening auquel on a été invité au dernier moment - ce qui est un peu le cas - et à qui on a refilé les moins bonnes places. Pour une fois, c'est le dvd qui apparaît superflu. Uniquement pour les fans.     

Tracklist :
Cd : 1. Ashes in the Snow, 2. Burial at Sea, 3. Silent Flight, Sleeping Dawn, 4. Are you There ?, 5. 2 Candles, 1 Wish, 6. Where Am I, 7. Pure as Swnow, 8. Halcyon (Beautiful Days), 9. Everlasting Light

dvd : 1. Ashes in the Snow, 2. Burial at Sea, 3. Silent Flight, Sleeping Dawn, 4. Are you There ?, 5. 2 Candles, 1 Wish, 6. Where Am I, 7. Pure as Swnow, 8. Follow the Map, 9. Halcyon (Beautiful Days), 10. Everlasting Light

A écouter : Halcyon (Beautiful Days), Everlasting Light
15 / 20
6 commentaires (12.67/20).
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Hymn to the Immortal Wind ( 2009 )

"Les sanglots long des violons de Silent Flight, Sleeping Dawn blesse mon cœur d’une langueur monotone. Tout suffocant et blême quand sonne l’heure.
Je me souviens des jours anciens et je pleure".

Mono mélancolise tout ce qu’il touche. Ce n’est pas nouveau. C’est une chose qu’on sait, qu’on garde au cœur - qu’on ne fait que masquer en réalité - mais qui revient toujours et inlassablement dans chacun des titres des japonais. Mono est une plaie qui ne cicatrice jamais réellement. Hymn To The Immortal Wind reprend donc les choses là où You Are There les avait suspendu avec son Moonlight de clôture. Au milieu des songes. Avec les même notes en forme de flammes vacillantes, avec les mêmes reflets floutés qui finissent par se briser sous les coups d’une batterie en éveil.

Exactement les mêmes choses ? Pas tout à fait. Hymn To The Immortal Wind souhaite désormais que la rêverie devienne réalité. Speak materialism. L’ambition des japonais est ici – au moment de leur dix ans d’existence – de gagner en consistance. Les petits airs sont devenues des symphonies, les compositions intimistes des opéras. Mono a fendu sa chrysalide pour déployer ses ailes. Le Post-Rock porte maintenant des majuscules. C’est avec tout un orchestre donc que le quatuor joue désormais (Ashes In The Snow, Burial At Sea). Il en ressort ce quelque chose de plus vaste, de plus auguste même, qui s’appuie sur une expérience de musique de film (l’influence de Joe Hisaishi se fait d’ailleurs sentir dans Follow The Map) pour mettre en place une fresque musicale qui cherche à donner une sonorité au mot "épique".

Hymn To The Immortal Wind est en ce sens une transcription sonore de l’Hiver, un climat qu’on aurait mis en partition, avec ses pluies de corde, ses tempêtes, ses vents tristes et ses élans majestueux. Certains diront donc de cette dernière sortie/saison qu’elle est ennuyeuse - trop froide peut-être -, d’autres la diront belle et envoûtante. En réalité, Mono a dit vouloir faire de la musique pour "rencontrer la foule". C’est chose faite car Hymn To The Immortal Wind parle bien aux âmes. Il les rencontre.

En écoute sur myspace.

A écouter : Silent Flight, Sleeping Dawn

Gone : A Collection of ep - 2000/2007 ( 2007 )

Une collection de Ep est rarement un objet intéressant, sauf pour le fan absolu, surtout quand les Eps dont il est question sont encore trouvables dans le commerce. Dans le cas de Mono, la "collection" se résume à Gone, 10 morceaux, pour une durée totale de 76 minutes, avec la quasi-totalité de la discographie présente (seule le split avec World's End Girlfriend brille par son absence). Le quatuor de japonais offre donc son postrock grâce à cette rétrospective sur 7 ans...

Proche de GYBE! période Yanqui U.X.O. par ce côté lent, cette volonté de créer des mélodies basées sur des envolées lyriques (Memorie Dal Futuro, Black Rain), le groupe n'en reste pas moins dans l'ombre, avec une qualité moindre. Certes le souffle de la poésie s'est posé sur une partie des morceaux (Finlandia, où comment survoler un pays grâce à la musique), mais l'autre partie semble trop hasardeuse (Since I'Ve Been Waiting For You, lancinant à souhait où Yearning (du split avec Pelican) et sa montée en puissance prématurée) du fait de l'évolution de la qualité des compositions du groupe.

Ambiance presque érotique sur Finlandia grâce à cette évolution délicate, qui finit dans une apothéose de sentiments, souffle du vent au bord de la mer sur Due foglie, una candela : il sofflo del vento, où dimanche calme, assis à regarder la pluie tomber sur Black Rain (seul morceau où une voix se fait entendre)... Mono varie ses atmosphères, mais on peut reprocher, sur les morceaux les plus longs, cette construction répétitive (début calme, doux, suivi d'une montée en puissance qui se termine par une explosion des sens) qui a tendance à supprimer tout effet de surprise, piétinant l'intensité que l'on pourrait sentir par moment. C’est ce reproche qui peut principalement être fait à cet album: cette impression de grands morceaux identiques, entrecoupés d’interludes variées, qui sont finalement le point fort de Gone. A noter le très bon Rainbow, où les cordes s'entremêlent dans une valse trop courte ou l'excellent Little Boy et sa première partie très typée "boite à musique", permettant presque d'imaginer la danseuse tournant sur elle-même...

Pour ceux qui aiment et ont toujours aimé Mono, Gone sera une bénédiction, un moyen d'obtenir des morceaux quelque fois inaccessibles ou sans débourser trop d'argent. Pour les autres, c'est un moyen d'avoir un aperçu rapide de toutes les périodes du groupe. Néanmoins, au-delà de cela, les morceaux sont inégaux, transmettant un sentiment mitigé quant à la qualité de Gone. Bel objet certes, mais d'un intérêt plus que discutable (si ce n'est l'intérêt économique). Gone, au final, permet au quatuor de faire patienter ses fans en attendant le prochain opus du groupe...

A écouter : Finlandia, Little Boy