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Biographie
A la base créé pour être le projet parallèle des frères Weiss (Aaron&Michael) et de Christopher Kleinberg, les 3 musiciens jouant déjà dans The Operation, le désir d'Aaron Weiss de créer un groupe expérimentant de nouveaux sons permit à MewithoutYou de sortir un premier Ep commercialisé I Never Said That I Was Brave et de signer chez Tooth & Nail en 2002. Après quelques changements de line-up et l'abandon de The Operation, MewithoutYou sort son premier album [A-B] Life en 2002, puis Catch For Us The Foxes 2 ans plus tard. Après un autre changement de bassiste, le groupe enregistre son 3ème album Brother, Sister en 2006, puis subit un nouveau départ, celui de Christopher Kleinberg, en 2007. Les musiciens préparent leur retour pour 2009, avec leur 4ème album. Le "You" de MewithoutYou fait référence à Dieu, et le groupe explore, à travers sa musique, les religions judéo-chrétiennes, que ce soit au niveau des paroles ou des noms et artworks des albums.
Il en aura fallu du temps pour que j'arrive à me lancer dans l'écoute de Ten Stories. La faute à une petite baisse de régime sur It's All Crazy! It's All False! It's all a Dream! It's Alright. Et puis l'artwork n'est peut être pas le plus joli de la discographie du groupe, le titre n'est pas non plus celui qui intrigue le plus. Finalement, presque 6 mois après sa sortie, on sort l'objet de son écrin, on ose poser une oreille curieuse et on se lance.
Est-ce l'atmosphère, l'humeur ou simplement le temps ? Ten Stories se glisse directement en tête. "East Enders Wives", "Fox's Dream of a Log Flume", "Nine Stories", … on retrouve l'essentiel de MewithoutYou (notamment le chant d'Aaron Weiss, l'un des principaux éléments caractéristiques du combo) mais surtout un côté humain assumé, au delà de la naïveté trop sucrée de It's All Crazy!
On trouvait ce dernier chaleureux, Ten Stories l'est tout autant. Le cotonneux "Bear's Vision of St. Agnes" et ses cuivres amène "All Circles" et sa basse bondissante tandis que "February, 1878" (référence absolument pas voilée à "January, 1979") ouvre l'album de manière entrainante. Que de compliments et d'atouts à première vue. Toutefois ...
... mewithoutYou n'est pas non plus au niveau de Brother, Sister. Des compos comme "Cardiff Giant" ou "Elephant in the Dock" s'avèrent somme toute assez classiques : On en devine les contours très rapidement et surtout la structure - parfaitement maitrisée cela dit - reste très similaire à ce qu'on a déjà pu entendre (certains airs s'avèrent assez proches d'anciens titres comme pour "Grist for the Malady Mill"). Il est fort dommage que nous n'ayons pas de prise de risque ou de véritable nouveauté : tout est cantonné à un registre limité par un gros noeud de guimauve dont on évite - heureusement - de trop s'approcher. C'est d'ailleurs la faiblesse majeure de Ten Stories ; arriver à composer des titres enjôleurs, sur lesquels on s'attardera parfois mais aussi se limiter principalement à ce que le groupe sait faire, sans véritablement aller au delà. D'autres, dans différents registres, y arrivent avec plus ou moins de réussite (ACDC, Every Time I Die par exemple, dans d'autres registres) mais ici les points communs sont parfois trop flagrants.
Ten Stories. Un album bien plus doux que le reste de la discographie et surtout plus enjôleur de son précédesseur. La flamme brille encore, Aaron Weiss a réussi à en préserver l'âme mais cela n'en fait pourtant pas leur meilleur album.
A écouter : Nine Stories
Brother, Sister était sans doute à marquer d'une pierre blanche dans la discographie de mewithoutYou pour sa cohérence, son énergie et tant il représentait la meilleure expression de l'identité du groupe, une conciliation du rock et du religieux qui transpirait d'une sincère naïveté. Le groupe ne s'épargnait aucun effort pour louer son dieu et accrocher les oreilles dans le même sac.
La référence religieuse et son importance ici, même si elle parait une cible facile, reste indispensable pour comprendre et apprécier cette nouvelle sortie. Pour résumer, il faudra accepter de prendre son mal en patience et de souffrir que les guitares catchy restent à la porte de l'Eglise. It's All Crazy! It's All False! It's All A Dream! It's Alright! est une collection de ballades qui s'écoute au coin d'un feu, autour d'une famille, d'amis. Déstabilisant, là où Brother, Sister préférait percuter à coups de riffs directs et bien sentis; ce nouvel album mise sur une approche plus douce et personnelle, plus "proche" de chacun. Pour autant, il ne tombe pas non plus dans le mielleux d'un catéchisme prosélyte facile. On retrouve ici et là quelques éclats bienvenus: "Bullet to Binary (Part Two)" rappelle d'ailleurs les meilleurs moments de son prédécesseur, qui semble chuter sans fin avant de s'élever aux cieux sur des choeurs déchirants.
Tour à tour éraillés, rythmés ou invitations à la communion et au recueillement, les versets à l'emporte-pièce qui composent le disque sont autant de feux diffus qui ont vocation à rassembler. Chaleur des choeurs (sur quasiment tous les morceaux), chaleur des instruments, présence bienvenue de cuivres (trombones et trompettes en fanfare!), It's All Crazy!... est le cheminement logique d'un groupe qui entend profiter de la musique pour faire passer son message. Il suffit d'écouter, à ce titre, la jolie parabole "The King Beetle on A Coconut Estate" pour se faire une idée de la démarche à l'oeuvre.
Un chemin qui n'évite cependant pas quelques écueils gênants pour ceux prêts à s'ouvrir le coeur. On passera rapidement sur la dernière chanson, "Allah! Allah! Allah!" qui se veut une ingénue communion inter-religieuse et qui ne réussit à toucher que par la faiblesse de sa mélodie et la maladresse de ses paroles. On y passe, mais peut-être pas si rapidement, finalement. Ce morceau est symptômatique du travers qui guette (trop) souvent le groupe désormais. Au-delà d'une certaine répétitivité dans la construction des morceaux (guitare acoustique / choeurs finaux) qui manque parfois d'audace et d'inventivité ("Timothy Hay"), It's All Crazy!... est au final diaboliquement naïf et il est à craindre que la dimension spirituelle vienne à prendre le pas sur la musique, dommageable dans le sens où le groupe risque de tomber dans des lieux communs pas forcément engageants, voire même caricaturaux allant jusqu'à faire dégouliner ses bons sentiments un peu collants.
Heureusement, le disque s'arrête à temps, après un ultime dérapage cependant, mais évite au final l'écueil marshmallow d'un album de scouts. De justesse; pour cette fois, qu'ils aillent encore en paix et reprennent leur chemin, en pénétrant la bonne voie à l'avenir.
A écouter : Moui
Brother, Sister. Un nom abordant d'entrée de jeu le thème de la religion. De plus, quand on sait que le "You" de MewithoutYou fait référence à Dieu et que le groupe est signé chez Tooth And Nails, le doute n'est plus permis. Donc pour résumer, MewithoutYou sort son troisième album, toujours avec de nombreuses références aux religions judéo-chrétiennes. Après un [A-B] Life et un Catch For Us The Foxes dont la qualité n'est plus à prouver, MewithoutYou évite pourtant de ressortir un album trop proche, s'offrant ainsi quelques escapades musicales.
Du spoken-word poétique posé sur un rock indé serein et majestueux. Voilà ce qui pourrait caractériser au plus proche Brother, Sister. Que ce soit la fragilité de la trilogie des araignées ("Yellow, Orange & Brown Spider"), la mélancolie de "In A Market Dimly Lit" ou la fougue de "Wolf Am I! (And Shadow) ", MewithoutYou ne se laisse jamais emporter par des mélodies mielleuses ou vaporeuses. Les instruments sonnent au final comme une base solide, suivant le rythme imposé par le leader du quintet. L'ensemble sonne carré, très peu d'écarts ressortent, donnant ainsi l'image d'un groupe soudé, uni par la musique, mais sachant varier ses compositions pour en refléter les différentes personnalités et facettes. L'entrain d’Aaron Weiss semble bien présent, puisque son chant, la plupart du temps calme, se lance par moments dans des envolées, comme s'il était possédé (le refrain de "Wolf Am I! " ou "O, Porcupine"). Les quatre autres musiciens n'hésitent pas à venir le soutenir sur des chœurs, certes peu présents et en retrait, mais néanmoins audibles. Alors que les 2 albums précédents était très "basiques" au niveau des instruments (le schéma classique basse / guitare / batterie), MewithoutYou incorpore ici de l'accordéon ("In A Market Dimly Lit"), de la harpe ("Brownish Spider"), et des percussions. Le tout sans jamais en abuser, préférant en tirer les sons avec douceur.
Les paroles sont clairement influencées par Dieu, au même titre que l'artwork (inspiré de la Cantique pour le Soleil de Saint François D'Assise), ce qui n’est pas étonnant que le groupe fait partie des proches de Norma Jean ou The Chariot (Aaron Weiss a collaboré sur un morceau du premier album de Norma Jean et apparait régulièrement en live avec eux). Pourtant, malgré cet aspect parfois déroutant, la qualité des textes permet d'apprécier les sonorités, la richesse et la poésie dégagées par MewithoutYou. Aucune haine, aucune violence ne parvient aux oreilles de l'auditeur, plutôt une douce mélopée, dont l'efficacité est accrue par ces spoken-words presque chantés.
Pourtant, on peut émettre quelques réserves sur certains passages. La trilogie "Yellow / Orange / Brownish Spider", même thème joué sur plusieurs instruments, peut sembler répétitive, "de trop" car si ce n'est les sonorités et paroles différentes, le rythme ne semble pas changer. Peut-être une volonté de montrer qu'au final, sous plusieurs apparences, l'unité est présente (on peut penser à l'histoire religieuse). De plus, certains chœurs sonnent trop forcés, presque niais (celui de "The Sun And The Moon" par exemple). Ces quelques moments sont peu présents, mais forment un creux au vu de la qualité générale de Brother, Sister.
Alors Brother, Sister est un bon album, poétique, et si l'on passe outre l'aspect religieux (pour ceux que cela pourrait rebuter), qui ne se ressent au final qu'à travers les paroles; Aaron Weiss et ses acolytes risquent de donner des frissons. MewithoutYou confirme ce qui était lancé dans les 2 albums précédents, et s'en donne à cœur joie au travers de Brother, Sister, qui est à écouter, pour se sentir pousser des ailes...
A écouter : In A Market Dimly Lit - Wolf Am I! (And Shadow)
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