On s’était fait secouer les maxillaires et décoller la plèvre à l’écoute de son split avec Grave, Shovel… Let’s Go. On avait pressenti le frémissement qui précède l’explosion. On avait été suspendu… et MeAndGoliath avait allumé une mèche, en la plaçant sur ses cordes.

Le bout de la mèche consumée, c’est ce 10’. Comme une déflagration. Un exercice de haute voltige. MeAndGoliath y explore tous les tempos, flirtent avec tous les rythmes et chavire sous l’ivresse de ses propres mélodies. Bienvenu dans le lupanar emotionnal hardcore. "You are now free" disent-ils. Emo-violence à l’entrée, arpèges mélodique de fou derrière le rideau et fin hurlée le long du roulement de la batterie qui vient reprendre ses droits. Paye à la sortie. En attendant, jouis de ce que tu entends. Car oui MeAndGoliath associe bien les montées à la James Dean et les sauvageries vocales à la Eucalypt. En lutte anar’.

Perdue d’avance ? Comme cette enfant assise sur les rochers à côté de la mort qu’on distingue sur l’artwork (et à l’intérieur du vinyle)? Peut-être mais lutte quand même. Avec la même disposition que Logs – basse, guitare, batterie – dont il se rapproche fortement, le même jeu de mélodies entrecoupées de secousses et de saccades, la même basse vrombissante et le cri par-dessus ; MeAndGoliath trouve le moyen de faire mieux, de faire plus varié, plus nerveux, plus intense (!) et de bousculer nos certitudes à chaque nouvelle écoute. Et si le renouveau de l’emo-harcore, c’était eux ?

Du grésillement des torches inaugurales de "Médic" qui laisse survenir ce chœur de voix à la criée à l’épisode bass is beautifull de "Missing : Aorta", en passant par l’introduction écorchée de "Goliath and I" ; MeAndGoliath excelle partout, tout en ne restant jamais au même endroit. Comme si quelque chose des génialissimes L’Antietam leur avait été transmis, comme s’ils en étaient les héritiers. Ce doit être cela.

"La pierre s'enfonça dans son front et il tomba la face contre terre".

Non, je ne peux me résoudre à penser que LA montée de "Sick Boy" pourrait en laisser de marbre. Ce riffing troublé à la Kaddish, cette batterie qui s’emballe, entortillée dans un nœud de cris et qui finit par rendre les armes, vaincue par un épilogue emo ;  c'est du grand art. Alors qu'on désigne sans plus attendre les auteurs de ce coup de fronde: MeAndGoliath.

Avant ça, 3 titres font déjà mouche. Split oblige, on s’est donné la réplique en 2 actes repartis. Grave, Shovel… Let’s go ! (qu’on avait connu sur la tournée d’Archives) – premier protagoniste a s’élancer - a l’emo périphérique sous les semelles. Pas très éloigné de Kids Explode ou d’Adorno dans l’idée, le quatuor s’adonne à un emo mélodique, qui fait la part belle à des passages piquants et raffinés ("Edgy Electrician") ; le tout relevé par une basse expansive et chaloupée et des chœurs clamant leur amour du pianiste Godowsky ("Rubinstein"). MeAndGoliath est plus sombre, plus furieux, plus harcelant à la batterie. Ici, le chant s’écorche d’avantage, s’entrecale entre les cisailles fasty d’une guitare qui attend qu’un "go" en haut d'une montée foudroyante, pour couper définitivement l’étole. Et punk et screamo font alors bon ménage, sans l'assentiment d'aucun prêtre, dans un alignement de changements de rythme dément. Foutue réussite !

Ces splits tout court sont à la musique ce que les teasers sont au cinéma. On ne sait jamais si tout le bon de l’œuvre n’a pas été condensé dans cette présentation éclaire et ce qu'il en sortira lors de l'appréciation intégrale (Cf le prochain 10' à venir). Mais dans le doute, il faudrait quand même être fou pour passer à côté de MeAndGoliath. Dans la veine de Kaddish. Dans la veine donc de ce qui ce fait de mieux outre manche. Rien que ça.