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Biographie

Masters of Reality

Masters of reality est un groupe de rock alternatif américain originaire de Syracuse (New York) formé en 1981 par le chanteur guitariste Chriss Goss et le guitariste Tim Harrington. Le style du groupe est très souvent associé au mouvement stoner / desert rock et oscille entre heavy, blues et rock. Leur style est un peu différent du stoner rock et plus "posé" que le stoner metal, bien que certaines chansons du groupe appartiennent entièrement à cette mouvance (passages bluesy, composantes psychédéliques, guitares accordées très bas, omniprésence de la basse, etc...).  
Le groupe sort son premier album "Masters of Reality", souvent appelé "The Blue Garden" (référence à la pochette originale de la version vinyle), en 1988, qui passe plus ou moins inaperçu, puis dissous le groupe fin 1989. Il faudra attendre 3 ans pour que Chriss Goss reforme le groupe et sorte leur deuxième album "Sunrise on the Sufferbus", puis encore 7 ans pour leur 3ème album studio "Welcome to the western Lodge". Et Chris Goss de se justifier "Masters Of Reality will always be a project with alternating lineups. First of all, because I can't afford paying people to tell they're in the band.".
Masters of Reality sortira au final peu d'albums (6 en 29 ans d'existence), Chriss Goss exerçant une seconde activité de producteur débordante et ne pouvant pas assurer le maintien du groupe avec constance. Et quel producteur ! C'est à lui qu'on doit les albums de Kyuss Blues for the Red Sun, Welcome to Sky Valley et ...And the Circus Leaves Town ou encore les volumes 3, 4, 7 et 8 des Desert Sessions, tous les albums de Queens of the Stone Age, et également la production d'albums de Mark Lanegan, UNKLE, Screaming Trees, Mondo Generator et bien d'autres, la liste est longue. Autant d'artistes influencés dans les années 90 - 2000 par ce phénomène, si bien que certains considéreront Chriss Goss comme un des parrains du mouvement stoner, tant l'artiste a influencé tous ces artistes stoner.
En 2001 ils sortent leur 4ème album studio "Deep in the Hole", certainement l'un de leur meilleur album, avec la participation d'artistes de la planète "desert rock", comme Nick Oliveri et Josh Homme (Queens of the Stone Age) ou encore Mark Lanegan. Josh Homme et Nick Olieveri participeront d'ailleurs à la tournée exceptionnelle qui s'en suivra("Flak'n'Flight"). Le milieu du stoner c'est une grande famille !
En 2004, ils reviennent avec Give Us Barrabas puis Pine/Cross Dover en 2009.
Masters Of reality, ne connaitra jamais la gloire, mais aura aidé d'une main de maitre à développer le style bien particulier du stoner rock et influencé un nombre incroyable de groupes dans les années 90 - 2000.

17 / 20
1 commentaire (16/20).
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Pine Cross Dover ( 2009 )

Les Maîtres de la Réalité sont en place depuis les années 80, lancés temporellement avant les incontournables Kyuss, où le frontman et guitariste Chris Goss faisait valoir ses qualités de producteur. Le quartet a ensuite toujours évolué dans l’ombre tenace, davantage encore derrière la consécration des Queens of the Stone Age. Leur relative irrégularité explique sans doute une partie de cette discrétion médiatique mais la qualité de leurs efforts rend cet état de fait assez incompréhensible, qu’il s’agisse du tout premier album de 1988 ou du dernier en date Pine/Cross Dover, pondu il y a déjà neuf ans. L’occasion est donc plutôt belle de nous intéresser à cette ultime offrande, histoire de rafraîchir notre base de données concernant l’un des pionniers du stoner, et surtout l’un des plus créatifs.

Le très acoustique Give Us Barrabas, amorçant le retour aux affaires de Masters of Reality en 2004, perpétuait la classe musicale de Goss et ses (nouveaux) potes, toujours en marge d’un stoner internationalement diffusé par QOTSA et consorts. Orchestration et expérimentation donnaient de la valeur ajoutée au blues/rock lourd et brumeux bien connu de nous tous, pauvres mortels, et ça continue bien évidemment avec Pine/Cross Dover, malgré des penchants pop tout aussi captivants, peut-être influencés par l’excellent projet annexe de Chris Goss, Goon Moon, réalisé avec Jeordie White (ex-Marilyn Manson, A Perfect Circle) en 2005.

Et le riff s’exprime sans préavis dès le bonbon King Richard TLH au léger goût de David Bowie. Premier tube et premier constat : l’inspiration est intacte, bien aidée par une section rythmique plus à son aise et plus souple que sur le précédent long. Il suffira qu’Absinthe Jim and Me retentisse pour que l’on se prosterne à genoux dans le sable chaud, noyés dans les effluves grasses d’un rendu continuellement fantastique. Ce ne sont pas les relents dub psychédéliques de Worm In The Silk, tapissé de voix féminines délectables, ou de l’autre tube, le percussif et ultra grisant Always, qui laisseront poindre le moindre soupçon de déception ou de frustration. Ça file comme ça respire, les arrangements coulent de source, l’écriture est limpide, comme avant en fait, mais le tout augmenté d’une production modernisée. Avec VP in IT on a alors le sentiment que les Masters of Reality n’en sont clairement pas déconnectés, enfilant les tubes comme des perles, sans renier la part intrinsèquement expérimentale de leurs intentions (Johnny’s Dream). Le quartet ne se gène d’ailleurs pas pour associer les éléments, comme sur les très fameux Rosie’s Presence et le plus progressif The Whore of New Orleans, que l’on croirait tout droit extirpés des années 60/70, Chris Goss témoignant d’une finesse vocale à toute épreuve. Un délice. Et comment ne pas citer Alfalfa ? Ce (faux?) jam stoner/blues instrumental d’environ douze minutes, concluant l’album vautré dans la grâce d’un groove infini.

Pine/Cross Dover ne fait que compléter le taf d’orfèvre entreprit par le génial Chris Goss depuis les années 80, démontrant un talent d’écriture incontestable, scandaleusement sous-médiatisé. Le bonhomme a aussi toujours su bien s’entourer de musiciens aguerris pour exécuter idéalement ses compositions, sans forcer, notamment ici un frappeur pétri d’audace et de feeling. Encore un album passé sous les radars, encore une pépite de stoner blues expérimental, un modèle du genre. Vivement la prochaine, qui se laisse un peu trop désirer à nos oreilles.

A écouter : comme toute la disco.

Masters of Reality ( 1988 )

Masters of Reality fait partie de ces groupes que personne ne connaît, qui est presque invisible, mais dont l'aura artistique est incontestablement brillante. Plus un projet à la composition fluctuante qu'un groupe régulier, Masters Of Reality doit son rayonnement artistique à son unique membre permanent, Chris Goss (chanteur guitariste), qui non content d'être à la tête d'un groupe ayant influencé énormément le paysage musical américain, a réussi à devenir LE producteur indispensable, l'homme de l'ombre qui se cache derrière tant de projets estampillés "desert rock" ou stoner rock durant les années 90 - 2000. Et pour en arriver là, pour que ce genre musical particulier soit aussi développé aujourd'hui, il en aura fallu du chemin ! Masters Of Reality n'est bien sûr pas le seul et unique groupe précurseur de ce genre, loin de là, mais on peut le considérer comme une étape décisive, une sorte de référence, de balise en plein milieu du désert.
Revenons quelques années en arrière, nous sommes dans les années 80, époque bénie du fluo, de MTV, de la new wave et du début de la popularisation du heavy metal, qui ne fait désormais plus peur. Une époque où il semble risqué de s'aventurer à des mélanges musicaux, encore moins à créer des nouveaux genres. Quand on est fan de classic rock, des beatles, de rock progressif, de blues, et de black sabbath comme le jeune Chriss Goss, cela devient compliqué d'essayer d'innover, de trouver sa place dans cette époque étrange. Le stoner dans tout ça ? Pas tout de suite, patience. On dit que c'est Kyuss qui a sorti le premier album du genre avec Blues for the red Sun, à une époque (1992) ou toute cette mouvance et cette façon de faire de la musique a eu le temps d'émerger doucement, influencés par des groupes comme Blue Cheer, Sir Lord Baltimore et bien sûr Black Sabbath ou encore Blue öyster Cult. Tous s'en sont inspirés : Kyuss, Monster Magnet, Acrimony et consorts, tous ont la particularité d'avoir digéré deux décennies de musique pour accoucher d'un rock âpre, lourd et monolithique : le stoner.
Pourtant, un groupe avait déjà intégré tout ça et fait l'effort d'innovation un peu avant nos groupes de stoner préférés, une sorte de précurseur avant l'heure, un groupe à la carrière anecdotique, qui, soyons clair, ne connaîtra jamais le succès pourtant mérité, ne fera jamais déplacer les foules, et ne touchera que très peu les gamins des années 80. Ce groupe vous l'aurez compris, c'est Masters Of Reality. Pas de place pour eux dans les années 80, trop expérimental, trop discret (c'en est presque énervant), sans vraiment de volonté de percer, sans line up stable, etc... Bref, rien pour se démarquer. Enfin presque rien. De l'audace, des idées détonantes pour l'époque (parmi les premiers à mélanger blues, heavy, pop et progressif), et un frontman vraiment talentueux, qui seront le départ d'une percée artistique qui traversera deux décennies. Pas mal non ? Toujours pas convaincu ? Derrière Kyuss et nombre de groupes étiquetés "stoner" se cache un seul homme : ce fameux frontman talentueux. Sa discographie est impressionnante et force le respect.

Rentrons maintenant un peu plus dans le vif du sujet avec ce premier album du groupe, produit à l'époque par Rick Rubin, à qui l'on doit pas mal de petites bombes des années 90 (Red Hot Chili Peppers, Slayer, Nine Inch Nails, System Of A Down, ...). La première chose qui frappe, c'est que même presque 25 ans après, l'album est toujours aussi agréable à l'écoute, n'a presque pas vieilli. Et même si le son peut sembler être à dix mille lieues d'un album de stoner ou de desert rock actuel, on retrouve des composantes évidentes qui sont à la base de ce genre de musique : passages heavy, psyché, guitares lourdes et basse omniprésente. Attention, ce premier album pose les bases, ce nouveau son est toujours en gestation, et le groupe se cherche encore. Les premières écoutes délivreront à l'auditeur un blues rock puissant, assez déroutant comme cette première chanson Domino, tandis que des écoutes prolongées de l'album révèleront de véritables pépites rock n roll annonçant la couleur du stoner, laissant entrevoir le désert au bout du chemin. Tout est question de contexte, si aujourd'hui on retient de chansons comme the blue garden, kill the king ou gettin' high leur caractère entêtant et leurs guitares bluesy bouillonnantes, ces mêmes chansons étaient à l'époque un étrange mélange de heavy et de blues / rock progressif assez inédit.
Avec une introduction instrumentale Theme for the scientist of invisible fougueuse et majestueuse, à grands renforts de guitares punchy, Masters of Reality nous en met plein les oreilles, sans concession, pour une petite minute de ce que l'on pourrait appeler une introduction efficace, puisque juste après viendra la première claque, la première bizarrerie qu'est Domino et son blues heavy entrainant.
S'en suivra la deuxième claque, moins évidente, mais tout aussi douloureuse, le morceau The Blue Garden, incontestablement une des meilleurs chansons de l'album, qui démarre tout doucement avec la voix veloutée de Chriss Goss, propose un refrain effroyablement entêtant, une guitare wawa qui vous laisse béat d'admiration, avant de terminer en une déferlante de guitares sauvages pour un final grandiose. Un début d'album parfait...
Viendront Gettin'high et Candy Song, deux chansons superbes au groove soigné, révélant une certaine aptitude du groupe à nous faire voyager au cœur d'ambiances toutes plus électriques les unes que les autres. Une ballade au piano Magical Spell, deux morceaux de country "électrique" étonnants The eyes of Texas et Lookin'to Get Rite où Goss maitrise parfaitement le vibrato vocal.
Et pour clôturer cet album mythique, deux chansons particulièrement réussies John Brown et son bottleneck endiablé, et Kill the King,  dernière chanson de l'album, sorte de synthèse de l'album reprenant toutes les caractéristiques citées plus haut, que vous rejouerez plusieurs fois pour en comprendre toutes les subtilités.  C'est déjà la fin du voyage, le désert est au bout du chemin, l'histoire du stoner rock peut commencer !

Première tentative musicale, premier échec commercial, premiers pas dans l'histoire du rock'n roll pour Chris Goss et son groupe ; ou comment avec un album audacieux réussir à mêler un certain heavy au parfum sinistre, un groove façon "sudiste américain" saupoudré d'un soupçon de blues, de country, de rock progressif, le tout planant dans un psychédélisme ambiant réjouissant. Magique !

A écouter : plutôt deux fois qu'une !