Lost In Grey
Metal Symphonique

The Waste Land
01. The Waste Land
02. Expectations
03. Unohdukseen Katoaa
04. 1992
05. Far Beyond And Further
06. Wolves Among Men
07. Prelude For Emptiness
08. Drifting In The Universe
Chronique
« Et si...? » est une expression que j'affectionne tout particulièrement. Elle paraît toute bête, mais elle élargit le champ des possibles, ouvre grand la porte au rêve (comme au cauchemar, d'ailleurs). C'est un accès direct au royaume des idées. Parfois toutes bêtes, elles aussi, mais qui peuvent déboucher sur de bonnes surprises. Ou même changer le monde, si on veut aller par-là, mais ne nous emballons pas, on ne fait que causer musique et je n'irai pas jusqu'à prétendre que ce disque est révolutionnaire. Parlant musique justement, j'ai envie de nouveauté, et si je jetais une oreille aux sorties de ce label inconnu, Reaper Entertainment, sur lequel sont parues deux belles découvertes de l'an passé (Elvellon et Dead Alone) ? Tiens, Lost In Grey, qu'est-ce que c'est que ça ? Metal Symphonique. D'accord, pourquoi pas, ça peut être sympa. Mais... Et si les étiquettes étaient beaucoup moins réductrices qu'elles ne paraissent ?
Parce que bon, stricto sensu, Lost In Grey rentre parfaitement dans la case qu'on lui a attribuée (allez, agrémenté d'influences Folk si on ne veut rien oublier), qui plus est dans son acceptation la plus courante, c'est-à-dire le Symphonique au premier plan, le Metal en renfort, à un niveau où les orchestrations sont omniprésentes, pas la guitare. Celles-ci sont d'ailleurs le véritable moteur des morceaux, parfois suppléées par les chœurs, tandis que les éléments plus heavy, plus ou moins prononcés selon les passages, servent avant tout de soutien, ou de temps en temps de contrepoint quand le besoin s'en fait sentir (Expectations). À ce propos, les morceaux sont composés quasi-exclusivement par... le claviériste, ça alors ! Amoureux des riffs et des soli bien sentis, vous risquez d'être déçus : si l'on excepte quelques rares moments (la fin de The Waste Land, le milieu de Far Beyond And Further ou encore le début de Wolves Among Men), la gratte se contente avant tout d'appuyer la section rythmique.
Et là, on pourrait commencer à se demander de quoi on parle : d'un vrai bon album comme semble l'indiquer la note, ou d'un clone insipide de [insérer nom de groupe fort connu de Metal Sympho, à adapter selon le degré de bourrinitude] ? La réponse se trouve dans la question, mais développons un peu. Tout ce qu'on vient d'évoquer, c'est la base musicale du combo, qui assure son unité, sa cohésion, qui lui permet d'emmener l'auditeur où bon lui semble sans lui faire lâcher prise. Et "où bon lui semble", c'est vaste. Très vaste. The Waste Land, c'est un panorama d'émotions, de sentiments refoulés, de doute, de conflit intérieur, de peine, de furie... Parce que depuis le début on parle de « Metal » Symphonique, mais dans ce contexte on a tendance à oublier que le Metal, c'est foutrement varié. Eh bien Lost In Grey en a parfaitement conscience et choisit d'en tirer avantage. Chaque titre développe sa propre ambiance, entre douceur et hargne, entre calme et célérité, entre Expectations qui débute façon Folk acoustique et Wolves Among Men à la fois sauvage et théâtral qui par moments évoquerait presque Carach Angren, entre un 1992 baignant dans la mélancolie et Drifting In The Universe, final épique de plus de douze minutes... Et dans tout cela, la seule bizarrerie qui ressort, c'est d'avoir placé Prelude For Emptiness, trois minutes et quelques de Folk assez planant sans paroles mais avec des chœurs orientalisants, juste avant le dernier morceau qui possède lui-même une intro de plus de deux minutes.
Terminons maintenant par l'un des atouts majeurs du disque, qui va de pair avec sa variété : ses voix. Lost In Grey dispose de trois vocalistes attitrés (plus une apparition de Nele Messerschmidt d'Elvellon, que l'on retrouve avec plaisir dans Expectations), pour une palette particulièrement étendue. En vrac, on a du chant clair (masculin et féminin), du chant heavy, du chant typé opéra, du growl façon Black/Death et toutes les variations intermédiaires, auxquels s'ajoutent des chœurs, qu'ils soient en retrait ou plus prégnants, et même de brefs passages parlés lorsque c'est pertinent... En somme, des voix pour toutes les circonstances.
Et s'il n'y avait pas systématiquement besoin de chercher toujours plus loin dans l'extrême ou dans les mélanges les plus incongrus pour trouver de l'originalité ? Et si même les genres dont on a souvent l'impression d'avoir fait mille fois le tour nous réservaient encore non seulement de bonnes sorties (ça il y en a toujours), mais des surprises ? Parfois on a tendance à croire que c'est une idée en l'air, et parfois un disque vient prouver le contraire. The Waste Land est de ceux-là.
A écouter : 1
Merci pour cette belle découverte ! Rien à redire : "tout est à écouter, mais surtout Wolves Among Men"