LoOp
Drone Rock / Shoegaze / Post Punk

Array 1
Chronique
Si la réapparition imprévue de LoOp courant 2013 avait été l'occasion de vérifier que, premièrement, Robert Hampson est probablement l'homme le plus classe du monde en chemise bariolée et que, deuxièmement, la réputation live de sa formation était très, très loin d'être surfaite, rien ne laissait présager un retour en studio; et encore moins si rapide. Les départs conjugués de John Wills et Neil Mackay ayant manqué de justesse de replonger le groupe dans l'obscurité, nous en étions plutôt rendus, il y a un an de ça, à nous estimer heureux d'avoir pu constater que les Peel Sessions n'étaient donc bien pas un tour de passe-passe joliment troussé. LoOp, alors fraîchement sorti de son hibernation, vibrait sur scène comme à la première heure et c'était déjà très bien.
Mais voici qu'en Juillet dernier les anglais reprenaient le fil de leur histoire. Naturellement, sans le moindre heurt. Comme si A Gilded Eternity n'était pas sorti il y a vingt-cinq ans et qu'il avait finalement suffi que Robert Hampson se décide à rebrancher ses guitares pour que sa création sorte de la léthargie dans laquelle elle s'était enfoncée. Les années ont passé, les hommes ne sont plus les même mais, fidèle à la recette ayant fait sa réussite, LoOp persiste en 2015 à décliner sans scillier sa lecture singulière du Krautrock entre tension Post-Punk feutrée, guitares Shoegazing à la dérive et rythmiques tourbillonnantes en trompe l’œil. Rassurant pour certains, redondant pour d'autres, ce retour en studio aura, quoiqu'il en soit au moins le mérite de faire le lien entre un passé glorieux et cette réincarnation contemporaine du groupe. A l'écoute de "Precession" et "Aphelion", fidèles impatients comme néophytes (re)trouveront en l'espace de quelques mesures ce qu'a toujours été l'identité sonore de cette formation pas tout à fait comme les autres qui avait un temps réalisé l'alliance parfaite entre évolution permanente et continuité obstinée.
L'essentiel se joue portant ailleurs. Loin d'avoir quoique ce soit à prouver, Robert Hampson se permet ici quelques caprices inédits en intégrant sur ce Array 1 des éléments jusqu'alors réservés à ses expérimentations signées sous le nom de Main. Rien de moins logique quelque part, ce projet aux frontières du Drone, de la Noise et du Dark Ambient lancé en solo au sortir du crash de LoOp l'ayant occupé une bonne partie de ces vingt dernières années. Aussi "Coma", bien qu'un peu inattendu ne surprend-t-il pas vraiment. Il ne fait qu'annoncer la réunification des deux facettes de la carrière du dandy anglais à venir sur un énorme "Radial" qui, bien que relégué en face B, constitue le cœur de ce retour studio. Avec ces dix-sept minutes de Drone Ambient battu par un vent de Kraut LoOpien absolument irrésistible, Array 1 boucle un chapitre jusqu'alors jamais vraiment refermé par Robert Hampson. Immuable, complètement hermétique aux modes la formation britannique, sans véritablement changer, n'a peut être jamais sonné aussi actuelle qu'en 2015. La faute cette approche du Rock sans chapelle ni age, très certainement. Intemporelle, oui. Et donc inusable.
La grosse demi-heure d'Array 1 pourra en définitive tout autant être pointée du doigt pour sa prise de risque minimale (retour en terrains conquis) qu'être applaudie comme une preuve de la constance et de l'unité de l'univers sonore développé par Robert Hampson depuis bientôt trente ans (LoOp/Main). La vérité de cet EP étant probablement située à mi-chemin entre ces deux jugements selon les goûts de chacun, peut être faudra-t-il en retenir avant tout les promesses qu'il semble soulever pour un futur proche. Le très discret sieur Robert ayant toujours d'avantage considéré son groupe comme une expérience live que comme un projet studio, le fait qu'il se soit donné la peine d'y retourner dit certainement quelque chose de sa motivation à poursuivre l'aventure. La brume électrique tapissée de fuzz cotonneux dans laquelle s'était abîmé LoOp il y a maintenant une petite éternité s'est de nouveau abattue sur notre époque pour une durée encore indéterminée. Frissonnez, pauvres pêcheurs.