LoOp
Drone Rock / Shoegaze / Post Punk

Fade Out
Chronique
On ne compte plus les merveilles qu’ont pu enfanter plus ou moins directement les années 80. Une fois levé le barrage géométrique et fluo de la musique populaire, cette période fut une véritable serre à idées et ce notamment en Grande Bretagne. LoOp fait partie de ces groupes magiques à l’influence diffuse mais indéniable qui auront marqué un pan entier de la musique.
LoOp, apparaîtra au cœur de cette décennie bouillonnante pour ne finalement rester que le temps qu’elle s’achève et laisser une grosse poignée de compositions à vous faire baver n’importe quel shoegazer. Fade Out, sorti en 1989, est un étrange voyage dans le temps : complètement ancré dans son époque (coincé entre Post Punk et Shoegaze pour simplifier), cet album est indissociable de l’effervescence qui agite la scène britannique (My Bloody Valentine, The Jesus&Mary Chain, Spacemen 3, Ride) et donne pourtant l’impression de ne mener nulle-part. Fade Out est de ces sorties qu’il est aisé de situer dans le temps mais qui pourtant vous perdent.
Fade Out est un album pauvre, plus encore que son prédécesseur. Pauvre dans ce qu’il y a de plus rêche, de plus simpliste. Le riffing est minimaliste, la batterie semble bloquée dans une boucle sans fin et le tout est noyé dans un fuzz omniprésent aussi abrasif que réconfortant. Un véritable cauchemar pour certains, un océan de bonheur pour quiconque est à la recherche de vagues noisy vaporeuses telles qu’ont pu le servir les voisins britanniques des londoniens à la même époque.
Il est bien difficile de ressortir un titre frappant de ces 8 pistes tant celles-ci s’abordent comme un tout dans lequel nous sommes plongés dès les premiers instants du très évocateur Black sun d’ouverture. Ici la variation rythmique au sein de chaque composition - voire au long de l’album - est rare pour ne pas dire quasi inexistante. Celle-ci se fait vite complètement hypnotique et obsédante, presque aliénante alors que les nappes de guitare dissonantes s’engouffrent dans l’espace laissé vacant par l’esprit obnubilé. Alors LoOp fait geindre ses guitares, se déploie dans des délires à la limite de l’incantatoire, le psychédélisme avance et le fuzz brouille les repères, emportant l’auditeur dans une douce léthargie entre sensualité et noirceur. Jouissif.
Fade Out est de ces sorties planantes mais hermétiques, électrisantes, chaleureuses et inquiétantes qui, une fois apprivoisées, livrent un flot continu de sensations brutes appelant à l’abandon. Fade Out est de ces disques qui vous achèveront lorsqu’au bout de la nuit ces quarante minutes viendront vous harceler inlassablement d’attaques noise hallucinées jusqu’à ce que vous cédiez pour finalement vous écrouler, vaincu par ces sonorités envahissantes douces et sournoises.
LoOp est de ces groupes éphémères et intemporels, héritiers de la scène Post Punk, qui, au tournant des années 80-90, prirent un plaisir sans fin à maltraiter leur rock quelques années durant. Les vibrations se font encore sentir de nos jours et LoOp, bien qu’éteint depuis 1991, irradie toujours l’univers Noise tel une source intarissable. Fade Out est de ces sorties qui discrètement mais surement continuent et continueront de s’affirmer comme des incontournables. Fade Out est une parenthèse géniale de la musique moderne aujourd’hui étrangement redevenue quasi confidentielle et qu’il ne tient finalement qu’à chacun de nous d’aller ré-ouvrir.