Lightning Bolt
Noise
Earthly Delights
Chronique
Groupe à l'identité forte, Lightning Bolt marque les esprits depuis plusieurs albums en épuisant encore et toujours la même recette. En répétant inlassablement ses riffs, en les martelant à force d'exploits techniques, le duo noise s'est fait une place de choix, au milieu de la fosse. Et d'aller toujours plus loin, de sorties en sorties, dans l'expérimentation plus ou moins pertinente selon l'état d'esprit dans lequel on se place. Si Earthly Delights ne change pas fondamentalement la donne, il se révèle être cependant bourré de concessions et plus accessible que ses prédécesseurs.
Le ton est donné dès l'enchaînement des 4 premiers morceaux. Lightning Bolt revient, toujours en forme, basse grasse hypnotique et batterie incontrôlable. "Sound Guardians" et "Nation of Boar" mitraillent les oreilles de mélodies (dé)construites au tractopelle, sans préhension pour l'auditeur en mal de repères. Les morceaux sont denses mais courts et efficaces. C'était peut-être, au final, la meilleure transition avec ses précédents travaux que pouvait offrir le groupe avant d'affirmer la personnalité de cette sortie. A savoir, une structure audible et presque facilement repérable; aussi bien pour l'album en lui-même qu'à l'intérieur des pistes. "Colossus" surprend par l'espèce d'ossature qui en émerge, couplet / refrain, alors que le riffage et les percussions se font toujours plus lourds. "The Sublime Freak" est, à son tour, ce moment de solitude qui nous voit danser frénétiquement face au miroir (et en rythme, ce qui- pour du Math-rock- n'est pas forcément évident), conclusion logique de l'explosion du Colosse.
Earthly Delights prend un tour a fortiori mélodique, rock 'n roll même, qu'on ne connaissait pas à Lightning Bolt, même si on le soupçonnait très fortement auparavant ("S.O.S"). Le même ton est à l'oeuvre dans la parodique "Funny Farm", piste country démantelée sous amphétamines. Un décalage frais avant d'attaquer la dernière partie du disque. Et si ces variations se font dans un cadre propre à la musique du groupe, elles renouvellent suffisamment l'intérêt pour prêter l'oreille de manière soutenue durant 50 minutes. Avec, en conclusion, les 12 minutes "épiques-notiques" de "Transmissionary" qui vient boucler la boucle: un même riff joué jusqu'à l'extrême avec de discrets ajouts progressifs. Il ne s'agit plus de balancer la sauce dès le début pour n'avoir plus qu'à la faire recracher par tous les trous par l'auditeur (même si...), Lightning Bolt prend le temps de la faire monter et d'imprégner ses morceaux d'épices afin d'en donner un nouveau goût. Qui n'en est que plus piquant.