Leaves' Eyes

Metal Symphonique / Gothic Metal

Allemagne

Sign Of The Dragonhead

2018
Type : Album (LP)
Labels : AFM Records
Tracklist
01. Sign Of The Dragonhead
02. Across The Sea
03. Like A Mountain
04. Jomsborg
05. Völva
06. Riders On The Wind
07. Fairer Than The Sun
08. Shadows In The Night
09. Rulers Of Wind And Waves
10. Fires In The North
11. Waves Of Euphoria

Chronique

par Zbrlah

Cette chronique pourrait s'attarder sur le changement de vocaliste historique que vient de connaitre Leaves' Eyes, arguer que le groupe tient son nom de Liv Kristine, que c'est pas très gentil de virer sa frontwoman, le tout en faisant des métaphores relous de style "changer la figure de proue du drakkar" ou "faire embarquer une nouvelle capitaine après avoir laissé l'ancienne à quai". D'autres l'ont déjà fait, aussi nous vous proposons de nous concentrer sur l'aspect musical de Sign Of The Dragonhead. Bah oui.

Bon, certes, le changement de line-up est suffisament majeur pour être évoqué, même d'un point de vue strictement technique. Mais franchement, on aura tôt fait de se rendre compte à quel point Elina Siirala est compatible avec l'oeuvre de Leaves' Eyes. Sa voix est un peu différente de celle de sa prédécesseure (le nouveau chant me fait penser aux voix dans Xandria), mais le timbre cristallin et précis, le registre soprano, les intentions pleines de vibratos, tout rappelle les précédents travaux du groupe. Peut-être que la prononciation est un chouillat meilleure chez la nouvelle chanteuse qu'elle ne l'était chez Liv Kristine (il faut rappeler qu'aucune des deux ne chante dans sa langue natale), et encore, ce constat est minime et ne vient qu'après plusieurs écoutes comparatives.
En revanche, les growls de l'autre vocaliste, Alexander Krull, posent problème. Si le côté "la Belle et la Bête" cher à la formation est toujours agréable et que les interventions des voix masculines sont bien placées au sein des titres, la performance en elle-même est plutôt faible. Trop grave et caverneux pour parfaitement coller au genre, le chant d'Alexander Krull est à côté de la plaque. Vous immagineriez le frontman d'Amon Amarth mugir sur les pistes les plus mièvres d'un Nightwish fatigué ? Nous non plus, et pourtant Leaves' Eyes le fait. Bon, pas trop souvent, les voix féminines assurant comme d'habitude 90% du boulot.

Maintenant qu'on a traité le chant, passons à la musique. Ne niez pas, on en a vu dans le fond qui ont tiqué en lisant la dernière tirade, à propos de mievrerie et d'épuisement. Allons-y sans faux-semblant : Leaves' Eyes déçoit. Les Allemands (et la Finlandaise) ont pourtant quelques bonnes idées, et c'est d'autant plus douloureux à écouter, car ces épisodiques moments forts sont dynamités par une volonté d'aller au plus simple, par un lissage musical assez triste. On dirait que chaque tentative de sortir du moule se fait remettre au pas dès le riff suivant. Tous les musiciens jouent aussi dans Atrocity, un groupe qui fourmille d'idées en tout genre, mais il semblerait qu'ils aient décidé de diluer ça dans Leaves' Eyes pour favoriser l'accessibilité aux fans de Sympho, en poussant l'exercice plus loin que nécessaire, aplanissant un peu trop leurs compositions.
L'ensemble sonne toujours aussi Symphonique, on notera d'ailleurs le gros travail d'ambiance des chœurs grandiloquents (chœurs qui sont laissés en place dans les pistes instrumentales bonus, bonne idée), comme dans le titre éponyme qui ouvre l'album, par exemple. En revanche, l'utilisation d'instruments traditionnels va un peu loin, d'autant plus lorsqu'ils sont couplés avec des mélodies qui sonnent Folk-Pagan elles aussi. Là où certains groupes y réussissent très bien, on sent que ce n'est pas le registre de Leaves' Eyes, qui s'enlise dans des titres qui sonnent presque "fête de village" : Jomsborg et Riders On The Wind, les deux pistes les plus marquées par ce syndrome (et Across The Sea dans une moindre mesure, avec ces refrains faciles et entêtants), ressemblent vraiment à du bal musette tradi avec quelques grosses guitares par-dessus. Alors oui, c'est mignon, c'est joyeux, on sent que ça va être efficace pour faire danser la gigue pendant les concerts, mais au fond, pour ne pas devenir une parodie d'eux-même, Leaves' Eyes devraient lâcher ce côté "donjon de Naheulbeuk" pour s'en tenir au Symphonique épique qu'ils savent bien faire.

On retient néanmoins quelques titres, peut-être un peu plus efficaces que les autres, peut-être un peu mieux ficelés : Völva, avec son riff d'intro Folk sans en faire trop et son énergie, faisant penser à du Eluveitie des bons jours ; les brûlots très nightwishèsques Sign Of The Dragonhead et Shadows In The Night ; l'instrumental Rulers Of Winds And Waves qui n'a pas grand chose à voir avec le reste de l'album mais dont l'ambiance celtique est réussie.

Sign Of The Dragonhead n'a donc rien d'exceptionnel, malheureusement. Si la nouvelle recrue passe le test haut la main, c'est malheureusement pour se retrouver impliquée dans un groupe fatigué qui peine à se renouveler, et dont on doute même de sa volonté à vouloir le faire.
De son côté, Liv Kristine ayant intégré Midnattsol (le groupe de Goth/Folk de sa petite soeur, qui doit sortir un nouvel album en 2018), c'est plutôt de ce côté qu'on regardera pour avoir une nouveauté digne d'intérêt dans ce style-là.

8

Les critiques des lecteurs

Moyenne 14
Avis 1
V.N.A. October 13, 2018 17:48
Bah moi je le trouve bien sympa, cet album. Le son de Leaves' Eyes a changé, c'est indéniable, mais franchement, ce n'est pas un mal. Pas aussi bon que Vinland Saga, d'accord, mais déjà plus intéressant que... à peu près tous les autres depuis, en fait. Bien que différent, Sign Of The Dragonhead s'inscrit dans une certaine mesure dans la lignée de Symphonies Of The Night et King Of Kings, dans le sens où les sonorités plus dures sont plus présentes, l'aspect Metal plus développé qu'aux débuts, et dans ce contexte la voix gutturale d'Alex Krull semble davantage à sa place que par le passé (prenez les couplets de l'excellente Waves Of Euphoria, pour un peu on se croirait chez Atrocity).

Je ne m'étendrai pas sur le changement de chanteuse en lui-même, la nouvelle voix s'adaptant parfaitement (si on veut vraiment comparer, le chant d'Elina Siirala a peut-être un poil moins de personnalité que celui de Liv Kristine), mais il y a un aspect de la composition qui en découle très probablement : la dimension plus Pop/Gothique propre à Liv Kristine est désormais délaissé, remplacé par une composante beaucoup plus Folk, allant effectivement sur certains titres jusqu'à un aspect bal musette (enfin, metal musette). Ça peut rebuter, moi ça a plutôt tendance à me mettre de bonne humeur, alors je ne vais pas m'en plaindre !

Bref, en ce qui me concerne (et hors de toute considération sur les circonstances du changement de frontwoman), Leaves' Eyes redresse la barre après quelques albums moins intéressants, je dis oui.
14 / 20