Landscapes
Hardcore Mélodique / Post-Hardcore

Life Gone Wrong
- Cemetery
- No Love
- D.R.E.A.M.
- Disdain
- Providence
- The Coming Of Age
- Forgiveness
- Epilogy
- Paradox
Chronique
Rapidement écoulé après une sortie initiale au cours de l'été 2012, si vous tenez aujourd'hui le disque du jour entre vos mains, c'est probablement grâce à l'initiative salutaire de Pure Noise Records qui, flairant le bon coup aura eu la bonne idée d'offrir une seconde vie à l'international à ce premier album de Landscapes. Etant donné la forme actuelle du "marché" de la musique tel qu'on nous le présente sans cesse, on se demande vraiment ce qui a bien pu pousser la structure US, d'avantage habituée aux sorties domestiques à parier sur ces gars là. La réponse est, à nouveau et comme souvent, la passion.
Si l'on évitera d'aller tabler sur celle des boss du label de Berkley simplement parce qu'il est surement moins présomptueux de juger de leur bon gout en parcourant leur catalogue (Gnarwolves, Rotting Out...) que de leurs motivations, le doute est difficilement permis en ce qui concerne Landscapes. Car, nonobstant leur statut de bloody englishmen et le légendaire flegme qui y est associé, les cinq gars du Somerset sortent tout droit d'une scène britannique actuellement en fusion (denstité/inventivité) et en connaissent un rayon sur la question. Lancer Life Gone Wrong sous la tête de lecture c'est déjà s'assurer un "Cemetary" et 1'53 d'être dans l’incapacité d'attaquer ses auteurs sur la question du sacro-saint commitment.
Denses, intenses, ces débuts coulent instantanément une chape de plomb sur l'album et définissent d'emblée ce que sera la suite: 8 morceaux d'hyper-émotion, vocalement intarissables et peu adeptes des cavalcades Punk Hardcore. Ce serait même plutôt l'inverse, Life Gone Wrong se déroulant essentiellement sur format court mais à un rythme globalement ralenti pour un disque classifié Hardcore Mélodique, étendard pourtant brandi bien haut et pleinement justifié à l'occasion par "Disdain" ou un "Epilogy" mais dramatiquement réducteur au point d'induire en erreur le fan d'Ignite et Propagandhi comme de The Carrier. Tous bien trop véloces, directs, voir trop bruts.
Non, Life Gone Wrong s'épanouit sur ces territoires où le Hardcore n'est jamais meilleur que lorsqu'il se libère de ses entraves formelles. Nous sommes pour le coup quelque part entre Witness (Modern Life Is War) et A Fragile Hope (Devil Sold His Soul), très exactement là où se croisent Hardcore sombre, réfléchi, rentré vers l'intérieur, presque intimiste et la puissance fragile d'un Post Hardcore post-2000, étrangement lumineux et désespéré. Que les plus allergiques se rassurent néanmoins, Landscapes tient en Shaun Milton un vocaliste autrement puissant et bien moins porté sur le chant clair vacillant que ses compatriotes et le quintet est par ailleurs toujours viscéralement attaché au courant Hardcore dont les gimmicks restent parfaitement identifiables tout au long de ce premier album en dépit d'escapades incessantes vers des terrains atmo et progressifs. C'est même là que se joue le gros coup de poker de ce qui reste seulement la seconde sortie du groupe: dans des guitares aériennes voire carrément Post-rockisantes ("D.R.E.A.M.", Paradox"), omniprésentes, presque envahissantes qui ne manquent malgré tout jamais d'apporter par leur densité un soutien de poids à un chanteur prolixe et de faire contrepoids à l'atmosphère pesante des textes ("True hell is life gone wrong", sur "Epilogy"). En résulte un disque double, euphorique et désespéré qui s'il se perd encore sur quelques morceaux trop évidemment tire-larme (le dispensable interlude "Forgiveness", "Providence" cliché Envy-en maladroit en chant trop clair) avant de retrouver la raison deux minutes plus tard ("Coming of Age" qui n'est pas sans évoquer Leatherface par instants), flirte régulièrement avec l'excellence.
Etant donné les ambitions affichées - et atteintes - dès son premier LP Landscapes sera évidemment attendu au tournant. En évoluant sur le fil ténu séparant la mise à nu sincère et le surjoué, les instant de grâce parfois atteints doivent en appeler d'autres sous peine de faire passer Landscapes du statut d'excellente surprise à celui de groupe victime d'une sortie de route un peu chanceuse. Le quintet qui est depuis parti avaler les kilomètres de bitume des deux cotés de l'Atlantique pour défendre haut et fort un album qui le mérite, serait bien inspiré de ne pas y laisser le feu qui l'anime en route tant l'envie de rembarquer avec les anglais taraude au sortir de Life Gone Wrong. Quoiqu'il en soit, rendez-vous est déjà pris à la prochaine étape. A Landscapes de fixer le cap.