Killer Be Killed, ou la nouvelle rolls royce fraîchement sortie des ateliers de montage Nuclear Bast, arrive enfin dans nos bacs, après un matraquage médiatique plutôt alléchant. Oui, il faut bien l'avouer le trailer a intrigué plus d'un chroniqueur et mis l'eau à la bouche, un projet potentiellement très intéressant. Parce qu'on parle bien de dream team, et pas du dernier album underground ultra chicos, de temps en temps il faut bien s'intéresser aux grosses sorties...
Et bien évidemment, qui dit super groupe dit médiatisation à outrance, donc méfiance parmi la junte journalistique à qui on ne la fait pas à l'envers. Un constat tout simple s'impose : bien qu'il existe des exceptions (heureusement), force est de constater que ce genre de projet bancal, on le dit trop souvent, est très rarement pertinent... et ce nouveau all-star band, même s'il a de très bons arguments, n'arrivera pas à convaincre complètement, une fois n'est pas coutume... et c'est vraiment dommage.
Avec un line-up qui ne manque pas de charisme et de potentiel (on le rappelle : Cavalera / Pucciato / Sanders et Elitch, respectivement de Soulfly / The Dillinger Escape Plan/ Mastodon et ex The Mars Volta), le fan de musique extrême est en droit de s'attendre à quelque chose de bougrement sauvage, une masse musicale sans concessions représentant plusieurs décennies de musiques extrêmes réunies sur plusieurs artistes emblématiques. On peut rêver non ?
Et ça commence plutôt mal. Premier titre, premier single, et première lourdeur artistique, le genre de compo qui vient bourdonner du refrain dégueulasse dans tes oreilles et qui pue le conformisme grassouillet. Le quatuor nous inflige avec ce Wings Of Feather And Wax un condensé de ce que le groupe fera de pire sur cet album : du Pucciato mélo dramatique mélangé à du Mastodon fatigué qu'un Cavalera plutôt en forme viendra sauver... Oui ! Je l'ai dit et j'en ai pas peur ! C'est tellement chiant par moments que lorsque ce bon vieux Max se réveille et nous balance son super riff une corde dont il a le secret, pour relancer ce premier titre, on aperçoit ce que pourrait incarner ce "one-shot" groupe : un exutoire, un monstre rythmique bourré de bonnes intentions. Sentiment confirmé par la plupart des autres compositions à venir : après un premier titre catastrophique qui fera passer le chemin de beaucoup d'entre vous, Face Down puis Melting Of My Marrow, si elles n'ont rien de vraiment originales, font le boulot. Punchy, catchy, intelligentes et bien construites, elles nous prouvent qu'il y a toujours quelque chose de bon dans ce genre de formation.
Dans l'ensemble, les titres s'enchaînent plutôt bien, et on retrouve avec plaisir trois styles distinctifs tout au long de l'album, à savoir du groove à la Mastodon, du "blastacalavera" et un semblant de déjanté typique du Dillinger, et ce serait foutrement malhonnête de dire que c'est sans intérêt ou mal fait. Outre le premier titre vraiment mauvais, la complémentarité des quatre musiciens fait mouche, les styles se mêlent et se démêlent sans accrocs majeurs, pour un résultat plutôt original, pas dans la construction ni dans les sonorités, mais plus dans la superposition des différentes influences artistiques, sorte de triple hommage à des carrières musicales plus qu'abondantes.
C'est quoi le problème me direz vous ?
Et bien le problème c'est qu'une bonne partie des titres manque cruellement d'inspiration, que c'est bien souvent fade (une petite impression de va vite dans la prod et l'écriture) et que l'on tourne rapidement en rond une fois passé la (bonne) surprise du mélange d'influences. On est loin des attentes légitimes que suscite la réunion de ces trois stars de la scène Metal, pourtant on respectera leur direction artistique, qui, même si ça n'est pas évident au premier abord, fait passer mélodies et song writing paresseux au premier plan, reléguant bien souvent la section rythmique à une anecdote. Dommage...
Pour résumer, ce projet manque d'ambition, de réalisme, de substance et de saveur. Mais pas de potentiel. Techniquement, c'est assez convaincant pour peu qu'on accroche au "easy listening" qui semble flotter tout au long de l'album. De fait, le même projet en plus travaillé, moins plat avec un vrai fil rouge et des envies de "rentre dedans" plus prononcées, et nous aurions eu là un album de grande qualité. Si comme moi vous attendiez quelque chose d'ultra burné, vous serez déçu, mais si comme moi, également, vous aimez ce que fait The Dillinger Escape Plan sur le dernier album, que vous trouvez que The Hunter est un des meilleurs albums de Mastodon et que vous avez laissé Cavalera au placard avec les débuts de Soulfly alors vous aimerez un minimum.
A tester au moins une fois !
A écouter : parce que c'est la meilleure chose que Cavalera ait faite depuis longtemps...