Très bonne chronique! Un album qui m'a explosé à la tronche… Mentions spéciales pour les trois derniers titres et, comme le dit Tang, pour ce saxo "Zuesque".
Ken Mode
Noise / Hardcore / Metal
Loved
01. Doesn't Feel Pain Like He Should
02. The Illusion Of Dignity
03. Feathers&Lips
04. Learning To Be Too Cold
05. Not Soulmates
06. Very Small Men
07. This Is A Love Test
08. Fractures In Adults
09. No Gentle Art
Chronique
Équipé d’un bassiste stabilisé depuis 2015, le grinçant trio a ouvert ses chakras avec le Success que l’on connaît, c’est à dire incomplet et hasardeux. Mais ce n’est pas un tâtonnement passager qui freinera les désirs d’exploration inassouvies des frangins Matthewson. Loved vient en effet graver leurs intentions dans la rouille, avec amour bien sûr, et propose rien de moins que ce qui se fait de plus cool actuellement en terme de noise hardcore.
Il est une autre constante chez les canadiens, ce sont les visuels, qui tapent juste et sobrement à chaque coup porté en longue durée, illustrant toujours idéalement le contenu. Ici l’euphorie malsaine et dangereusement crispée (mise en image par Randy Ortiz) s’accorde à merveille avec la tension induite au sein des compositions. Tension qui parfois s’autorisera quelques régressions « à la Unsane » rappelant au bon souvenir de Mennonite, sans non plus tomber dans la facilité ou la redondance, ce qui serait étonnant de la part de KEN mode. Ainsi donc le gras renouvelé est ce qui nous saute en premier lieu à la gorge – les intéressés nous avaient d’ailleurs prévenus – à commencer par l’intransigeant et cradingue Doesn’t Feel Pain Like He Should. On découvre ensuite un nouvel élément cuivré dès The Illusion of Dignity, soit un saxophone manié habilement par une certaine Kathryn Kerr, qui donnera des airs de Zu ou de Zorn à chacune de ses (ponctuelles) interventions, l’aspect concassé des choses aidant, en plus d’aérer sensiblement des morceaux rongés par la dissonance saturée.
Pour le reste on identifie à l’aise la patte KEN mode, cette frappe pleine de souffle, expressive, tentaculaire mais précise, cette voix plus aboyeuse et écorchée que jamais, exposant des cordes vocales aguerries et assouplies, ou encore cette basse multiple et au cœur du sujet, extirpant les dernières gouttes d’une nappe phréatique en souffrance. Des titres du calibre de Feathers&Lips, Not Soulmates ou le sinueux et infecté Fractures In Adults nous tapent bien dans le fond à coups de six cordes plombante, pétée de larsens, ou de contorsions rythmiques. D’autres installent une angoisse de mort, latente, diffuse, qui finira fatalement par nous revenir dans la tronche, impulsée par ce foutu saxo notamment (le conflictuel et faussement chaleureux This Is A Love Test), dont le meilleur exemple serait le magistral No Gentle Art, mâchouillant nerveusement nos derniers points de santé mentale le long de ses huit minutes et des brouettes résiduelles. Enfin, cette débauche de violence déglinguée n’aurait pas un tel impact sans la production fabuleuse d’Andrew Schneider, où les détails surgissent au moindre virage, nous crachent au visage, peu importe l’instrument concerné.
Les facultés du groupe à empiler les gifles sont retrouvées, voire intensifiées avec le très ramassé Loved, s’octroyant au passage les services d’un saxophone qui personnifie encore davantage la musique du trio de Winnipeg. On en espérait pas tant après un Success mitigé, mais le fait est de constater que KEN mode reste maître de sa discipline, toujours apte à exprimer cinquante nuances de bruit délectable.
A écouter : 1
Les critiques des lecteurs
Très bonne chronique! Un album qui m'a explosé à la tronche… Mentions spéciales pour les trois derniers titres et, comme le dit Tang, pour ce saxo "Zuesque".
Eh bim, la baffe qu'il faut quand il faut. Merci bonsoir!