Kehlvin
Postcore

Holy Cancer
Chronique
Malgré des influences tenaces, Il aura suffit d'un album à Kehlvin pour se mettre au niveau des meilleurs éclats de Cult Of Luna et Isis. Toutefois, la comparaison risque fort de s'arrêter là car les suisses démontrent avec Holy Cancer, EP de 3 morceaux (découpés en 6 pistes), qu'ils ont définitivement les bras et les jambes assez lestes et solides pour aller chasser le tympan en autonomie parfaite.
La gueule béante, les crocs étincelants et acérés, la meute helvête a flairé le bon sentier et piège sa proie par une approche labyrinthique et une force de frappe décuplée. En écumant alternativement les surfaces pacifiques et rugueuses, Kehlvin parvient à maintenir son cap relativement imprévisible. Ce qui dans le style, couplé à l'intensité sonore, est la condition obligatoire pour espérer sortir la tête de l'eau sans se faire instantanément scalper. Leçon retenue. Intraitable sur les passages tempétueux, Kehlvin agresse et lacère à s'en faire péter la jugulaire avec un post metal aux guitares extravagantes et à la rythmiques enlevée ("God As A Mere Intentional Object"). Le chant dantesque, vomi sur du papier de verre, jouxte voire surpasse la rugosité typique des excellents Rosetta. Kehlvin se veut encore plus sombre que sur The Mountain Daylight Time, et même si quelques mélodies cristallines pointent au sein de l'orage ("Athesit Hope"), ces dernières débouchent la plupart du temps sur un trou noir où l'espoir se dénature en terreur oppressante et les visages calmes se transfigurent en masques de colère. Une impression qu’on ne retrouve pas forcement aussi vivement sur le DVD Live qui accompagne Holy Cancer. Kehlvin joue droit et propre. Kehlvin joue carré sans déborder du cadre. Trop sage.
Kehlvin passe donc l'épreuve du feu et rentre dans l'âge adulte. On regrettera seulement le fait que le format ne permette pas aux suisses de modeler un véritable monde. Les fondations sont là, reste à bâtir l’édifice.