A l'improbable croisée des chemins de Tool et... Muse, Karnivool n'en finit plus de grandir depuis quelques années. Oui, Tool et Muse. D'une parce que forcément, en accroche ça en jette - ou n'en jette pas - puis parce que ce n'est pas si faux que ça. Et surtout car musicalement, Karnivool ça marche à bloc. Donc on en parle. CQFD.
Pourtant, à la base, ce genre de boutures a tout de l'échec en devenir pour bien des raisons. Petite liste non exhaustive: On ne compte plus les formations allant piquer chez l'un ou chez l'autre avec des fortunes bien diverses. Coller les deux ensemble, même si ces groupes partage(aie)nt pour partie une base d'amateurs commune, n'a rien de si logique que cela d'autant plus depuis que Muse essaie en vain de faire du Queen sans la substance (cet avis n'engage que moi). Fort heureusement, si Karnivool donne à son Metal fortement teinté de Tooleries un aspect Rock mélodique très contemporain indéniable que l'on pourrait rapprocher de celui des british, c'est bien plus de l'ancienne période qu'il est question. Celle du Muse puissant, évolutif sans être tarabiscoté, et un brin torturé - les miaulements de Bellamy en moins.
Mais trève de comparaisons hasardeuses: Sound Awake, second méfait de ces natifs d'Australie Occidentale est un véritable pas en avant. Plus Rock, moins juvénile, plus maîtrisé et toujours plus efficace, il a tout du disque palier. Si leur fanbase n'est plus à faire depuis un petit moment, il y a fort à parier que celle-ci a connu une expansion non négligeable ces derniers mois.
Sans renier ni influences, ni origines (Themata) Karnivool développe une heure et quart durant un Rock métallique hybride et débridé, peuplé de mille mélodies, progressif et accessible malgré des titres pouvant passer la barre des dix minutes. Véritable fil rouge, la voix de Ian Kenny n'en finit plus de rappeler MJK (Tool) alors que le groupe trace pourtant sa propre route quelque part entre Bokor et The Mayan Factor. Plus pop que les suédois, plus mature et détaché de ses influences de la fin des 90's que les américains. Mais pas moins riche, loin de là. Un titre comme New day, par exemple, offre en quelques huit minutes une vision panoramique de la palette d'émotions que sont capables de délivrer les gars de Perth. Sans jamais forcer.
Techniquement impeccable, Sound Awake se permet de repenser le rock énervé à sa façon, l'émotion en étendard et la musicalité à son service. Il y a de l'énergique Set fire to the hive à la très calme et mélancolique Umbra à la fois tout un monde et une unité déconcertante. Karnivool vogue librement, flirte avec un peu tout ce qui lui chante, du Prog moderne à la pop (All I know qui va faire pleurer dans les chaumières) en passant par le Metal mélodique, le Rock ou de lointaines influences fusion/néo (cette basse vrombissante et ce groove sur Set fire to the hive, par exemple). Frais, toujours surprenant, Sound Awake est un album que l'on laisse nous guider, d'autant plus qu'il se suit et s'assimile sans peine malgré sa grande richesse.
En résumé, l'Australie et sa scène alternative singulière ont encore frappé. Entre Rock intelligemment balisé de références aisément identifiables et maintient d'une distance et d'une liberté stylistique typique des artistes de l'île-continent, Karnivool confirme sans s'en réclamer l'intérêt grandissant d'une scène que l'on aurait tort d'oublier trop vite vu la régularité avec laquelle elle nous envoie les signes d'un bouillonnement artistique incessant depuis plusieurs années. Et avec Sound Awake, il va sans dire que vous disposez d'une entrée de choix vers cet univers. Vous voilà prévenus, le reste n'est plus de notre ressort.
A écouter : Pour tout amateur de metal m�lodique riche en rebondissements