Depuis des années, Kamelot perdait de son intérêt. Ghost Opera, en demi-teinte, beaucoup plus mou et bien moins épique que son prédécesseur The Black Halo, puis Poetry For The Poisoned qui poussait encore plus loin la perte de puissance, n’auront pas enthousiasmé les fans. Mais avec Haven, le Power Metal des Américains semble regagner une partie de son panache d'antan.
Et pourtant, Kamelot échappe de peu à ses propres pièges. Terminée, l'époque des introductions recherchées et pleines d'une tension qui explosait sur un titre mélodique et accrocheur, comme Center Of The Universe ou Forever. Non, Haven commence tout en fadeur par une Fallen Star à l'intro molle et complètement cliché. Et pourtant... Passé la douloureuse première minute, la piste se révèle finalement assez intéressante, dans une veine proche des tubes que Kamelot a su produire il y a une dizaine d'années.
L'écoute devient beaucoup plus active et intéressée au fil des pistes, on se rend compte que le groupe cherche à la fois à rester fidèle à leur genre tout en cherchant à se renouveler. Parfois, c'est un succès (la progression inattendue des accords dans Insomnia la sauve de la facilité) ; et d’autres fois, beaucoup moins (le refrain de Citizen Zero est un auto-plagiat de celui de Sacrimony).
Comme dans chacun des derniers efforts de la bande à Thomas Youngblood, on notera quelques invitées de marque, qui ici sont un atout et aident le groupe à contourner certains écueils. Même si Under Grey Skies est plutôt inutile le temps qu'elle se lance, le dernier quart de la balade est assez poignant, et les contrechants de Charlotte Wessels (Delain) sont bien pensés. Quant à Alyssa White-Gluz (Arch Enemy), son intervention dynamise Liar Liar (Wasteland Monarchy) et Revolution tant par ses voix claires que par ses growls.
Après quelques compositions souvent faciles, parfois efficaces, zigzaguant maladroitement entre les stéréotypes du genre (et dieu sait qu'il y en a, dans le Power Metal), la fin de l'album est plus consistante, les prises de risque plus réussies. Revolution, Beautiful Apocalypse, et Liar Liar (Wasteland Monarchy) donnent dans le massif, et on retrouve avec plaisir le Kamelot de The Black Halo, le Kamelot à 170 bpm. End Of Innocence exploite plutôt le côté épique du groupe, et fait d'ailleurs penser à l'autre projet du chanteur Tommy Karevik, Seventh Wonder, période Mercy Falls. Des titres catchy et intéressants, qui trouvent en Haven une conclusion orchestrale sombre et dynamique, très romantique, dans le sens "musique classique" du terme.
Kamelot est donc capable de susciter l'intérêt à nouveau. Le résultat est encore entre deux eaux, mais l'intention est complètement visible : ces gars-là veulent en faire plus, et s'en donnent les moyens. Et ça ne peut qu'être respecté.
A écouter : Liar Liar (Wasteland Monarchy), Revolution