Onelinedrawing n’est plus, bienvenu à Jonah Matranga. Après s’être caché derrière ce pseudonyme durant de nombreuses années, le natif de Brooklin revient sobrement sous son propre nom. L’album live There’s A Lot In Here ayant ouvert le bal, l’arrivée de ce premier album suscite naturellement quelques interrogations dont l’inévitable : doit-on voir au travers de ce disque le troisième opus de Onelinedrawing, ou un nouveau départ ?
On avait laissé avec Visitor et The Volunteers un Jonah partageant à qui voulait l’entendre sa joie et son amour avec une sensibilité profonde, à fleur de peau. Avec And, cette approche n’a pas changé - et ne changera certainement jamais – ainsi ses thèmes favoris servent une nouvelle fois de toile de fond : une entame sur fond de départ "So Long", on s’aime " I Want You to Be my Witness", on se pardonne "Every Mistake", on regrette "You Always Said You Hated San Fransisco", on se souvient "Lost and Found", mais plus que tout on sait où on est : dans une quarantaine de minute de vie à la Jonah. Mais alors d’où vient cette sensation d’une implacable rupture ?
Tout simplement du fait que pour la première fois Jonah a fait le choix de profiter d’une orchestration complète et d’une grande richesse. Dans une approche qui de loin pourrait s’apparenter à Gratitude dans une version folk rappelant The New Amsterdams ou Cassino, d’autres musiciens participent à tous les morceaux et donnent enfin le relief qui manquait indéniablement aux albums précédents.
On retrouve donc les amis de Rival Schools : Ian Love principalement à la basse et aux percussions, Sam Siegler à la batterie, ainsi que Matthew Dundas au piano, et Mike Incze (The End of the World) au pedal steel.
R2D2 (la boite à rythmes aux formes du célèbre robot de Star Wars) n’est toutefois pas à ranger au placard, et s’avèrera bien utile en live pour certains titres au rythme basique comme "Waving or Drowning" ou "I want You To Be My Witness". Mais à l’instar des autres titres de l’album la production d’une efficacité redoutable met en exergue ce qu’il faut – principalement la mélodie au travers de la voix et de l’omniprésent piano – pour conférer à chaque titre sobriété et propreté.
Le coté DIY apparaît donc quasiment délaissé (bien que justement la production soit signée Ian Love et Jonah Matranga) ce qui déplaira peut-être aux puristes, mais d’autres atouts finiront de convaincre les plus sceptiques.
Que ce soit une intro qu’envierait Travis sur "I Can’t Read Yr Mind", les incroyables aiguës de la voix sur "You Always Said You Hated San Fransisco", la technique désormais présente sans être superflue - en témoigne ces somptueuses lignes de basse sur "Every Mistake" - et plus généralement ce sens inné pour une mélodie entraînante et jamais emphatique, tous les ingrédients ont été soigneusement choisis afin de faire de ce disque un succès. Un titre apparaît toutefois en deçà ; malgré de somptueux vers "Fathers & Daughters" et son tempo très (trop ?) lent, apparaît un brun trop dépouillé face aux bijoux qui jalonnent les neuf autres pistes.
Onelinedrawing était un groupe qui se jouait en solo, et maintenant que Jonah chante sous son propre nom, le voilà débarquer avec une formation complète. Ce virage inattendu, n’en demeure pas moins une grande réussite. Cependant lorsque l’on sait que le bonhomme prévoit déjà de réenregistrer ces dix titres en solo avec sa guitare, on est en droit de se demander s’il ne s’agit pas ici d’un oneshot. Raison de plus pour en profiter pleinement !!
Ecoutez "Not About a Girl or a place" et "So Long" sur la page MySpace de Jonah.
A écouter : "So Long", "Every Mistake", "Not About a Girl or a Place"... et tout le reste