Isaïah

Screamo

Belgique

Connection Part II (6 way split)

2010
Type : Album (LP)

Chronique

par Turtle

La coutume punk aime à organiser la rencontre d’artistes autour d’un split à partager. C’est une manière de réhabiliter ce "don", cher à Raoul Vaneigem que la société de consommation a rendu désuet. Le titre parle de connections. Le fond évoque le don de soi. Et le label Moment of Collapse, qui est à l’initiative de ce projet, le résume en une phrase : "We support the idea of DIY".

Le tour de table est plus que prestigieux. Suis La lune, The Saddest Landscape, Captain, your ship is sinking, Kias Fansuri, Isaïah, Adorno. A l’annonce des forces en présence, j’avais cru au canular. Mais le LP vint au jour. Suis La Lune y orne le premier rang : Élève toujours soigné et soigneux, la mèche blonde bien peignée, brillant premier de la classe. Appréciation : "au-dessus du lot". Le son des guitares est caractéristique, reconnaissable entre mille, tout comme ces teintes post-rock dissimilées ici et là ("Postlude to 5 years of hurting") ou cette émotion mise à nu, écarlate et éclatée. Ces deux titres s’inscrivent dans le contexte du ep Heir et du Us Tour 10’ et démontrent que Suis La Lune n’a rien perdu de sa superbe. Mais il ne s’agirait pas de s’appesantir car The Saddest Landscape est le second à passer l’oral. Une nouvelle fois, le groupe de la East Coast est intenable. Probablement enregistrées en même temps que les tracks de You will not survive, les deux compositions éclaboussent le split de leur classe. "The temptation that is you" se hisse même au panthéon de la formation américaine. Tout y est : l’intro en arpège à chialer, le chant saccadé et étouffé, la montée progressive, les guitares incisives, le pont mélancolique et la fin à bout de souffle. Still so epic. Captain, Your ship is sinking se charge de clore la Face A avec brio, mêlant l’agressivité d’un chant black-emo-violence avec un filament emo-post.

Pour la Face B, Kias Fansuri fait les entremetteurs. Ca fait un petit temps que je voulais parler de ce groupe qui vient de Malaisie. Son album Dua tahun pertama était une petite merveille. Les 4 morceaux ici présents apportent la confirmation. Dans un style court, épileptique et ultra généreux, Kias Fansuri évoque autant la scène asiatique que Raein, Eucalypt ou Black Channels. C’est furieux, maladif, écorché. Bref, un des meilleurs groupes actuels du genre. Word. Et Isaïah dans tout ça ? Ils se fendent de leurs deux brûlots les plus emo de leur discographie. "Qu’ils crèvent enfin" débute ainsi bruyamment, taillée colosse, avec les disto’ à fond les ballons, les cris qui fissurent les murs et les paumes recouvertes de sueur. Le refrain donne lieu aux chœurs chers aux belges. "Et nous laissent décider" insiste sur cet aspect plus introspectif, plus vaines saillantes et moins hardcore tracto-pêle. Deux fraicheurs donc, très appréciable par leur tonalité inattendu et leur structure atypique. Adorno ferme le bal avec son audacieux emo-punk –et ici, pop - nasillard, qui dénote franchement avec la houle de  violence prise sur le paletot pendant 11 vagues. Adorno, c’est un peu la fraiche écume qui enlace les chevilles aux premières lueurs du jour, quand, adolescent on décide "d’aller voir la mer" et qu’on roule toute la nuit pour gagner ses rivages.
 
Moment of Collapse Record avait déjà frappé fort avec son Connection Part I (on trouvait au menu : Arse Moreira, Eucalypt, Amalthea, Orbit Cinta Benjamin, Dodewaard et Hiro). Le Part II est encore meilleur. Alors chapeau bas.

16

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