On était prévenu. Sans même avoir jeté une oreille dessus, juste en détaillant le livret, on savait pertinemment où comptait nous emmener Inhatred avec ce premier album. En effet, s'assurer les services de Francis Caste (Es La Guerilla, Every Reason To, Slavery), c'est au moins la certitude d'avoir un son de feu et rentre-dedans. Les parisiens n'auraient pu se contenter que de celà mais c'était mal les connaître.
Déjà Olena, paru deux ans plus tôt, avait posé les bases d'un deathcore/mathcore ambitieux laissant présager le meilleur quant à la suite. 10 Seconds Before Sunrise reprend les choses là où elles s'étaient provisoirement arrêtées. On y retrouve un Inhatred toujours inspiré, à l'attaque aussi incisive, marchant encore sur les traces de Dillinger Escape Plan et Converge, mais dont le regard s'est quelque peu élargi avec le temps, signe d'une indubitable maturité. Aussi, difficile de trouver une étiquette satisfaisante à l'écoute de cet album tant les parisiens semblent faire feu de tout bois. Et c'est tant mieux.
Les premiers morceaux Against My Temple, We Are, malgré leur côté classique, se chargent de donner le ton d'un album que l'on pressent très rapidement comme volcanique. Et l'appellation est loin d'être usurpée. Ainsi, Inhatred prend un malin plaisir à nous concasser par ses rythmiques soutenues, privilégiant les mid tempos furieux tout en ne dédaignant pas quelques lacérations grind, jouant les équilibristes entre structures basiques fleurant parfois le hardcore brutal de The Hope Conspiracy et phases plus élaborées illustrés de riffs épileptiques aux faux airs de Botch (Down, A Little Story, The Great Whore).
Sans nous laisser souffler une minute, les parisiens délivrent des saillies comme d'autres enfilent les perles, et parviennent même à conserver une attitude hargneuse tout en arrondissant les angles comme c'est le cas sur Smooky Mountain ou We Trust (c'est un peu moins vrai sur le mielleux Cristal et la partie II de Mama They Bring Me Back Home In A Box , un peu poussive), aux accords évoquant quelque peu Envy et les ambiances astronautiques du Hopesfall de The Satellite Years. On manque même de friser l'apoplexie à l'écoute du très sludgy Free By Nature, morceau fleuve de dix minutes où le groupe reçoit le renfort de Syd Ahmed (Es La Guerilla) pour un épilogue d'anthologie, mais surtout du fabuleux Mama They Bring Me Back Home In A Box I et son final stoner/rock n' roll, simple mais d'une efficacité à faire pâlir de jalousie Matt Pike (High On Fire).
Bref, 10 Seconds Before Sunrise est une oeuvre de grande classe, ce qui commence à être une habitude avec les rejetons de Several Bleed Records. Entre finesse sonique et démonstration de force, Inhatred a su trouver un juste milieu qui lui permet d'envisager l'avenir sous les meilleurs auspices. Assurément un des albums de l'année tous styles confondus.
A écouter : Mama They Bring Me Back Home in a Box I, Down, A Little Story