Formation fraîchement composée d’une belle brochette d’expérience, Human Impact permet de retrouver Chris Spencer (Unsane), Jim Coleman (Cop Shoot Cop), Phil Puleo (Cop Shoot Cop, Swans) et Chris Provdica (Swans, Xiu Xiu) exprimant là une forme de Noise Rock croustillant et bigarré, mangé par quelques éléments électroniques ou industriels.
Ça crépite, ça grince, ça tord les récepteurs, encourage à la saine démence, par l’intermédiaire d’un groove incendiaire enrobé d’ambiances filmiques aux mécaniques menaçantes. En effet le monde est prisonnier de son sordide héritage post-industriel, la dystopie est en marche, la surveillance est globalisée, les libertés réduites à des simulacres de réalité, et Human Impact en est la bande sonore. La guitare de Spencer tranche comme jamais dans le vif d’un sujet moribond et ses cordes vocales pressurisent nos consciences avec pertinence, disposées sur les nappes électroniques d’un Coleman imprégné de la déliquescence humaine. Là-dessus viennent se percuter les frappes sèches et foutrement précises d’un Puleo en phase d’hybridation, avec l’appui contorsionné des cordes épaisses et prédatrices de Provdica.
Le quartet New-Yorkais nous plonge direct dans le bain d’acide via un November aux forts relents d’Unsane, percé d’une ligne de basse obsessionnelle et de glitchs synthétiques environnants qui s’attaquent aux synapses pour ne plus les lâcher jusqu’au bout du bout de l’objet. Le cyberpunk Protester martèle et scande ses revendications en jouant des rythmiques élastiques, qui font joliment la transition avec un Portrait hanté par les fantômes d’un combat violent. Spencer expérimente et surprend aussi dans ses intentions vocales, poussant parfois son organe dans ses retranchements, comme lorsqu’il évoque la Cause et les Consequences cuivrées d’un chaos systémique prévisible. Récit d’un torturé constat anticipé jadis par des esprits science-fictionnels qui se sont souvenus du futur. Futur conjugué désormais au présent. La justesse et la lucidité du propos sont imparables, s’accordant beaucoup trop naturellement avec la musique. En atteste la conclusion This Dead Sea et ses piqûres de rappel percussives, en apparence mécanisées mais intensément vivantes, laissant émerger une humanité qui se débat de toutes ses forces pour se libérer des chaînes d’un « progrès » factice.
On pouvait difficilement être déçu d’une association de brigands qui ont assez largement contribué à l’élaboration d’un genre, le Rock bruitiste. Plus que ça, on est fasciné par l’équilibre et la puissance, aussi bien narrative que de la production (du vétéran Martin Bisi bien sûr), de la bête Human Impact. Un album essentiel, vital même, auquel on peut ajouter le titre Contact sorti à part et peu de temps après.
A écouter : pendant l'effondrement.