On a la classe ou on ne l’a pas. Hot Snakes l’a et a décidé de le prouver une nouvelle fois, au cas où certains en doutent encore… Se permettre de donner une « suite » à l’emblématique Drive Like Jehu avec une discographie brève, mais intense et sans aucune fausse note, démontrait déjà le génie de Rick Froberg et John Reis. Revenir 14 ans plus tard avec un disque tel que Jericho Sirens et mettre à l’amende la plupart des aspirants punkcoreux en moins de temps qu’il ne faut à vos bières pour se rafraîchir au frigo, le tout sans s’auto-parodier un seul instant, relève de l’exploit. Au programme : 30 minutes d’énergie, de hargne et d’émotion en 10 titres redoutables, gagnant en efficacité et touchant au but au fil des écoutes. Car les riffs taillés par Froberg et Reis, s’ils peuvent paraître répétitifs au premier abord, jouent justement la carte de l’insistance pour livrer leur essence et servir au mieux le projet du groupe.
Pas de révolution en vue, Jericho Sirens aurait pu être enregistré un an ou deux après Audit In Progress et aurait certainement sonné de la même façon. C’est dans cette continuité que le groupe semble trouver la confiance nécessaire pour tout mettre sur la table. Dès I Need A Doctor, la messe est dite. Guitares tranchantes, chant habité, production râpeuse : la machine Hot Snakes repart à plein régime, comme si de rien n’était. Aucun temps mort ne viendra ralentir la marche en avant des Californiens sur les neuf morceaux suivants. Cathartique (Why Don’t It Sink In ?), jubilatoire (Death Camp Fantasy) et libéré (Psychoactive), Jericho Sirens se paie le luxe de nous garder sous tension de la première à la dernière seconde, une performance remarquable et pas si courante illustrée notamment par le dérangeant Candid Cameras, en équilibre fragile entre optimisme et désespoir. Mais Hot Snakes sait également nous faire trépigner à l’approche de l’été, du soleil et des vagues avec l’enjoué Six Wave Hold-Down ou nous faire reprendre en choeur le refrain du morceau-titre sur un mid-tempo auquel il est difficile de résister.
Les guitares remplissent l’espace et donnent sa densité sonore à l’album. La rythmique ne se pose strictement aucune question. Le chant de Rick Froberg semble n’avoir pas du tout subi le passage des années. Un production au cordeau et tirant vers la Noise finit de donner à Jericho Sirens de la précision, un goût de ferraille et une sacrée personnalité. Conclu par le bondissant Death Of A Sportsman, le quatrième album du groupe vient se ranger directement en bonne place sur l’étagère de tout fan de Punk/Hardcore prêt à reconnaître que le temps est décidément bien relatif lorsqu’il s’agit d’accueillir à nouveau un ami longtemps perdu de vue.