Certains s'accordent à dire qu'une œuvre musicale se doit d'être construite comme un tout, se suffisant à elle-même, dont les éléments qui la composent ne peuvent être dissociés les uns des autres au risque d'en réduire son intérêt. Une vision artistique que partagent les Danois de Hexis qui, faisant suite aux nombreux splits et EP sortis depuis leurs débuts, dévoilent en 2014 leur premier album, Abalam. Sombre et occulte, à l'image de l'entité démoniaque au visage de femme dont il tire son nom.
Trouvant sa force dans la noirceur du Black Metal des terres nordiques mêlée à la brutalité du Punk Hardcore Américain, Hexis produit un son viscéral et épileptique, se rapprochant ainsi de Celeste ou Plebeian Grandstand. Poussant le monolithisme à l’extrême dans cette envie de créer une œuvre entière et unique, le résultat s'en retrouve peu nuancé mais fascinant.
Dès lors qu'il est lancé, Abalam se jette à votre gorge, s’agrippe et ne relâchera son étreinte qu'au terme de ce voyage cauchemardesque. Chaque morceau s’enchaîne sans interruption dans une même direction, s'imbriquant dans un couloir étroit où la lumière ne parvient pas à s'immiscer. Son parcours se veut dérangeant, chaotique et malsain, on en ressort physiquement et psychologiquement affaibli car l'effort demandé à l'écoute est colossal. Pourtant l'envie d'y retourner afin d'assimiler chaque variation qui se cache derrière ce martellement incessant est irrépressible.
Les plus téméraires finiront sans doute à force de répétition et de lecture des paroles à passer le voile Latin des titres pour y discerner le fil directeur de l’album tissé par le quintet Danois :
"Lorsque des visages démoniaques (Faciem) apparaissent, les ténèbres (Tenebris) prennent possession des corps sans vie (Exanimis) des déchets humains (Desolatum), devenant ainsi des disciples (Sequax) se prosternant (Supplex) face à Abalam. S'immolant (Immolabant) jusqu'à leur épuisement (Exhausit) pour invoquer la peur (Timor), le prince déploie ses deux cents légions d'anges rebelles (Exterminati) et de puissances infernales (Neglexerunt). L'Enfer s'abat alors (Inferis)."
Rares sont les groupes qui osent déployer un tel extrémisme dès leurs débuts sans craindre de faire s’enfuir les premiers innocents qui y prêteraient leurs oreilles. Une œuvre insensée à réserver aux initiés, ou aux adeptes de démonologie.
"These are not my words, these are not your words."
L'album se télécharge gratuitement sur Bandcamp.
A écouter : D'une traite