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Biographie

Fugazi

Ian MacKaye - chant, guitare
Guy Picciotto - chant, guitare
Brendan Canty - batterie
Joe Lally - basse

Groupe culte (post-punk / emo / rock) de Washington DC, Fugazi est né en 1987 autour de Ian MacKaye (Teen Idles, Minor Threat, Skewbald, Egg Hunt & Embrace), Brendan Canty et Guy Picciotto (Rites of Spring, One Last Wish, Happy-Go-Licky). Depuis sa création, le groupe a accouché de 7 albums et tourne quasiment la moitié de l'année un peu partout autour du globe (USA, Australie, Europe, Japon ...). Fugazi est le groupe indépendant par excellence et donnera naissance au label (tout aussi indépendant) Dischord, qui rassemble en grande majorité des groupes post-punk de Washington.
En plus de leurs disques, le groupe a réalisé un documentaire vidéo autobiographique, "Instrument", en collaboration avec le réalisateur indépendant Jem Cohen.
La dernière production de Fugazi, The argument,  date de 2001 et depuis lors, le groupe est entrée dans une phase d'hibernation, laissant les nombreux fans un peu orphelins. Pour combler les attentes, de multiples bootlegs sont actuellement en libre téléchargement ici : http://www.fugaziliveseries.com.

15 / 20
2 commentaires (16.5/20).
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The Argument ( 2001 )

Après End Hits, album dont le titre donna de grosses sueurs froides à la masse de fans du groupe de Washington DC (je parle en connaissance de cause), The Argument est un peu arrivé comme le messie, prophétisant la résurrection de Fugazi après une longue hibernation. Ian MacKaye et sa bande sont véritablement passés du stade de machine à tourner inépuisable et inébranlable à celui de marmotte ne réalisant que quelques brèves et discrètes apparitions. De plus, le fameux End Hits en question avaient de quoi décevoir, et pas forcement les plus exigeants d'entre nous. En comparaison avec leurs précédentes oeuvres discographiques, il faut bien avouer que cet album n'a pas atteint l'inspiration qu'on leur connaissait jusque là. The Argument comblera t-il nos attentes et effacera t-il ce léger arrière gout d'inachevé ?

Tout commence pour le mieux avec "Cashout", qui mélange un rock intimiste et bondissant avec des passages plus tendus soutenus par une guitare au son éthérée et bancal. C'est un sentiment de mélancolie qui plane, grandement entretenu par la voix sans artifice mais désespérée de MacKaye. Suit "Full Disclosure" qui tranche complètement avec les bases précédemment établies, mais se révèle tout aussi qualitatif. Bien plus énergique, bien plus dense, Fugazi parvient à y maintenir un aspect mélodique sans faille. Bref, on retrouve au sein de ces morceaux ce que le groupe sait faire de mieux, à savoir des compositions électriques, pleines d'énergies et de tensions menées par une ligne mélodique inspirée. Nous voilà déjà rassuré.
Fugazi ne se laisse jamais corrompre par la tentation de construire des morceaux aux structures simplistes malgré toute la reconnaissance qui leur est accordée. Les titres bondissent d'atmosphères en atmosphères, submergeant l'auditeur de sentiments variés mais toujours profonds. Malgré ce gout de "retour aux sources" que l'on peut ressentir à l'écoute des premières notes de The Argument, il faut bien avouer que la suite démontre que Fugazi est vraiment passé à autre chose. Même si quelques titres renoues avec le passé comme l'excellentissime "Ex-Spectator", le groupe opte désormais souvent pour un aspect "poppy", parfois un tantinet soporifique mais la plupart du temps troublant et personnel. Toutefois, ne pensez pas que la pop de Fugazi est celle qui envahie les bandes FM, insipide et sans panache. Le mur sonore est toujours solide et il faudra que les profanes forcent un peu pour le franchir et découvrir ce qui s'y cache juste derrière.  La pop de Fugazi est dépressive à souhait, épuré et troublante. "Life and lime", l'organique "Argument" ou "The Kill" témoignent à merveille de ces aspects.
Fugazi s'est pour la première fois entouré d'autres musiciens dont le violoncelliste de Telegraph Melts qui vient apporter quelques accents post-rock qui le font bien. On notera également les participations de la chanteuse du Tigre et de Jerry Busher, roadie du groupe, qui les accompagne ici à la batterie. La sortie de The Argument concorde avec celle de Furniture, un MCD 3 titres (8 minutes) bien plus tendu et énervé qui marque encore davantage la nouvelle orientation prise ici par Fugazi.

Au final, The Argument a réellement de quoi séduire via des titres tout simplement fabuleux qui touchent à tous les genres (post-hardcore, post-punk, rock et pop) et possédent la capacité plutôt rare de nouer les intestins. Malgré quelques passages un peu hors sujet, Fugazi nous balance 11 titres torturés qui font lever les poings au le ciel et démontrent que ces monstres sacrés n'ont pas encore dit leur dernier mot, et ce même si a mon humble avis, on ne verra pas de nouveaux disques de Fugazi d'ici un bon moment.

A écouter : Ex-Spectator, Cashout, Full Disclosure
16.5 / 20
2 commentaires (18/20).

In On The Kill Taker ( 1992 )

1992. Beaucoup se demandent comment Fugazi va se remettre après l'investissement émotionnel laissé dans Repeater et Steady Diet of Nothing. La réponse ne tarde pas. In On the Kill Taker va une fois de plus ébouriffer les crinières et démontrer les capacités de régénération de la formation de Washington.

Sans faire machine arrière Fugazi survient là où on ne l'attend pas, dans un registre plus punk, où la sueur, l'énergie reprennent le pas sur toute forme d'expression. Plus dur que ses prédecesseurs, In On the Kill Taker, dont les premières sessions, d'après la légende, avaient été enregistrées avec Steve Albini mais retravaillées suite à des résultats peu satisfaisants, revitalise le genre en lui donnant une substance plus orgiaque, plus instinctive, où chaque membre du groupe rivalise de fureur et de tension. Le rendu est largement à la hauteur des attentes. Jouissif, un songwriting hors du commun - çà on le savait déjà -  Fugazi  renoue quasiment avec l'urgence de la scène de Washington originelle, un peu comme s'il y avait un besoin viscéral de retrouver certaines valeurs. Ainsi "Facet Squared", "Public Witness Program", "Returning the Screw" ou "Great Cop" donnent le ton d'une oeuvre incomparable de dynamisme, mais que l'on sent en équilibre précaire, pondérée par une émotivité intrinsèque. 
Car Fugazi conserve malgré tout cette finesse de trait, cette précision et ce sens de la mesure, cette maturité qui les empêche d'atteindre le point de non retour. La carcasse ne peut se contenter longtemps de cette fuite éperdue en avant, sans se repaître de nourriture plus feutrée, d'ambiances durant lesquelles en apparence du moins, s'exprime une sensibilité plus aigue. "23 Beats Off", "Rend It", "Sweet & Low" et surtout le superbe "Last Chance for a Slow Dance" exploitent divinement ce contraste annonciateur des travaux futurs de Fugazi. Sans cesse sur une corde raide séparant l'instant moelleux de l'explosion sonique, le quatuor joue avec nos nerfs cristallisant notre attention sur une teneur que les timbres volontairement peu assurés de Picciotto et MacKaye - deux frontmen de cette trempe dans une seule formation c'est assez rare - rendent mélancolique. Impression également soulignée par le cliché sepia du Washington Monument et certaines références aussi à une certaine idée de l'indépendance artistique - de plus en plus rare - avec cet hommage à Cassavettes dans le titre éponyme.

In On the Kill Taker constitue un point crucial de la première période de Fugazi. Par la suite les choses ne seront plus les mêmes. Intimiste (Red Medicine), hermétique aussi (End Hits), Fugazi entrera dans une ère plus expérimentale dans laquelle il laissera quelque plumes sans toutefois se départir de son optique de départ.

Tracklist : 1. Facet Squared; 2. Public Witness Program; 3. Returning the Screw; 4. Smallpox Champion; 5. Rend It; 6. 23 Beats Off; 7. Sweet and Low; 8. Cassavetes; 9. Great Cop; 10. Walken's Syndrome; 11. Instrument; 12. Last Chance for a Slow Dance.

A écouter : Smallpox Champion, Great Cop, Last Chance for a Slow Dance