Après trois albums à ruminer du Metal Noir, Those Horrors Wither marquait une étape transitoire peu engageante pour Foscor, un je ne sais quoi bizarroïde trop peu accrocheur. Comme un trop plein d'idées en fait, résultat d'un groupe qui se cherchait et qui aura fini par se trouver avec Les Irreals Visions.
Comme Katatonia, Novembre, Alcest, Solstafir et d'autres encore, Foscor a quitté les terres extrêmes de sa jeunesse pour une seconde peau plus passe-partout, lavée des besoins primaires de cris et de guitares assassines. Est-ce encore du Metal donc ? Difficile à dire car Les Irreals Visions est assez peu corrosif, trop sage pour vraiment sonner comme un des fils légitimes de Black Sab' ou Venom. Du Rock alors ? Pas tellement non plus parce que la tentation du bizarre, des ambiances froides et des fonds de portées obscurs est toujours bien réelle. La poursuite d'une même fin par d'autres moyens, qui répondent aux noms de Post-Rock, Post-Black, Dark Metal, voire Prog. Des voies détournées, des genres un peu plus insaisissables peuplent ce cinquième opus qui se pare d'une aura crépusculaire, automnale, à l'image d'un Katatonia qui rôde souvent sur cet album (De Marges I Matinades).
Comme les Suédois, Foscor aime à naviguer en eaux troubles (et légèrement gothiques), refusant de choisir catégoriquement l'ombre ou la lumière. L'artwork ne ment pas, on se sent porté entre noir et blanc, bercé dans des mélodies bien souvent trompeuses (Ciutat Tragica). La faute à des guitares légèrement saturées qui déballent autant d'arpèges doucereux (Encenalls De Mort) que de soli soulève-coeur (De Marges I Matinades). Derrière le micro aussi, les émotions se livrent une douce bataille, narrée par une voix bien plus maîtrisée et cathartique que lors du précédent effort. Un changement notoire pour ce chanteur qui tient une position particulièrement centrale chez Foscor.
Parce que ce disque se consomme essentiellement pour son atmosphère enveloppante plus que pour des titres vraiment percutants. Pas de gros hits en vue, plutôt des images, des sensations propres à chacun. Les Irreals Visions parvient à instaurer un climat, à faire planer au-dessus de son auditeur un soleil pâle, des paysages éthérés, l'oeuvre installe dans une agréable torpeur d'où nous tirent quelques soubresauts passagers. Les stigmates Black surnagent encore parmi les plans de batterie de Instants ou Espectres Al Cau, quelques incartades Prog surgissent ça et là, et on pourra même surprendre à la volée de rares chants plus impies que la moyenne. On écoutera avec plaisir Encenalls De Mort pour sa ballade funeste et Malfiança pour ses dehors Rock Atmosphérique, mais il faudra du temps avant de bien distinguer tous les pans de cette nouvelle offrande, disons-le, plutôt homogène.
Les Espagnols prennent avec Les Irreals Visions un nouvel envol. Digéré, le Metal vilain pas beau qui faisait peur à Papa-Maman, le quatuor se tourne vers une lumière de plus en plus séduisante, intériorisant les démons du passé pour toujours plus de clair-obscur et d'art du contraste.
A écouter : Instants, Malfiança