Biographie

Evangelista

C’est en 2007 que Evangelista voit le jour sous l’impulsion de Carla Bozulich, voix atypique et musicienne avant-gardiste né à NY et relocalisée sur la côte Ouest (LA, San Pedro). Des albums en solo, dont le très bon Evangelista en 2005, des projets étonnants tels que The Geraldine Fibbers ou Scarnella, des performances multimédias à Los Angeles sont autant de chemins que Carla explore.
Evangelista est une entité à géométrie variable incluant la bassiste Tara Barnes, Shazad Ismaily et une partie modulable de la section cordes de Godspeed You ! Black Emperor et A Silver Mt. Zion. En 2007, Hello Voyager  est enregistré à Montréal (Hotel2Tango) par Efrim, qui sort le disque sur son label, Constellation Records en février de l’année suivante.

12.5 / 20
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In Animal Tongue ( 2011 )

On sait le monde de Carla Bozulich cassé. Entourée de jouets desossés et de poupées abandonnées, la Canadienne a pleuré toutes les larmes de son corps. Prince of Truth était un disque malade, forgé des barrières que Bozulich dressait, épuisée, contre l'extérieur. En ce sens, il pourfendait la cohérence, tête basse et yeux fermés.

In Animal Tongue est un disque las, une introversion après l'explosion. La bête, domptée, a renoncé au combat, n'est plus taillée pour lutter. Elle se recroqueville sur elle-même, dans l'attente.Ce qui frappe ici c'est la suprenante économie de moyens, les mélodies minimalistes le disputant aux voix alanguies, de celles qui ont déposé les armes. La dernière fois que l'on avait entendu Bozulich seule face à ses instruments, c'était sur "Hello, Voyager!" (Hello, Voyager!, 2008) pour un titre de clôture, respirant la liberté, expérimental et somptueux.
Désormais, ce sont les cordes qui la possèdent; basse menaçante sur "Artificial Lamb" ou violoncelle obsédant sur "Enter The Prince". L'atmosphère est pesante, constamment sur le point de craquer. La voix de Carla Bozulich, qui a joué pour beaucoup dans le côté "brut" des précédents albums est comme éteinte. Les meurtrissures des couteaux ont remplacé le feu de l'envie. Où est cette rage de vivre? Ce n'est pas l'Enfer mais ça y ressemble. 

On sent bien qu'In Animal Tongue n'est pas un disque définitif. C'est le témoignage de quelqu'un qui se cherche, et plonge dans ses origines pour retrouver un sens. De fait, il est imparfait, maladroit, sombrant à quelques moments, hagard. Le morceau-titre retrace l'Origine du monde, quand Dieu n'existait pas, quand la Terre était le Paradis des animaux sauvages. On entend Carla Bozulich tour à tour nostalgique puis fascinée. Cela fait partie des rares éclats qu'elle aura à offrir. En écho, une Lydia Lunch hébétée.
Dieu, d'ailleurs, puisqu'on en parle. In Animal Tongue est empreint de références religieuses que l'on connaissait pas alors chez Evangelista. Le besoin, à l'état naturel, de faire appel à un Etre supérieur ? Si cet Etre existe, il est forcément maléfique ou corrompu. Au "Black Jesus" répondent ces cloches enflammées qui sonnent l'Apocalypse mais ne résonnent que dans la tête d'une Artiste possédée à s'en casser la voix ("Bells Ringing Fire").
Si ce n'est Dieu, alors ce seront d'autres esprits, la religion officielle faisant place à la mystique du chamanisme, seul recours contre l'abandon. Cela donne une éclosion, "Hatching", une renaissance bienvenue au milieu des ténèbres. Le voyage peut se terminer.

Disque fragile, hanté mais paradoxalement éteint, In Animal Tongue puise trop rarement dans le talent de Carla Bozulich pour s'exprimer à plein. Il y manque l'étincelle créative qui ferait de cet album un véritable purgatoire. A défaut, on le verra comme une expiation libératrice à titre personnel. Ou ainsi faut-il espérer. Dessus, on priera pour qu'elle retrouve ce Paradis perdu dans ce qu'il lui reste d'errance sur Terre.

A écouter : "In Animal Tongue", "Bells Ringing Fire", "Hatching"
16 / 20
1 commentaire (16/20).

Hello, Voyager ( 2008 )

De celui qui caresse à rebrousse poil. De celui qui crisse et grince. De celui qui sait troquer ses plumes pour des flocons de limailles. Le rock-post (anti-post-rock ?) d'Evangelista est de ceux-là. Hello, Voyager creuse son chenal quelque part au confluent du cauchemar hanté de Jarboe et du spasme vocal éthéré et aliénant de Diamanda Galás. Entre les deux, le Monde, et des écoutes successives qui font voler ce carcan en éclat. Evangelista enferme dans un même bocal, l'acide et le basique, la nervosité et le groove primaire. Dur comme une latte en acier. Apre comme un vieux whisky à la bouteille opaque et salie. Ce disque se distille en nous avec le temps. Les strates gustatives, émotives et de couleurs ne se dévoilent qu'après avoir soufflé sur le message d'Evangelista à maintes reprises. Il faut lentement écarter la neige bruitiste, comme autant de grains de sable en surface de l'iris mélodique, pour dénicher le spectre harmonique. Le bancal, inquiétant et glauque, cache d’autres perspectives.
Carla Bozulich inocule le venin d'un crachat amer et l'instant d'après, adopte des postures sexy et bluesy ("Lucky Lucky Luck"). De l’Art de jouer avec les masques. Décisifs, les premiers instants montrent à quel point Evangelista parvient à faire cohabiter la rugosité d'un post-punk oxydé aux guitares tordues doublées d'une batterie martiale, et la surface veloutée d'instrumentalisation à la naïveté touchante ("The Blue Room"). Hello, Voyager est un album théâtral au possible, bande son d'un film décalé projetant les actes et les scènes dans une marmite bouillonnante d'acteurs schizophrènes. Les archers de feu Godspeed You! Black Emperor et A Silver Mt. Zion ne s'y trompent pas et, ponctuellement, communiquent le tourment maladif aux violons et violoncelles. Tout est fait pour venir rompre les codes établis.

Hello, Voyager est un tiraillement entre nostalgie musicale d'un temps révolu et rage industrielle inhérente à l'actuel tangible. Sans aucun doute, un des disques les plus atypiques du catalogue Constellation Records, reflet des ressentis aigre-doux de deux âmes extraordinaires (car la bassiste Tara Barnes y va de ses idées), en proie aux douleurs épidermiques et à la claustrophobie angoissée. Hello, Voyager. Attention, Danger.

A écouter : Smooth Jazz - Truth Is Dark Like Outer Space - The Frozen Dress
Evangelista

Style : Post Rock / Post Punk / Blues
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Origine : USA
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Site Officiel : cstrecords.com
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