Dans l’absolu il n’y a rien de bien dramatique à ne pas connaître tout ce qui peut sortir en matière de musique, quelque soit le genre, pour la simple et bonne raison que c’est aussi impossible que déconseillé. En effet la qualité et la régularité, voire l’excellence, restent l’exception aujourd’hui peut être plus que jamais. Ceci dit, nous (re)voici donc en présence d’une production française signée Eryn Non Dae. anciennement connus en tant que End. et déjà auteurs d’un maxi prometteur. Ne pas avoir connu jusqu’alors n’est en effet pas bien grave, mais persister alors que sort Hydra Lernaïa pourrait en revanche de tenir de l’erreur.
La qualité étant déjà là, la constance était logiquement le défi suivant à relever pour le quintet Toulousain. La question était donc de savoir si ce premier album allait venir lourdement enfoncer le clou des quelques certitudes acquises il y a quatre ans. A vrai dire on le (leur) souhaitait fortement.
Et lorsque When time elapses ouvre le bal on se dit déjà « bien vu ». Dès ses premiers instants cette galette fait montre d'un potentiel énorme pour ne pas dire plus et on sent qu’elle risque d’accaparer notre attention sur toute sa durée. Production claire et puissante, son massif et complexe sans être violent, Eryn Non Dae. n’est pas (plus ?) n’importe quelle formation en recherche d’envergure. Amateurs de musique envahissante et tentaculaire, laissez vos aprioris sur les groupes français de coté et engouffrez vous la tête la première dans ce Hydra Lernaïa car la surprise, si c’en est une, pourrait bien être bonne et venir confirmer la qualité du cru 2009 (Hacride, Fractal Gates…).
Rapidement et malgré son coté très élaboré voir un brin complexe pour une oreille non habituée, le son d’Eryn Non Dae. se met littéralement en place… et fait mouche. Blistering hate, Pure, The decline and the fall comme trois exemples de ce que savent faire les toulousains : de la construction musicale en quasi temps réel. C’est tout du moins l’impression que laissent ces titres - d’autres auraient pu être cités - déglingués massifs et aériens à la fois, en évolution constante et auxquels le groupe semble donner vie sous nos yeux. A Meshuggah, influence prépondérante depuis les débuts de l’aventure, vient désormais s’ajouter Hacride au rang des associations de luxe. Et ce n’est pas une simple question de (très) relative proximité géographique et de gout partagé pour le Metal classieux qui me fait dire cela…
Un peu à la manière des poitevins, Eryn Non Dae., bien que jouant une musique sombre, évolutive et alambiquée, n’en oublie pas pour autant l’efficacité. Jamais. A aucun prix. Aussi, au détour de chaque titre, hormis l’interlude Lam tsol oua (pourtant bienvenu), END parvient à faire raccrocher le wagon à qui se serait perdu en route. Attention, il n’est pas question ici de tenir avec rigueur aveugle une ligne directrice qui voudrait que chauqe composition comporte ce qu’il faut de gimmicks propices au headbang pour tendre à une efficacité maximum. Non, Hydra Lernaïa est cette efficacité brute à laquelle Eryn Non Dae. donne une ampleur supplémentaire en complexifiant et éclatant à sa manière les formats classiques, sans perdre en dynamisme.
Rien d’absolument révolutionnaire dans le fond mais toujours est il que le tout est extrêmement bien pensé et réalisé. Le rendu est un album équilibré, à la personnalité affirmée, solide de bout en bout et qui devrait pouvoir convaincre une fois de plus son monde que (le sud de) la France (Gojira, Hypno5e, Psykup, Manimal…) est décidément un coin où il fait bon avoir de la suite dans les idées en matière de musiques extrêmes ces dernières années.
Sans prendre le temps de se poser, Eryn Non Dae. passe de talent prometteur à quasi poids lourd en se payant le luxe d’éviter crânement la case confirmation. Prochaine étape avec l’excellence donc. On peut parier que le quintet en a les moyens. Accessible et riche à la fois Hydra Lernaïa laisse d’ailleurs déjà entrevoir une marge de progression pour ses auteurs qui auront jusqu'alors su se forger un son sans pour autant s’y enfermer. On s’impatiente déjà...
A écouter : 1
L'un des meilleurs albums de la scène française.
Un groupe à voir absolument en live.