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Biographie
Vaidotas Darulis (Guitare / Chant), Kristijonas Nenartavičius (Guitare), Valdas Voveraitis (Batterie) et Karolis Urbanavičius (Basse) sont originaires de Lituanie et fondent Erdve en 2016. Un premier opus très prometteur, Vaitojimas, qui mélange Black Metal / Post Metal / Doom Metal et Hardcore sort début 2018 via Season Of Mist. En 2021, ils reviennent sur le même label avec Savigaila.
Voici venir la suite pour les lituaniens d’Erdve qui se nomme Savigaila. On est encore une fois sur une mise en lumière par Season Of Mist et pour celles et ceux qui avaient manqué Vaitojimas en 2018, premier effort du groupe, on se retrouve à la croisée de Post- Metal / Sludge avec des bouts de Hardcore et de Black Metal.
Cette fois aussi, les lituaniens ne font pas dans la dentelle. Ca envoie du riff en fusion, concassé et ramassé d’une lourdeur pataude, mais d’une virulence qu’on appréciera. Rien à voir avec la fumette Stoner / Doom, Erdve est plutôt là pour te bousculer et te casser la nuque. On pense d’avantage aux guitares lestées de plomb que l’on peut retrouver chez Love Sex Machine, Black Sheep Wall ou Llnn. De fait, les lituaniens se retrouvent dans ce schéma de morceaux qui font l’effet d’une déflagration, de lourdeur sidérante et de sorte de magma poisseux comme en témoigne les deux premiers titres Lavondemes et Smala qui te roulent littéralement dessus. Lavondemes est mue d’une progression assez chaotique qui rappellera Converge, ou pour rester dans la thématique des groupes qui ont tout poussé à 11 façon Hardcore / Sludge : Hexis. A l’inverse, Voitis permet de faire redescendre la voilure dans son instrumentale Post-Hardcore / Noise lancinante et Pleura avec sa piste Indus est une respiration en milieu de disque.
Mais clairement Erdve sur ce Savigaila, plus encore que sur son premier album, est vraiment là pour tout retourner. La batterie est une machine de guerre, les riffs sont des chars d’assauts et la voix ne laissera aucun répit pour nous entrainer dans ces amas étouffant et sauvage à l’instar d’un groupe comme Cult Leader avec le titre Betonas. Alors que Bendryste ou Sugretinimas sont également de gros pavés à se manger en pleine tronche avec à chaque fois ce petit côté déstructuré façon Converge qu’on aime bien. On appréciera également quelques respirations comme le très Post-Rock et plutôt inattendu Pragulos ou encore d'avantage ce morceau au piano, Skilimas, étonnamment fort bien senti et incorporé dans son tracklisting qui permettent de couper avec les déflagrations sonores et surtout l’aspect très massif des compositions (renforcé par une production qui donne l’impression d’avoir englouti quatre burgers d’affilé).
En définitive, Savigaila est un bon disque. Son aspect « straight in the face » est dilué par des moments plus calmes qui font du bien, mais sont d’avantage là pour faire redescendre la pression, même s’ils s’inscrivent bien dans l’album et instaurent une ambiance étrange qui leur sied bien. Paradoxalement, le cœur du disque, à savoir les titres Hardcore / Sludge, oscillent entre le très bon, avec les deux premiers morceaux qui sont géniaux et la conclusion Takoskyra qui est magistrale, mais le largement plus anecdotique en milieu d’album, du fait de jouer toujours sur le même registre : toujours à donf, les potards à 11. Erdve est un très bon groupe, il n’y a même pas à en douter, c’est simplement que la surprise et aussi l’écriture est moins surprenante que sur Vaitojimas qui nous avait étonné en 2018.
Quand un groupe de Metal est originaire d'un pays un peu atypique, pour nous français, pas trop mal placés sur l'échiquier culturel international, il est de mauvais goût de commencer une chronique en enfonçant des poncifs sur le pays à base de bouffe, d'alcool et autre monument pour faire genre on connait. Sauf que ça sert à rien de se le cacher, la Lituanie, tout le monde s'en branle, on ne connait rien sur leurs us et coutumes et encore moins leurs groupes de musique. Ce qui n'est peut-être pas plus mal comme ça. Et oui, il y a Au Dessus, c'est bon, tu as gagné un hoodie de ton choix des Acteurs de l'Ombre.
Nos lituaniens du jour s'appellent Erdve, sortent de nulle part (littéralement, serait-on tenté de dire) et signent un premier album intitulé Vaitojimas accouché en même pas deux ans de formation via un label dont la réputation et la force de frappe n'est plus à prouver : Season Of Mist. Un joli coup de poker du label finalement quand on voit la qualité de cet album alors que ni démo, ni ep ne pouvait mettre la puce à l'oreille sur comment le groupe allait sonner. Erdve ne rabat pas les cartes pour autant, il se contente de suivre ce qui se fait pas mal en ce moment à savoir mélanger Black Metal, Hardcore, Post-Rock et un peu tous les genres musicaux entres les lignes. Appelles ça Post Metal si tu veux, comme ça c'est plus pratique et on voit à peu près de quoi on cause. Et si on est carrément feignant on cites les mots magiques : Neurosis, Cult Of Luna et Amenra, comme ça tout le monde est content.
En réalité Erdve est bien plus intéressant que ces quelques mauvais très d'esprit. En premier lieu leur manière de sonner, c'est gros, épais, baleinesque. On est plus proche des coups de butoirs de chez Love Sex Machine ou de Llnn que de caresses Post-Rock. Mais pas que, car les aspects Black Metal sont tout aussi bien amené, assez discrets, plus insidieux comme pourrait le faire Thou par exemple ou Planks dans ses moments les plus noirs. La hargne du chanteur (qui chante dans sa langue natale) joue aussi pour beaucoup dans la dynamique de Vaitojimas dans sa manière de varier ses phrasés et ses tonalités, mais aussi de bien coller aux ambiances assez différentes d'un morceau à l'autre. En sommes, Erdve a bien assimilé une grosse dizaine d'année de groupes et de ces genres musicaux pour aboutir sur une oeuvre personnelle et très bien construite.
En s'y attardant un peu plus en détails on trouve pas mal de trucs à se mettre sous la dent dans cet album. L'ouverture sur le titre éponyme est lourde, très lourde, porté par son riffing monolithique casse genoux et son ambiance noirâtre à souhait dont ne renierait pas Celeste. Prievarta est lui aussi axé morceau qui cogne dans les parties avec sa rotative de cordes / rythmique parfois tribale. C'est dense, abyssal même, dont ne s'échappe que quelques dissonances maladives pas spécialement là pour te remonter le moral. A l'image de la très classe et évocative pochette donc. Erdve sait aussi se la jouer plus "Post" avec Išnara, plus atmosphérique dans le déroulement, porté par sa mélodie décharnée vaguement Deathspell Omega alors que la courte respiration sur le début d'Apverktis feinte une conclusion presque Punk Hardcore expéditive mais terriblement efficace. Le morceau de l'album c'est surement Pilnatve débuté sur une touche mélancolique pour muer en un magma Doom écrasant aux guitares sous accordées comme si disloquées et des hurlements qui prennent aux tripes. Vaitojimas se conclue sur un Atraja aux dissonances Blut Aus Nordienne et au tempo plus soutenu (des patterns de batterie bien vus, et une fluidité impeccable) dans une ambiance tout aussi inquiétante et furieuse.
A l'heure de compter les points Erdve réalise là un sans faute. Tous les morceaux sont excellents, variés et chacun propose le truc en plus qui les démarque des autres. Rien à redire sur la composition, sur les influences digérées et sur le propos général du groupe. En bref, on ne peut qu'être impatient pour la suite.
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