J'avais adoré le précédent, j'aime encore plus celui-ci. Plus personnel, plus riche.
C'est à fleur de peau tout le temps, toujours juste et quelle voix!
Connue des amateurs de Post-Rock et de Shoegaze pour ses participations aux groupes Red Sparowes et Marriages, Emma Ruth Rundle mène également depuis quelques années une carrière en solo qui lui permet de nous montrer une facette naturellement plus intime et délicate de sa musique. Une impression confirmée dès les premières notes du morceau-titre dont la mélancolie, qui pourrait sembler écrasante, se transforme pourtant rapidement sous l’effet d’une tension palpable et d’une volonté manifeste et appréciable de la part de la Californienne de ne pas tomber dans le cliché du songwriter dépressif n’ayant pas de meilleurs amis qu’une guitare et un chat. La guitare est tout de même au coeur de ce Marked For Death qui transpire, et l’expression n’est ici pas galvaudée, de sincérité et d’un désir de ne pas travestir ce qui fait l’essence des morceaux qui le composent. La volonté d’Emma Ruth Rundle de sonner «vrai » est flagrante et les efforts qu’elle déploie pour sortir de sa zone de confort, une impression qui se confirme en concert, rendent ce disque touchant et, par moments, bouleversant.
La photo qui illustre la pochette de l’album ne laisse aucun doute à ce sujet, Emma Ruth Rundle ne cherche pas à se prendre pour quelqu’un d’autre. « I never was a pretty thing, always fight and sometimes scream, for nothing at all » admet-elle sur Heaven, ne cherchant pas à cacher les défauts et les moments difficiles qui ont jalonné son parcours. Une franchise mise à l’épreuve de guitares tour à tour délicates et tendues et qui viennent constamment menacer cette voix que l’on devine timide mais qui parvient, sans doute instinctivement, à se faire déterminée et intense malgré une fragilité évidente (Protection, Hand Of God). Une colère contenue mais sur le point d’éclater vient magnifier des titres comme So, Come ou Protection (« You just keep talking down to me, taking all of my hair pulled back ») et son final cathartique rappelant certains des morceaux les plus incandescents de Red Sparowes.
En quête d’une spiritualité synonyme d’espoir et de résistance (Furious Angel), elle considère la trahison et l’abandon comme des passages obligés (« I was made of a storm, only you could bring me home ») et met au service de ce message un remarquable talent de composition, tant ses chansons semblent progresser naturellement, se parant de cordes suffisamment évocatrices pour provoquer l’émotion mais assez discrètes pour qu’on ne puisse pas les accuser de racolage. Utilisée de façon récurrente, la reverb donne une profondeur intéressante à la production somme toute minimaliste de Marked For Death, permettant dans un certain sens aux morceaux de viser un peu plus loin que leur objectif d’origine. Mais était-ce vraiment l’ambition d’Emma Ruth Rundle ? Le sentiment qui prédomine à l’écoute du disque reste celui d’une recherche de la vérité, quelle que soit la forme sous laquelle celle-ci décide d’apparaître. Le déchirant Real Big Sky, qui conclut l’album, résonne comme la pleine acceptation du destin (« I don’t want to be awake when It takes me, but I can’t wait to see you smile on the other side »). Une façon, certainement, de ne pas laisser à qui que ce soit le loisir de décider à sa place…
Le son de la guitare sur le premier morceau me rappelle mes jeunes années dans les 90's... Un album qui parle à mes oreilles et à mon cœur.