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Biographie
Les 4 membres de Dredg se sont rencontrés au lycée. Très vite, ils commencent à jouer dans les clubs de Los Gatos dont ils sont originaires. La Californie devient alors leur principale inspiration musicale, le brassage culturel donne un coté "world" à leurs compositions, et la technologie omniprésente leur insuffle le goût de l'expérimentation électronique.
Depuis 1996, ils ont sortis un album (ou EP) tout les ans, mais c'est réellement avec Leitmotif (1998) qu'ils commencent à se faire un nom en Europe.
Avec El Cielo le groupe enfonce le clou et devient définitivement maître d'un style qu'il a lui même inventé et qu'il bonifie un peu plus encore en concert grâce à des prestations d'une intensité rare.
Forts de ces expériences, Dredg revient en 2005 avec un nouvel album : Catch Without Arms.
Capables du meilleur comme du pire, c'est la conclusion qui s'impose dès la première écoute de ce 4ème album des Californiens de Dredg. S'ils nous avaient fait forte impression avec le précédent album, qui était sans conteste ce qu'ils ont produit de mieux à ce jour, ils signent là un album très en deçà de ce à quoi nous étions en droit d'espérer. Un album dans la veine de The Pariah, the Parrot, the Delusion, mélant habilement mélodies aériennes et arrangements somptueux, techniquement impeccable, ou quelque chose qui se rapprocherait plus de leurs premiers albums, une galette de pur concentré vitaminé de rock aux accents métalliques ? Rien de tout cela au programme de ce Chuckles&Mr. Squeezy, qui résonne déjà comme le virage artistique raté, pour ce groupe qui ne manque pourtant pas de talent.
Et pourtant l'annonce de la collaboration entre le groupe et Dan The Automator, célèbre producteur qui a travaillé entre autre avec Gorillaz, Kasabian, Peeping Tom et bien d'autres, avait de quoi réjouir l'ensemble des fans et laisser augurer, sinon un album péchu, une collaboration artistique intéressante et un album léché et riche en surprises. Ce sera sans compter l'inspiration et les surprises, tant ces deux éléments pourtant chers au groupe sont ici délaissés, au profit de compositions molles, sans âme, oscillant entre un rock/pop plat et lent et de l'électro mâtinée de sonorités hip hop pas vraiment convaincantes. Au placard les riffs de guitares sauvages et les grooves maitrisés des anciens albums, bonjour l'indigestion de pop sirupeuse et d'arrangements electro / hip hop maladroits !
Le massacre commence dès la première chanson "Another Tribe", sorte de pop électro avec un refrain facile et des sonorités assez dérangeantes qui ne met absolument pas en confiance et déroutera tout fan qui se respecte, suivi par "Upon returning", qui est déjà plus dans la veine de l'album précédent, mais la surcharge d'arrangements et d'effets alourdit le tout, et ne parvient malheureusement pas à réveiller l'auditeur en quête de ces petites "choses" (sonorités "catchy", mélodies soignées, ambiances électriques) qui font les grandes chansons de Dredg. The Tent, avec ses relents dub et sa mélodie torturée est presque une réussite, il manque pourtant toujours quelque chose, et même si l'on nous clame sur cette piste qu'on nous ramènera ce qu'il nous manque ("Anything that you need, Anything at all, I’ll hunt down for you"), on reste encore sur sa faim. Sur "Somebody Is Laughing", c'en est presque trop, la pop facile et les mélodies acidulées attaquent sérieusement les méninges, et c'est le carton rouge mérité !
La magie n'opère décidément pas sur cet album, malgré des prouesses vocales toujours au top de la part du chanteur, et excepté "Kalhatat", une ballade assez bien orchestrée, et "The Ornament", morceau dans la lignée de l'album précédent, on se demande bien ce qui est passé par la tête de Dan the Automator de supporter un tel projet ! Une seule chose à faire : oublier cet album, et se replonger dans les précédents, tous excellents, et prier pour que les futures galettes soient un peu plus inspirées que cette opération ratée.
A écouter : les anciens albums
Dredg fait partie de ces groupes inclassables qu'il est extrêmement difficile de chroniquer. Avec El Cielo en 2002, les californiens avaient fait très fort, ils étaient revenus en 2005 avec Catch Without Arms, album plus direct et plus facile d'accès (qui a dit moins bon ?). Leur dernier album en date The Pariah, The Parrot, The Delusion sorti en 2009 est tout simplement leur meilleur album. Le genre d'album difficile d'accès, qui parait simple et anodin au premier abord, mais qui, une fois déballé, mis à l'épreuve encore et encore, imprégnant votre salon et vos oreilles difficiles, devient une œuvre majeure à la fois pour le groupe mais aussi pour le genre auxquels ils sont rattachés, à savoir le rock progressif. Étiquette qui ne veut malheureusement plus rien dire depuis quelques années. Passons, le débat n'est pas là. Une chose est sûre concernant The Pariah, The Parrot, The Delusion : c'est l'album le plus abouti de Dredg. Imaginez une énorme zone de marécages brumeux, avec en son centre un bourbier digne des meilleurs Indiana Jones, caché sous une épaisse couche de feuilles. Au premier abord ça n'a pas l'air méchant, plutôt inoffensif je dirais, mais une fois les pieds dedans et après quelques heures à se débattre, impossible de s'échapper. Et bien cet album, c'est la même chose : au début c'est chiant, puis on se force à le ré écouter, et au fil des écoutes successives, impossible de faire machine arrière, on est sous le charme, c'est grandiose ! Et ça fait du bien ! Car Odin seul sait que c'est pas tous les jours qu'un album de rock arrive à être aussi réussi. Chapeau bas messieurs ! Détaillons maintenant un peu le joujou...
L'album démarre en toute simplicité par une des meilleures chansons de l'album : Pariah. Intro minimaliste au piano et choeurs d'enfants, en attendant que les guitares s'en mêlent, tous riffs dehors, annonçant un rock au potentiel énergique. La basse ronronne, tantôt groovie tantôt agressive puis Gavin Hayes pose sa voix, en léger retrait, juste avant une montée en puissance, un refrain efficace comme on en fait rarement, et le groupe repart avec un bridge magnifique à la batterie et à la guitare. Première chanson, plus complexe qu'il n'y parait, sentiment qui vous accompagnera jusqu'à la fin de l'album. Le groupe enchaîne avec Drunk Slide, mini morceau musical de 1'27, où ils continuent leur exploration électro très discrète, mais une oreille avertie reconnaitra la complexité de la chose. On arrive déjà au troisième morceau : Ireland qui commence comme une balade, ne vous fiez pas aux 15 premières secondes, cette chanson est une tuerie. On connaissait les capacités vocales de Gavin Hayes, mais si sur un album comme El Cielo il énervait parfois avec des envolées lyriques suraiguës où il en faisait clairement trop, sur ce nouvel album c'est tout simplement sublime, la voix est cristalline, maitrisée, et colle parfaitement aux sonorités des compositions, cette chanson illustre parfaitement cette caractéristique. L'album regorge de pépites rock. Que ce soient les morceaux principaux ou les transitions magnifiques qui viennent enrober le tout d'une atmosphère chaude et mélancolique, ces 59 minutes de musique alternent entre chansons pop complexes (Information), rock "progressif" aux sonorités corrosives (Gathering Peebles) et délires électros sobres mais omniprésents (R.U.O.K). Quel album vicieux, on y découvre des choses à chaque fois, que ce soit un petit sample que l'on avait pas remarqué la première fois, un riff osé ou un groove trippé d'à peine quelques secondes, chaque écoute est un véritable plaisir. Diversité musicale façon Dredg, voilà comment classer cet album. Funk et grooves sur Mourning this Morning, Electro sur R.U.O.K, et même quelques chansons "musclées" ; attention rien à voir avec Cannibal Corpse, mais des chansons comme Saviour ou I don't know montrent que le quatuor sait se rapprocher de sonorités plus agressives quand la chanson le justifie, jamais trop, juste ce qu'il faut pour faire vibrer l'auditeur, c'est ça la qualité principale de cet album : tout y est justifié, tout s'enchaine à merveille dans un déluge de sons qui prend aux tripes. Avec Long Days And Vague Clues, ils enfoncent le clou : des violons menaçants, des percussions et un duo batterie / basse sacrément efficace. La tension monte, monte, l'explosion est si proche... et bien non, ils auraient pu faire de cette chanson et des ces 1'27 de pure rock un exemple de rythmique déjantée permettant à l'album de bifurquer dans cette voie, au lieu de cela ils enchaînent avec Carton Show Room et Quotes, les deux plus belles chansons de l'album, toutes deux empreintes d'une poignante émotion à même de faire vibrer n'importe quel golgoth chevelu. L'album se termine par ces deux chansons. Quelle claque ! Enfin, mention spéciale à Drew Roulette, le bassiste du groupe, qui signe là une remarquable performance tout au long de l'album : les lignes de basse sont impeccables, parfois discrètes souvent fracassantes, le monsieur donne à l'album un cachet groove mémorable, et une certaine audace pas toujours perceptible au premier abord.
The Pariah, The Parrot, The Delusion est définitivement un excellent album, un disque à posséder, à écouter, à ne pas ranger avant quelques mois, et à ne surtout pas jeter trop vite sur l'étagère "trucs chiants que j'écouterais jamais plus", forcez vous, il en vaut la peine, vous y reviendrez car vos oreilles vous le réclameront. Les nombreux effets et autres pirouettes techniques de production y sont savamment dosés et orchestrés, que ce soit les violons, les claviers, les slide guitares, célesta et même accordéon, tout y est exécuté avec une précision et une justesse diaboliques. La leçon de musique en 18 titres...
A écouter : Pariah, Ireland, Saviour, Long Days And Vague Clues, I don't know, Carton Show Room
1998, Dredg sort Leitmotif aux Etats-Unis, premier véritable album, première claque pour ceux d'entre nous qui, étant nés du mauvais côté de l'Atlantique, ont quand même réussi à se procurer l'album en import.
Présentation sobre, livret somptueux, contenu musical tout simplement épatant; seul bémol, l'album se révèle assez court (seulement dix merveilleux titres), on en redemande.
4 ans plus tard, 2002, El Cielo débarque, second album, seconde claque ? Non, pour le coup ça ressemble plus à un énorme uppercut frontal. El Cielo est aussi beau qu'il est impossible à chroniquer, ce qui suit n'est donc que mon humble avis, la meilleure solution en ce qui concerne cet album étant encore d'aller l'acheter et en vitesse si possible.
El Cielo, c'est l'orgasme mis en musique, intense d'un bout à l'autre, excitant, beau… jouissif tout simplement. On y trouve toutes sortes de plaisirs, une voix divine, des chœurs angéliques (The Canyon Behind Her), une touche de piano et de violon (Brushstroke: Walk in the Park) et même un soupçon de saxophone (Whoa Is Me). Les plaisirs orientaux sont aussi de la partie avec 18 People Living in Harmony et Brushstroke: An Elephant in the Delta Waves. Les parties d'électro planantes, délicieusement placées (Scissor Lock), ne font qu'accroître notre joie, et, lorsque les guitares se font encore plus mordantes sur It Only Took A Day on atteint réellement l'extase.
Dredg n'a jamais eu de frontières musicales, avec El Cielo ils prouvent qu'ils n'ont pas non plus d'équivalents musicaux. Cet album donne envie de vivre, de vivre pour en connaître la suite.
A écouter : Scissor lock - 18 People Living In Harmony - It Only Took A Day
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