Dream Theater

Metal progressif

États-Unis

Distance Over Time

2019
Type : Album (LP)
Labels : Inside Out Music

Chronique

par Zbrlah

Peut-être que la première oreille que vous jetterez à Distance Over Time sera désabusée, encore chargée des souvenirs d’un The Astonishing pas dégueu mais trop complexe, pas à sa place ; peut-être que vous ne donnerez une chance à cette nouvelle galette que parce que vous devez bien ça à Images And Words ou à Scenes From A Memory. Parce qu’au fond, que dire sur un quatorzième album ? A ce stade, tout n’a-t-il pas déjà été dit ? Dream Theater bla bla bla, le Metal Prog un peu chiant bla bla bla, plus pareil sans Portnoy, bla bla bla. Eh bien non. Non, tout simplement. Si l’écoute initiale sera peut-être désabusée, sans attentes, il s’avère que très vite, le cru 2019 des darons du Prog est tout à fait digne d’intérêt.

On le disait il y a trois ans, et on l’a répété quatre lignes plus haut, The Astonishing était vraiment exigeant, compliqué dans son concept et donc difficile à interpréter, à encaisser. Vous visualisez ? Eh ben Distance Over Time, c’est plus ou moins l’inverse. Là où le précédent opus donnait plutôt dans le Rock Prog, la nouvelle livraison est un vrai retour au Metal et aux riffs bien heavy. Là où l’effort de 2016 proposait 2h10 de contenu, son successeur est un des albums les plus courts de Dream Theater (si on ne compte pas la bonus track, c’est même le plus court en dehors du tout premier, When Dream And Day Unite, en 1989). Là où The Astonishing avait un scénario ambitieux et devait être suivi avec le livret à la main, Distance Over Time n’a pas de fil rouge, loin de la notion de concept-album, et chaque titre est efficace même sans contexte. Au final, tout ce qu’il semblait manquer est au rendez-vous de cette nouvelle offrande. Et en effet, on ressent à l’occasion un arrière-goût de “vieux” DT qui n’est pas pour déplaire. Les grooves de l’intro de S2N ne vous rappellent-ils pas un certain Take The Time, datant d’un certain Images And Words ? Le gros riff et les progressions des couplets de Paralyzed ont un petit quelque chose de l’époque A Dramatic Turn Of Event, la toute fin de Barstool Warrior fait écho à celle du classique Strange Déjà-Vu, quand le pont éthéré au milieu de Fall Into The Light renvoie plutôt vers la période Octavarium / Systematic Chaos. Ces autoréférences, multiples sans être ni évidentes, ni faciles, ni trop régulières, permettent d’ancrer ce nouvel album à la fois comme une continuité et comme une évolution de la démarche de ses auteurs, après le (très relatif) faux-pas de l’opus précédent.
Et si on parle d’évolution, c’est parce que Dream Theater tente effectivement de nouvelles choses, ce qui est digne d’être salué. Notons par exemple l’approche ultra frontale de Room 137, basée sur un seul riff, la bonus track Viper King et son ambiance complètement bluesy et dansante, ou encore le simple fait d’utiliser des paroles plus terre-à-terre, plus directes, en faisant tenir la plume au plus-si-nouveau-que-ça batteur Mike Mangini (sur Room 137 justement).

Bien sûr, Dream Theater joue toujours du Dream Theater. Les petits changements, ou le fait que les pistes soient « plus courtes » (même si c’est un des rares opus du groupe à ne pas avoir de pavé dépassant les dix minutes, on reste sur un format bien Prog, rassurez-vous), tout cela ne change pas les ambitions des Américains : les constructions sont recherchées et travaillées (At Wit’s End, Fall Into The Light, Pale Blue Dot), et tous les titres ont leur moment « tartine de virtuosité ». Et ne vous y trompez pas, c’est un excellent bon point. Jamais les solos n’ont été aussi peu chiants, grâce au format choisi sur Distance Over Time, un peu plus condensé. Par exemple, pour avoir la place d’un long pont instrumental dans Fall Into The Light qui ne fait « que » 7 minutes (le morceau, pas le pont), cette section s’affranchit tout simplement de solo de guitare. Si, si, on est bien dans un titre de DT ! D’abord aérien, puis lourd et puissant, et enfin rapide et technique, avec un des meilleurs solos de clavier de l’opus, ce passage n’a pas besoin d’être plus démonstratif, et marque bien plus les esprits que s’il s’était éternisé. Pale Blue Dot ainsi que At Wit’s End, les deux compositions les plus riches en moments très progressifs, sont pourtant vraiment faciles à digérer et on y trouve rapidement des repères.

Distance Over Time est l’album auquel plus personne ne voulait croire. Un contre-braquage bienvenu après la direction prise sur le précédent double-album, la meilleure livraison du groupe depuis le houleux changement de batteur en 2010, des morceaux pensés aussi efficacement que ceux du Dream Theater d’il y a quinze ans, que demander de mieux ? La vieille équipe du Prog virtuose montre qu’elle en a encore sous le coude, et c’est d’autant plus agréable qu’on ne le voyait pas venir. Un grand “oui”, qui risque d’ores et déjà de se faire une petite place dans les bilans de fin d’année pour tous les amateurs de Metal mélodique au sens large.

15

A écouter : 1

Les critiques des lecteurs

Moyenne 15.69
Avis 8
Groover April 4, 2019 17:34
Très bon album de D.T. et sans doute le meilleur album depuis Train of Thought(2003!!!).

Dream Theater fait un retour aux sources, mais en plus lourd.

Quand j’écoute ce dernier album je pense de suite à "Scenes from a memory", "Awake" ou même à "Images and Words", du bon vieu temps du Metal Progressive.
20 / 20
Eagle_John April 2, 2019 09:28
Une excellente surprise ce dernier Dream Theater et sans aucun doute le meilleur de la période Mangini!



Dans celui là, Dream Theater renoue avec une agressivité qui rappelle Systematic Chaos sur des morceaux comme Paralyzed, Room 137, Unthethered Angel. Le côté progressif reste bien présent, notamment avec Barstool Warrior, At Wit's End, Pale Blue King, qui figurent parmi mes titres préférés avec Out Of Reach (ballade qui semble sortir tout droit d'Images And Words) et Fall Into The Light (dont la structure rappelle Master of Puppets).



Au final nous avons un album bien équilibré et les titres sont particulièrement réussis! Seul Room 137 est plus faible que les autres. En d'autres termes un excellent album!
17 / 20