Disappears

90's Indie Rock

États-Unis

Pre Language

2012
Type : Album (LP)
Labels : Kranky
Tracklist
1Replicate 
2Pre Language 
3Hibernation Sickness 
4Minor Patterns 
5All Gone White 
6Joa 
7Fear of Darkness 
8Love Drug 
9Brother Joliene

Chronique

par Chorizo

Déserté depuis quelques mois, l'Echo Canyon West Studio a dû, l'espace de quelques jours, sentir revivre la poussière lorsque Disappears y a posé ses bagages pour enregistrer ce Pre Language. Le tour du propriétaire ne fut pas long; on a soufflé la poussière et dépoussiéré les toiles d'araignée. A peine a-t-on pensé à aérer l'atmosphère nostalgique pregnante, celle des chemises et des cheveux trop longs, trop sales. Celle, aussi, des guitares Jazzmasters et des Mustangs que l'on néglige et martyrise à souhait.

Aux Chicagoans, tout cela s'est imposé comme une évidence. En pleine montée en puissance, ils ont signé coup sur coup deux disques aux effets savamment orchestrés, comme des vétérans de la scène. On a encore en tête l'hypnotique "Revisiting", qui clôture le précédent album, Guider : 15 minutes en transe, nourries de réverbération, de rythmique motorique et d'incantations diluées. Un coup d'éclat qui signait l'arrivée de Disappears dans la cour des grands, à l'instant même où le groupe donnait ses premiers concerts avec Steve Shelley (désormais ex-Sonic Youth, ça fait mal de le dire encore quelques mois après) à la batterie. Parlez-moi de crédibilité. On sait maintenant qui leur a filé les clés du studio.

Sur ces entrefaits, Pre Language reprend à peu près là où on ne l'attendait pas. Ou un peu, car on s'en doutait quand même. La caisse claire claquante de "Replicate" annonce la couleur. Le son s'est affermi, les guitares sont prêtes à rugir, les envolées sont maîtrisées; et en back up, les bombardements toujours bien sentis de Shelley. Disappears fait rêver en technicolor, quitte d'ailleurs à parfois trop se rappeler au bon souvenir des New-Yorkais. Entre ses interludes mélodiques, son refrain salement distordu et son outro au rythme déglingué, il ne manque à "Hibernation Sickness" que la voix de Kim Gordon pour s'y voir. Un effet 3D rendu possible par une production "live" impeccable (signée John Congleton - The Paper Chase et maître d'oeuvre d'une ribambelle de productions*), qui joue pour beaucoup dans l'aspect instantanément addictif de ce disque.

Là où ses prédécesseurs jouaient sur l'aspect répétitif des couches d'effets pour séduire, Pre Language préfère l'immédiateté et la puissance des mélodies. Révélatrice synthèse, son morceau-titre : couplet scandé à la ritournelle rodée, refrain éclatant et pont bruitiste en roue libre. Un enchevêtrement tortueux de mesures efficaces, écrites dans l'urgence et de riffs cassés, joués avec la dernière corde encore tendue sur le bois, regard rivé sur le sol, pédale d'effets enclenchée à fond, sans aucune retenue, jusqu'à faire tout disparaître autour de soi ("Fear of Darkness"). Ce qui n'exclut pas de délicieux moments d'oublis - la bien nommée "Love Drug", et sa construction en suspension du haut de ses 5 minutes, et "Joa", deux délicieuses broderies hypnotiques emmenées par un couple basse/batterie réglé au métronome.

Concis, dense et particulièrement homogène, Pre Language possède suffisamment de personnalité pour éviter de sonner comme un énième revival vain des 90's. Hasard du calendrier, on pensera évidemment à la coïncidence heureuse qui a vu se succéder en quelques semaines ce disque et celui de Cloud Nothings, Attack on Memory, produit par un autre papy, Steve Albini. Les jeunes ont encore beaucoup de choses à dire et ont bien fait d'écouter en boucle leurs aînés. Ils ont su en retranscrire l'esprit en toute indépendance avec une bonne dose de savoir-faire. Papa peut être fier.

16

A écouter : 1

* Si l'on pioche de manière totalement partiale au hasard, Congleton y est pour beaucoup dans le côté "brut" du son de Shearwater sur The Golden Archipelago. Moins connu, Logh devrait également se frayer une bonne place dans la liste de ses interventions réussies.
--

REPLICATE by DISAPPEARS All Gone White by DISAPPEARS

Les critiques des lecteurs

Moyenne 16.5
Avis 3
Denton62 March 24, 2012 08:29
De même que le commentaire précédent, je remercie Metalorgie pour la découverte. Je n'ai pas aimé tous les morceaux de cet album, mais pour les autres je les adore (Replicate, Hibernation Sickness, Joa et Love Drugs en particulier).



Du rock psychédélique avec quelques touches noisy comme j'aime !

Bravo à Disappears pour ce chef d'oeuvre.
16 / 20
Thespiritoffrankie March 18, 2012 19:50
Merci à Metalorgie pour la découverte,

Disappears est un bon mélange des années 90 dans sa plus belle tenue: Joy Division, Sonic Youth (forcément avec Shelley dans le coup!)...



Avec ce petit côté en plus, vivifiant, de nos dernières années qui m'évoque A place for bury strangers (pour le son soigné) et Young Widows.

Foncez !
16 / 20