Descendents
Punk Rock

Hypercaffium Spazzinate
Chronique
Douze ans. C’est le nombre d’années que Jacques Chirac aura passé à l’Élysée. C'est long ! C’est également le temps qu’il aura fallu attendre pour ce nouvel album des Descendents. Ce fut très long ! Et même si Cool To Be You avait tout pour satisfaire, et qu’il n’a à peine pris une ride (ce n’est plus à la mode de porter le bouc, voir la chanson Mass Nerder), il était impossible de garder son calme à l’idée de pouvoir se mettre entre les oreilles une demie-heure de nouvelles chansons des Californiens.
Hypercaffium Spazzinate fait immédiatement l’effet d’une “time capsule”, comme si on avait quitté le groupe la veille. On retrouve la même ambiance, ce côté doux-amer, et la même énergie. Puis au fil des écoutes, on sent une plus grande maturité du groupe (si l’on peut dire, ils étaient déjà quadragénaire à la sortie de Cool To Be You) : à travers les paroles, à travers la façon de chanter de Milo, à travers la musique, on sent un peu moins d’excentricité. Mais ce n’est pas pour autant que l’album se retrouve dépourvu de toute fantaisie. La principale vient de la part de Karl Alvarez à la basse. Victim Of Me, premier extrait de l’album, avait donné la couleur, sauf qu’au final il nous sert une partition complètement folle du début à la fin (voir l’énervée Limiter ou la guillerette Fighting Myself) et se paie même le luxe d’un petit hommage à Sting et Police sur Smile. Stephen Egerton et Bill Stevenson déroulent derrière, le groupe joue toujours aussi vite et les riffs de guitare se font précieux par moment grâce à l’utilisation d’accords que peu de punks doivent connaître (Fighting Myself, Spineless And Scarlet Red, Without Love). Milo quant à lui n'a rien perdu de sa puissance vocale et possède toujours ce petit quelque chose chargé d'émotion (Smile).
On retrouve bien évidemment le côté geek / ado attardé sur plusieurs titres : On Paper, où comment bien se vendre quand on n’a guère plus que sa beauté intérieur pour soi ; We Got Defeat, où comment apprendre à encaisser les coups à l’école façon Nietzsche et Full Circle, pour se la jouer façon les Goonies. Le groupe s’énerve également à bon escient, sur Limiter qui dénonce les traitements médicamenteux pour les hyperactifs, No Fat Burger fustigeant la malbouffe dans un style rappelant Minor Threat, Testosterone et Human Being regrettant la course à la réussite et la pression sociale, tandis que la religion se fait gentiment égratigner avec Shameless Halo. Et à tour de rôle on pourra sentir de la légèreté (Victim of Me, On Paper, Smile, Fighting Myself, Comeback Kid) ou de la mélancolie (Without Love, Spineless and Scarlet Red, Beyond The Music) dans la musique des quinquagénaires. On trouvera le morceau de bravoure de l’album avec Spineless And Scarlet Red, pouvant presque être qualifiée de Punk Prog, mais dont la signification des paroles reste obscure. Milo Auckerman rend également hommage à son pote Bill Stevenson à travers Smile (dans laquelle il extériorise ses sentiments sur le combat contre la maladie menée et remportée par Bill) et Comeback Kid, afin de célébrer comme il se doit son retour en pleine forme.
L’album se conclut par Beyond The Music, beau témoignage de l’amitié unissant les quatre compères, au-delà de la musique. Et c’est bien de nous rappeler cela, qu’il existe encore des bandes de potes qui jouent ensemble et que la musique ne se résume pas, pas encore, uniquement à un business où les musiciens se parlent pas avocats interposés. Hypercaffium Spazzinate est un triomphe de la fraîcheur et de la sincérité, en quelque sorte.
A écouter : 1
Voilà ce que c'est qu'un groupe légendaire, c'est un groupe capable de sortir un album original et magnifiquement ficelé après plus de 40 ans de carrière ... Bouffe toi deux tsunami au Sri Lanka et t'aura la sensation de fraîcheur que procure cet album. A posséder absolument (comme tous les autres).