Deathspell Omega
Black Metal
Chaining The Katechon
Chronique
Deathspell Omega ne fait plus seulement du Black Metal mais continue de développer et fouiller sa relation entre l'homme et Dieu. Ainsi, Chaining The Katechon, littéralement "Enchainer le Katechon", c'est capturer et retenir celui qui empêchera la venue de l'AntéChrist. Après Fas-Ite, Maledicti, In Ignem Aeternum, Deathspell Omega livre ici un unique morceau (que l'on peut retrouver dans le split avec S.V.E.S.T.), véritable variation de 22 minutes autour d'un même thème.
Loin d'une progressive montée en puissance présente sur les dernières productions de Deathspell Omega, les français s'élancent sans mise en bouche, piègent l'auditeur dès le premier son. Chaining The Katechon ne fait pas que livrer un black métal gras et haineux, mais s'oriente plutôt, et à son grand honneur, vers une vague plus insidieuse tout en conservant la même base. Les riffs ne sont pas un grésillement enregistré sur un deux pistes mais semblent au contraire se déployer pour emplir l'atmosphère, noircir ce ciel qui vit chuter Icare. Défiant le rythme, défiant la Folie, Deathspell Omega les incarne sous ces multiples changements de plans, envoyant ses cordes s'enrouler autour des poignets pour mieux vous retenir. Cet Ep se veut aussi plus labyrinthique dans sa construction : les riffs se succèdent de manière très claire, mais tout en semant l'auditeur aux détours de multiples notes. Il suffit de jeter une oreille sur le passage central, accalmie presque douloureuse où les sons s'avancent, aveugles, donnant ce sentiment d'être perdu tel Dédale. Plus clair mais aussi plus complexe, Chaining The Katechon ne s'endort jamais et ne s'assimile pas sur une simple écoute, prenant plutôt de l'ampleur au fur et à mesure des lectures.
Exit les passages plus orchestraux comme Obombration, Deathspell Omega va droit à l'essentiel, ne retient plus ses mots tout en évitant de tomber dans une furie sans fin. Plus varié que jamais, Deathspell Omega flirte entre Black et Metal. Sans parler de bouleversement constant, Deathspell sort encore du carcan parfois trop restrictif du Black Metal (par exemple aux alentours des 10m30 ou 14m). Bien moins agressif, il n'en reste pas moins aussi fouillé, empli d'ambiances qui relatent l'histoire du Katechon, ou plutôt son absence. Les trompettes finales pourraient représenter la rupture entre les deux âges, la venue de l'AntéChrist sous un ciel ardent et une mer de sang, tandis que le Katechon, spectateur, pleurerait sur son impuissance via la voix emplie de désespoir. Le groupe continue son ascension dans la famille du Black Expérimental, misant plus sur les ambiances que sur une haine viscérale, à l'instar de Blut Aus Nord, Spektr, ...
Deathspell Omega ravira les personnes pour qui Fas-Ite, Maledicti, In Ignem Aeternum était l'aboutissement de la discographie. Bien que moins long et varié que le précédent album, ce simple Ep révèle une capacité à conserver des univers déjà mis en avant, tout en continuant à creuser encore et encore. Au delà du Black Metal, Deathspell Omega s'aventure de plus en plus loin... Chaining The Katechon est à écouter sans peur de se retrouver enchaîné.
"There is a tear of fire
In the sky of the worlds."
Acheté aujourd'hui, j'en reste sans voix. Ecoutez cette turie. Après ça on peut être fier d'être français quand on a des groupes comme deathspell omega.