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Biographie

Deathspell Omega

Deathspell Omega est l’un de ces groupes de black métal aux mystères plutôt épais. Aucune information concrète n’existe à son propos, et c’est seulement à coup de suppositions que celles-ci sont déductibles.
Le combo est formé en 1998, à priori par Hasjarl et Shaxul après le split de leur ancienne formation nommée Hirilorn. Mikko A, l’homme aux commandes du label Northern Heritage, est le seul membre officiellement connu au sein de Deathspell Omega, qu’il a rejoint en 2003 en tant que vocaliste.

Ce mystère planant autours de la formation - situation presque banale pour le milieu - ne l’empêche évidemment pas, au vu de la qualité de ses disques, de s’être hissé au côté de Blut Aus Nord, au rang de leader de la scène française, en ayant façonné une sonorité bien propre, rejoignant totalement l’esprit de ces derniers : dissonances, ambiances macabres et violences inhumaines semblent être les mots d’ordre pour la musique du groupe.

14.5 / 20
1 commentaire (17.5/20).
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Drought ( 2012 )

Deathspell Omega n'a jamais plus été qu'un groupe de Black Métal. Mystique, Métaphysique, Spirituel et Complexe, le combo français évolue constamment, comme l'hydre de Paracletus dont chaque tête est une personnalité. Drought est rugueux, abrasif, sec, dur. Plus primaire en apparence que les sorties qui ont succédé à Kenose, du fait de rythmiques plus directes, moins tordues. On retombe dans un black plus primaire, moins torturé mais tout autant froid et agressif.
Ce n'est pourtant pas un retour en arrière, mais bien une évolution palpable. Pourtant, personne n'est plus DSO que DSO. Malade, distordu, comme une peinture de Kandinsky en plus noire, avec suffisamment de personnalité pour s'intégrer dans la continuité de Paracletus.

On ne sera pas dépaysé, malgré les volutes plus barbares de ce Drought. Aride, chaud mais terriblement glacial, cet opus recèle de qualités qui se faufilent entre les notes. Comme à chaque fois, il n'est pas aisé d'appréhender et apprécier les titres proposés sur ce court EP. Et pourtant, il s'avère en apparence bien plus simple qu'un Mass Grave Aesthetics ou Chaining The Katechon, comme si DSO avait souhaité, une fois sa trilogie Kenose / Fas - Ite, Maledicti, In Ignem Aeternum / Paracletus clôturée, passer à une nouvelle phase musicale comme le montre le sublime premier morceau "Salowe Vision". Et bizarrement, contrairement à tout ce qu'avait pu sortir l'artiste depuis une paire d'années, quelques passages s'impriment sans difficulté dans l'inconscient ("Fiery Serpents") tandis que d'autres s'échappent rapidement une fois les notes crachées par les enceintes ("Abrasive Swirling Murk"). Surprenant de ne pas se laisser happer en une seule fois par un album de Deathspell Omega...

Aussi sec que le Sahel. Drought, les larmes qui à peine nées s'échappent vers les cieux, laissant le pêcheur seul face à ses regrets. Malgré quelques aspects un peu décevants, encore une sortie de qualité pour Deathspell Omega. Ou devrais-je rajouter "comme toujours" ?

A écouter : Fiery Serpents - Salowe Vision
15 / 20
4 commentaires (15.75/20).
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Paracletus ( 2010 )

En apparence, Deathspell Omega semble avoir atteint son apothéose sur Fas - Ite, Maledicti, in Ignem Aeternum. Cet opus avait en effet un énorme potentiel caché derrière une musique et une réflexion intellectualisée au possible. Avec Paracletus, dernier volet de la trilogie entamée par Kenöse, Deathspell Omega poursuit son voyage initiatique jusqu'aux limites de l'âme : Dissonances, chant guttural, succession sans formes de sons, la musique des français pose en notes ce que certains souhaiteraient sans doute exprimer en mots.
Allant jusqu'aux hurlements infernaux de Phosphene, bien plus malsains et virulents que ne le laisserait présager ce phénomène, l'hydre multi-facettes joue avec l'esprit humain (Devouring Famine) lorsqu'elle ne dévore pas en quelques partitions les dernières parcelles de bien-être qui flottaient autour. Aussi ardent que son artwork, Deathspell Omega ne s'encombre pas d'une ambiance glaciale et préfère lâcher une musique viscérale, bien plus malsaine et épique (Wings Of Predation) lorsqu'elle ne cherche pas les sentiments. Deathspell Omega porte sa voix haut et fort, gronde de manière assommante sur 42 trop courtes minutes. Paracletus se déroule en effet trop vite, titres et mélodies - bien plus présentes - se succèdent sans temps mort et à peine lancé, le disque se termine sur les dernières secondes de Devouring Famine. On n'en retiendra, les premières fois, que quelques bribes de musique, lançant et relançant sans cesse la lecture jusqu'à apprivoiser ce cru 2010.

Depuis les deux derniers LPs, le combo se produit avec une puissance qui ne cesse de s'accroitre, malgré un effet de surprise passé depuis longtemps. C'est un peu le reproche principal de cet album : avoir autant de facettes qui s'imposent et pourtant surprendre assez peu dans l'ensemble. Même si quelques nouveautés font leur apparition (dont le chant en français sur Epiklesis II), la majeure partie de l'œuvre ne surprend pas, Deathspell Omega ayant dévoilé une grosse partie de son jeu sur Kenöse et Fas - Ite, Maledicti, in Ignem Aeternum.
Le débat peut toutefois devenir houleux sur le chant en Français, qui peut au premier abord casser toute l'ambiance posée efficacement sur cet album. Chacun y trouvera son compte, mais l'effet s'avère à double-tranchant, et ce même si les instrumentations qui suivent font rapidement oublier ces passages (les cuivres sur Epiklesis II). Comme toujours, les multiples références aux différentes fois sont légions, que ce soit sur les titres (Epiklesis, Paracletus, Apokatastasis Pantôn, etc) ou via les lyrics, ce qui donne une musique toujours aussi réfléchie derrière ce masque animal. Elle n'est en rien réservée à un groupe spécifique, mais peut s'avérer beaucoup plus difficile à assimiler que certaines récentes sorties plus rentre-dedans.

Fin de la trilogie, Paracletus n'est peut être pas celui attendu par les différentes religions mais la richesse de cet opus dévoile une personnalité intense qui n'a, comme toujours, que faire des barrières.

A écouter : Vous en doutez ?
17 / 20
1 commentaire (18.5/20).
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Mass Grave Aesthetics ( 2008 )

Cet Ep de Deathspell Omega est en fait la réédition en 2008 d'un unique titre de 20min, Mass Grave Aesthetics, issu d'un split avec Malicious Secrets, Antaeus et Mütiilation sorti en 2005. Situé entre Si Monumentum Recquires Circumspice et Kénôse dans la discographie du groupe, ce titre fait office de transition entre les deux disques.

Le morceau débute par une intro grésillante, aux bruits suspects mettant dès le départ l'auditeur mal à l'aise, puis viennent se greffer à cela les instruments d'une lourdeur étouffante. Un début pesant, écrasant presque par sa grandiloquence, puis tout s'accélère d'un coup d'un seul. Les riffs glissent, rampent, se faufilent, sont sinueux tel un serpent se jetant sur sa proie. Il dévore les entrailles, les broie, les réduit en charpie, du moins au départ, car sa véritable cible est ailleurs. Second attaque, au cerveau, comme un lent poison qu'on injecte pour que l'auditeur en devienne addictif. Tout se passe très rapidement, si bien qu'on n'a pas le temps de véritablement comprendre ce qui se déroule à l'écoute. Interlude.
Deathspell Omega s'offre même le luxe d'un court passage d'un Drone grondant devenant Noise aliénante. Malsaine et terrifiante, autant qu'hypnotisante elle permet  également au groupe de repartir sur ces riffs lancinant, presque poisseux et cette voix qui possède elle aussi sa proie. En effet, les paroles sont à la hauteur de la grandeur de ce Mass Grave Aesthetics, comme le montre ce cour extrait :
« Corruption is the spiritual cancer reigning in the depths of things
And it fills until the last cell of my vivid being
Dissolution and putrefaction, prevailing Aesthetic experience,
The splendor of the obscene and inhuman »
Sons distordus, les français se jouent des sonorités comme le chat joue avec la souris et rappellent d'ailleurs celles de leur compatriote français de Blut Aus Nord sur Mort, par exemple. Les riffs s'enroulent, se déroulent tel l'ouroboros. Tout s'enchaine, est parfaitement logique, puis revient au départ, comme un cycle recommençant inlassablement pour l'éternité. Pourtant, même Deathspell Omega se joue de ses structures prétendument établies et les brises ou les complexifies comme en témoigne le jeu de batterie ou cette basse vrombissante qui semble sortir de nulle part aux alentours de 13min. Quelques parties plus atmosphériques viennent en milieu de titre mais tout vient à s'écrouler par des râles possédés surgissant de ces structures alambiquées qui reprennent presque aussitôt. L'apocalypse touche à sa fin, le rythme se ralentit, concluant sur des chœurs d'opéra fantomatiques en apothéose d'un long voyage au cœur des ténèbres.

Mass Grave Aesthetics, découpé en plusieurs parties distinctes pour autant d'explorations musicales, va bien plus loin que l'essence même du Black-Metal, et nous offre un voyage dense, complexe et pourtant extrêmement cohérent. Que dire au final sur ce disque, si ce n'est qu'on est comme happé par de telles sonorités et de telles atmosphères, possédé d'un bout à l'autre de ces 20min comme dans un état second. Deathspell Omega signe là une œuvre aussi terrifiante qu'addictive et dans tous les cas l'œuvre d'un grand groupe de Black-Metal.

A écouter : en entier, forc�ment
16.5 / 20
1 commentaire (18/20).
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Chaining The Katechon ( 2008 )

Deathspell Omega ne fait plus seulement du Black Metal mais continue de développer et fouiller sa relation entre l'homme et Dieu. Ainsi, Chaining The Katechon, littéralement "Enchainer le Katechon", c'est capturer et retenir celui qui empêchera la venue de l'AntéChrist. Après Fas-Ite, Maledicti, In Ignem Aeternum, Deathspell Omega livre ici un unique morceau (que l'on peut retrouver dans le split avec S.V.E.S.T.), véritable variation de 22 minutes autour d'un même thème.

Loin d'une progressive montée en puissance présente sur les dernières productions de Deathspell Omega, les français s'élancent sans mise en bouche, piègent l'auditeur dès le premier son. Chaining The Katechon ne fait pas que livrer un black métal gras et haineux, mais s'oriente plutôt, et à son grand honneur, vers une vague plus insidieuse tout en conservant la même base. Les riffs ne sont pas un grésillement enregistré sur un deux pistes mais semblent au contraire se déployer pour emplir l'atmosphère, noircir ce ciel qui vit chuter Icare. Défiant le rythme, défiant la Folie, Deathspell Omega les incarne sous ces multiples changements de plans, envoyant ses cordes s'enrouler autour des poignets pour mieux vous retenir. Cet Ep se veut aussi plus labyrinthique dans sa construction : les riffs se succèdent de manière très claire, mais tout en semant l'auditeur aux détours de multiples notes. Il suffit de jeter une oreille sur le passage central, accalmie presque douloureuse où les sons s'avancent, aveugles, donnant ce sentiment d'être perdu tel Dédale. Plus clair mais aussi plus complexe, Chaining The Katechon ne s'endort jamais et ne s'assimile pas sur une simple écoute, prenant plutôt de l'ampleur au fur et à mesure des lectures.

Exit les passages plus orchestraux comme Obombration, Deathspell Omega va droit à l'essentiel, ne retient plus ses mots tout en évitant de tomber dans une furie sans fin. Plus varié que jamais, Deathspell Omega flirte entre Black et Metal. Sans parler de bouleversement constant, Deathspell sort encore du carcan parfois trop restrictif du Black Metal (par exemple aux alentours des 10m30 ou 14m). Bien moins agressif, il n'en reste pas moins aussi fouillé, empli d'ambiances qui relatent l'histoire du Katechon, ou plutôt son absence. Les trompettes finales pourraient représenter la rupture entre les deux âges, la venue de l'AntéChrist sous un ciel ardent et une mer de sang, tandis que le Katechon, spectateur, pleurerait sur son impuissance via la voix emplie de désespoir. Le groupe continue son ascension dans la famille du Black Expérimental, misant plus sur les ambiances que sur une haine viscérale, à l'instar de Blut Aus Nord, Spektr, ...

Deathspell Omega ravira les personnes pour qui Fas-Ite, Maledicti, In Ignem Aeternum était l'aboutissement de la discographie. Bien que moins long et varié que le précédent album, ce simple Ep révèle une capacité à conserver des univers déjà mis en avant, tout en continuant à creuser encore et encore. Au delà du Black Metal, Deathspell Omega s'aventure de plus en plus loin... Chaining The Katechon est à écouter sans peur de se retrouver enchaîné.

"There is a tear of fire
In the sky of the worlds."

A écouter : Oui.
17 / 20
5 commentaires (17/20).
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Kénôse ( 2005 )

Comme d’effroyables spasmes, une sorte d’assèchement aux allures de renaissance, vous voici entrés dans la Kenôse, une expérience malsaine, mais inévitable, de laquelle découleront des faits troublant. Ce terme, d’origine grec, désigne la voie par laquelle le Christ perdit ses attributs célestes pour venir rejoindre l’humanité et en mesurer l’horreur. Sorte de chute inéluctable où une métamorphose profonde et désagréable touchera le Seigneur, entrecoupée d’inespérées et fragiles atténuations, à l’inverse de sa résurrection si glorieuse et triomphale qui le mettra sur un piédestal.

Deathspell Omega offre donc un disque décrivant cette chute si nécessaire, dont on subira les effets en trois mouvements, sobrement nommés, comme il est souvent de mise dans le black métal, par des chiffres romains. I s’ouvre donc par ces fameuses convulsions, annonçant sans aucun doute une situation des plus inquiétantes, ou tout du moins inconnue. De sombres et interminables échos vous parviennent ; alors qu’ils vous semblaient lointains, ils sont à vous, soutenus par de dissonantes mélodies. Une voix familière se glisse à votre oreille, elle semble traumatisée, exténuée, elle veut vous transmettre un message, mais sa fébrilité l’interrompt. Les marques s'effacent, les ténèbres entrent en action, comme une puissante force qui plonge dans une torpeur glissante. Déjà vous recevez de violents heurts qui à chaque fois vous semblent fatals et bientôt un torrent de cruauté vous possède en vous entraînant dans une spirale funeste.
Celle-ci se vêt d’une robe noire à l'apparence incommodante qui, même s’il est impossible de la comprendre finement sans l’avoir ressentie, se rapprochera évidemment de la musique de Deathspell Omega connue, à savoir un black métal crade au possible et à la violence inouïe. Une production très grandiloquente dramatise de surcroît l’ensemble, avec de légers effets de reverb, donnant l’illusion d’une résonance telle que l’on en aurait dans une phase de fièvre délirante. Au cours des trois titres constituant la Kenôse, Deathspell Omega alterne entre la violence de son raw black toujours dissonant et bourdonnant, et des ambiances transitoires, parfois au tempo plus posé qui donnent un relief instruit à l’ensemble. Ces discordants arpèges soutenus par une batterie somme toute assez bien mise en place permettent de retrouver cette fameuse voix, celle qui nous avait accueilli. Toujours douceâtre, elle montre sa véritable face sournoise et abjecte et c’est lors des passages les plus virulents qu’elle se transforme en incarnation du mal, en partie à cause d’un timbre oscillant naturellement entre profond guttural death et violence aiguë plus affiliée au black métal en lui même. Mikko donne ici l’illusion parfaite d’un état de mutation physiologique collant parfaitement à la thématique choisie et l’on subit la violence de celle-ci de plein fouet : batterie supersonique, mur de guitare imposant et parfaitement bien agencé, basse discrète mais pourtant très grasse, le tout bénéficiant d’une remarquable production.
Comme souvent dans les styles extrêmes, l’ennui pourrait guetter l’auditeur, mais qu’il n’oublie pas qu’il est en train de subir l’incarnation musicale d’une transmutation profonde et ignoble. La Kenôse s’en retrouve pleine de rebondissements, toujours bien arrangés et inattendus au cours de ses trois titres, et c’est sans le moindre problème que l’on passe de état d’apaisement psychique (la fin de II notamment) à un malmenage insupportable, ou d’ambiances pesantes très doom à un black mid-tempo rappelant souvent Blut Aus Nord (III).
 
En 36 minutes, Deathspell Omega remplit donc parfaitement son pari d’incarnation de cette fameuse Kenôse, par une interprétation des plus spectaculaires et épique. S’inscrivant parfaitement dans l’œuvre du groupe, ce disque saura contenter les amateurs des précédents opus. Attention pourtant, il se révèlera totalement insupportable voire incompréhensible pour un non-initié au genre, et son accessibilité reste très relative, en témoigne la thématique choisie et la manière dont elle est traitée. Espérons qu’après cette réussite, Deathspell Omega aura la bonne idée de continuer dans les thématiques relatives au Christ. Ne lui reste plus qu’à affronter son épreuve la plus difficile : le contact avec l’humanité. 

 

A écouter : en entier