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Biographie
Trio de Liverpool Dawn Ray’d est un groupe de Black anarchiste fondé sur les cendres du groupe de Post-Hardcore / Screamo / Black Metal, We Came Out Like Tigers par Matthew B. (Batterie), Fabian D. (Guitare) et Simon B. (Chant / Violon). Leur premier ep, A Thorn, A Blight, sort en 2015 sur Halo Of Flies et Moment Of Collapse Records, mais c’est avec leur premier album, The Unlawful Assembly, qui sort deux années plus tard, qu’ils attirent véritablement l’attention sur leur mélange de Folk et de Black Metal revendicatif. En 2019 le groupe passe le cap du second disque avec Behold Sedition Plainsong qui sort chez Prosthetic Records. En septembre 2023, quelques mois après la sortie de To Know The Light, le groupe, alors en pleine tournée se sépare.
Fuck every copper that ever took a wage Every blue bastard with his baton raised A beast that even his master hates Only a coward fights for the state
Dans l’éventualité où un improbable doute subsisterait, les pendules sont remises à l’heure dès The Battle Of Sudden Flame : ne comptez pas sur Dawn Ray’d pour mettre de côté leurs convictions anarchistes, antifascistes, féministes et pro-trans et queer. Le groupe n’a pas fait varier d’un pouce son dogme initial : chanson sera politique ou ne sera pas, peu importe si cela ne plait pas.
There is nothing in these songs Of which to be ashamed Everything we sing about I would just as plainly say
N’y allons pas par quatre chemins : To Know The Light restera le meilleur album de la discographie de Dawn Ray’d. Comme je l’avais alors écrit, il manquait un ingrédient à Behold Sedition Plainsong pour un en faire un grand disque. Cet ingrédient, c’était peut-être tout simplement le temps. Acquérir la capacité de pouvoir faire évoluer sa formule de base, surtout lorsqu’elle est atypique, n’est pas immédiat. Légion sont les formations qui n’arrivent jamais à passer ce cap et qui se retrouvent confinées dans un espace d’expression étriqué consistant en l’éternelle reproduction édulcorée de la même recette.
Ce troisième LP donne l’impression d’une prise de conscience que l’innovation ne passerait pas par les tremolos mais par l’élargissement du spectre et l’affirmation des influences guidant la formation. En résulte des compositions bien plus variées que par le passé et des partis pris affirmés. Le principal d’entre eux concerne la dimension Folk qui est ici éclatante avec Requital et Feedom in Retrograde, entièrement en chant clair et tenant (forcément) plus de l’hymne révolutionnaire que de la ballade romantique. Habités, ces morceaux donnent un supplément d’âme à l’album et en sont donc un point fort, ce qui était loin d’être une évidence. L’immixtion du chant clair ne se limite pas à ces deux pièces. On le retrouve à de multiples moments, notamment au travers des chœurs empruntant au passé Screamo de la formation. Il n’y a pas que le Folk qui transparait à l’écoute : les influences Crust ou Hardcore, comme sur la section rythmique du brûlot Inferno, sont évidentes. Mais que les amateurs de blasts ne s’inquiètent pas : To Know The Light va également plus loin que ses prédécesseurs dans la violence de certains passages. Porté par un Simon Barr des plus hargneux et mis en lumière par de nombreux breaks, certains passages, comme sur Sepulchre (Don’t Vote) sont parmi les plus durs que Dawn Ray’d n’ait jamais joués. En miroir, le ralentissement du rythme, qui se fait martial sur In The Shadow of the Past, donne une dimension inédite à certains titres qui ne se contentent plus du « Play Fast, Play Hard ».
Et le violon dans tout ça ? J’aurais pu ne pas en parler. Ce qui aurait peut-être été vu comme un oubli majeur, tant la présence d’un violon dans un groupe de Black reste charismatique, est le signe d’un accomplissement : ses sonorités sont désormais parfaitement intégrées dans les compositions et ne font plus bande à part. Complémentaire des riffs de guitare (The Battle of Sudden Flame, Go As Free Companions) ou principal acteur de passages plus apaisés (la rupture dans Wild Fire), le violon est devenu une composante organique de la musique de Dawn Ray’d.
Avec cet album inspiré et inspirant, la logique voudrait que l’avenir musical de la formation de Liverpool s’annonce radieux. La réalité est bien plus sombre : Dawn Ray’d n’est plus. Le trio a brutalement décidé de raccrocher guitares et violon le 15 septembre dernier, après 8 années d’existence, considérant que ce groupe ne correspondait plus à leurs aspirations artistiques et politiques. Plutôt que de se lamenter sur le gâchis de cette séparation, réjouissons-nous plutôt de ce que les anglais nous ont apporté : trois LP de qualité, des messages et des combats dissonants dans le paysage habituel du Black Metal et des prestations scéniques dantesques, pleines d’énergie et d’authenticité
I still will fight for freedom for every living thing.
To Know The Light s'écoute en intégralité sur bandcamp.
Dawn Ray’d : trio de Liverpool jouant du Black Metal, incorporant en son sein un violon et avec un certain penchant pour les mélodies Folk /d’inspiration médiévales.
Bien qu’elle soit factuellement conforme à la réalité, cette définition ne saurait être plus trompeuse. Là où on s’attendrait à trouver de l’épique, du mélodique, du chevaleresque on découvre plutôt un concentré de rage revendicative transcription de revendications anarchiques. Mais ce n’est pas pour autant que lesdites mélodies au violon sont absentes de Behold Sedition Plainsong, bien au contraire. Sans être systématiques, celles-ci émaillent l’ensemble de l’album depuis son introduction Raise the Flails jusqu’aux dernières secondes de The Curse, The Dappled Light et sont indéniablement un des marqueurs du trio. Pas le seul. Les autres éléments de la musique de Dawn Ray’d viennent en effet se confronter on ne peut plus frontalement avec la douceur du violon, à commencer par le chant de Simon Barr. Plein d’agressivité, celui-ci est le support de revendications bien actuelles que l’on imagine scandées le poing levé. Les thèmes abordés par les anglais s’inscrivent dans les grandes luttes actuelles, celles contre les politiques nationalistes (« Burn their deportation orders! »), les scandales de pédophilie dans l’Eglise (« A bullet for the homophobic priests ») ou encore les dérèglements climatiques (« I wonder if the animals know something's wrong »). La guitare, avec ses riffs nerveux, et la non moins agitée section rythmique sont au diapason faisant plus que contribuer à la virulente âpreté des morceaux qui portent en eux une énergie Punk Hardcore.
Behold Sedition Plainsong n’est cependant pas parfait. Succéder à The Unlawful Assembly s’annonçait dès le départ comme une tâche ardue. Il faut accorder aux liverpuldiens qu’ils s’en sortent remarquablement mais, dans l’ensemble, les compositions sont parfois un poil en dessous de celle du LP précédent, notamment du fait d’un violon peut-être un peu moins présent mais surtout moins intégré. Là où ses mélodies étaient totalement imbriquées avec le reste, ici elles forment souvent des passages distincts, des ponts entre deux déferlements. On a également l’impression que Dawn Ray’d a sur cet album privilégié la hargne à la mélancolie (les deux composantes sont toujours présentes mais dans des proportions différentes). Enfin, une certaine forme de répétition peut également se faire ressentir sur la durée sans que cela ne soit pour autant rédhibitoire.
Que ce paragraphe dédié à la recherche des défauts de Behold Sedition Plainsong ne vienne pas vous en détourner : celui-ci fait bien partie des albums de l’année à côté desquels il ne faut pas passer, ne serait-ce que le temps d’une écoute. Pour finir, dès que vous en avez l’occasion, je vous engage à voir Dawn Ray’d en concert tant, à l’image d’un Mantar, c’est sur scène que la musique du trio prend toute son ampleur. Rien que pour voir Simon Barr passer en permanence d’un instant à l’autre de la rage à la minutie demandée par le maniement de l’archet ou encore pour se rendre compte que c’est bien sur l’alchimie entre la batterie, la guitare, le violon et le chant que repose chaque composition.
Behold Sedition Plainsong s'écoute en intégralité sur bandcamp.
A écouter : Like Smoke Into Fog, To All, To All, To All!, Until the Forge Goes Cold
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