Cobra Noir c'est l'obscure désillusion aux pieds de ruines encore fumantes, la marche inexorable vers un gouffre ouvert comme une cicatrice béante, le glas pour notre ère se pousuivant par la construction de ces Barricades. Avec Abode of the Dead, Cobra Noir avait déjà de manière très personnelle défini un son pessimiste, rampant dans l'obscurité, à la croisée du hardcore, du punk, du crust et du metal pour un résultat alliant élégance et efficacité. La courte galette (à peine 25 minutes) contient même quelques morceaux inoubliables comme l'entêtant "Lazarus" ou le haineux "Eucharist". Rien que ça !
Sur ce nouvel album, Cobra Noir joue toujours du Cobra Noir mais les gaziers ont décidé de s'enfoncer encore plus loin dans la boue et le goudron suintant qui clouent les pieds au sol. Si auparavant le groupe enchaînait tête baissée des brûlots hardcore aux rythmes rapides mais déjà relativement ralentis par rapport aux combos de même obédience (Tragedy et cie), les riffs traînent et raclent le sol désormais encore un peu plus dans un souci de lourdeur et de présence accrue. L'atmosphère qui en résulte se veut aride et s'ancre définitivement en nous au fil des écoutes, on en ressort vidé, la bouche asséchée par tant de rancoeur. Malgré cet aspect pachydermique, le serpent ne s’est pas empâté, loin de là. Si ses mouvements se veulent plus lents, ses attaques en sont d'autant plus vives et imprévisibles. Puis cet alliage sans pareil de cordes rasantes et virevoltantes, graves et aigues, tapies au sol et plongeantes depuis un ciel sombre et sans espoir, est tout simplement imparable sur la quasi totalité des titres.
Mis à part le morceau vindicatif et immédiat qu'est "Monuments", Barricades est un disque moins percutant que son prédécesseur mais dont la force réside dans le climat nettement plus travaillé et aux atmosphères pesantes et prononcées. Sur le long terme, le choix se révèle payant et témoigne d'une certaine maturité dont l'équilibre atteint entre puissance et tempo en est le pilier. Notons également la classe du packaging qui prend toute son ampleur sur la version vinyl de l'objet (dont un second pressage est en cours). De quoi se mordre les doigts jusqu'à la sortie des splits CD avec The Holy Mountain et Last Days.
A écouter : Cobra ta face !!!