logo Chelsea Wolfe

Biographie

Chelsea Wolfe

Chelsea Wolfe commence à composer dans le studio paternel, à Sacramento. Elle enregistre deux albums (Mistake In Parting et Soundtrack VSH II) et un EP (Tour 2009), qui ne sortiront pas car elle ne pense pas avoir assez de talent. Après un hiatus durant lequel elle intègre une troupe d'artistes itinérants, elle prend goût à la représentation, et retrouve la motivation nécessaire pour composer. Résultat, son véritable premier album voit le jour en 2010, intitulé The Grime And The Glow, qui fait beaucoup parler de par son style véritablement singulier, entre Pop, Black Metal, expérimentations et Rock Gothique.
En 2011, elle déménage à Los Angeles pour enregistrer son deuxième album, intitulé Ἀποκάλυψις, qui sort chez Pendu Sound. Son mélange de Doom, de Darkwave et de tant d'autres choses remporte un franc succès. Elle tourne ensuite beaucoup, aux Etats-Unis comme en Europe, ce qui lui permet au passage de surmonter sa peur panique de la scène. Point d'orgue de ces mois passés sur la route, une  apparition au Roadburn en 2012, immortalisée par la sortie d'un live quelques mois plus tard. Elle signe la même année chez Sargent House pour la sortie de son troisième opus, intitulé Unknown Rooms : A Collection Of Acoustic Songs qui, comme son nom l'indique, présente une facette plus calme de l'artiste.

En septembre 2013, Chelsea Wolfe sort son quatrième album, Pain Is Beauty, sur lequel elle se tourne cette fois vers des contrées plus électroniques. A noter qu'une tournée en compagnie de Russian Circles, qui l'a invitée à chanter sur un titre de son prochain album, est prévu pour la fin de l'année. A noter que l'artiste participe à quantité de projets et multiplie les EPs divers et variés, notamment un album en hommage à Rudimentari Peni, intitulé Prayer For The Unborn ou des collaborations avec King Dude. En 2015 elle confirme son talent et son goût pour une musique sans pareille avec la sortie de l'album Abyss. Deux ans plus tard et toujours accompagnée par Ben Chisholm, Chelsea Wolfe sort Hiss Spun, sixième album, enregistré au studio GodCity avec la participation de Troy Van Leeuwen (Queens of the Stone Age) à la guitare et Aaron Turner (Old Man Gloom) au chant sur le titre Vex.

16.5 / 20
19 commentaires (14.76/20).
logo amazon

Hiss Spun ( 2017 )

La préparation est arrivée à maturation, après avoir baigné deux pleines années au fond de l’océan, faisant continuellement chavirer les cœurs à la surface, les âmes maintenues dans l’euphorie par la pression des courants. Hiss Spun émerge des eaux en 2017 et s’échoue sur les plages escarpées de nos récepteurs. Chelsea Wolfe nous apparaît recroquevillée au centre du néant, telle une créature humanoïde en proie à ses démons, dont elle ne cherche absolument pas à se défaire.

Spun se tortille sur le sable humide, dévie de sa trajectoire jonchée de larsens et de lourdeur saturée. La chose peine à se mouvoir, engluée dans une étrange vase, obstacle récurrent pour une voix d’abord enfouie sous les parasites, mais qui se revitalisera au fur et à mesure du dédale dépressif qui s’offre à nous. Ainsi Chelsea Wolfe entame son parcours qui ne consiste pas à se « guérir » mais plutôt à apprivoiser le mal qui semble la ronger. 16 Psyche réhabilite la perdition par ses guitares sinueuses et sa batterie aérienne, pour mieux s’engager dans la claustrophobie du tunnel Vex, tapissé des râles  inhumains d’Aaron Turner (ex-Isis, Old Man Gloom), tandis que The Culling prend le temps de nous installer sous une lumière blafarde faussement apaisante, ou que Particle Flux nous martèle son pouls de plus en plus rapide, traduction physique d’une angoisse à géométrie variable.

Accompagnée ici de la six cordes de Troy Van Leeuwen (Queens of the Stone Age), Chelsea Wolfe expose sa noirceur à vif, torture sa conscience autant que la notre, processus nécessaire pour se libérer d’un monde plongé dans le déni et la violence absurde. Le corps et l’esprit communiquent dans la douleur, entretiennent un conflit permanent mais salvateur dont Twin Fawn serait l’incarnation musicale la plus précise, par sa lente progression d’une forme de sérénité vers le purgatoire, où la rage intérieure déborde et marque l’enveloppe corporelle pour l’éternité. Plus loin Static Hum nous enchantera tout en instillant la nausée, par une démarche ample mais incertaine, vertigineuse, chaque pas flirtant avec le vide. L’incantatoire et acoustique Two Spirit tentera alors de nous encourager au lâcher prise, dans la perspective d’une issue positive, avant la désillusion finale Scrape, réactivant la valse des indécrottables démons.

Dans la continuité d’Abyss, Hiss Spun développe et s’accommode de la dépression de sa génitrice pour en extraire et modeler une force nouvelle. Chelsea Wolfe ensorcelle, met nos états d’âme à l’épreuve, nous défie de résister à la tentation de la noirceur et nous embarque dans un labyrinthe émotionnel, néanmoins pensé avec méthode architecturale, afin que la sortie nous paraisse plus évidente à chaque visite.

Hiss Spun Bandcamp.

A écouter : Oui.
16.5 / 20
19 commentaires (16.39/20).
logo album du moment logo amazon

Abyss ( 2015 )

Voilà maintenant quelques années que Chelsea Wolfe prend un malin plaisir à brouiller les pistes. Neuf ans après la sortie de son premier album, la californienne se plait à surprendre un auditoire qui attend avec toujours plus d’impatience ses nouvelles pérégrinations, quelque part entre un Rock Gothique et une Folk à la limite de la Musique Industrielle. Abyss vient confirmer tout le bien que l’on était en droit d’attendre de cette artiste hors du commun.

Avec ses deux derniers albums -Apokalypsis en 2011 et Pain Is Beauty en 2013- Chelsea Wolfe est parvenue à fédérer les amateurs de musiques aventureuses de tout bord. Il faut dire que la simple écoute d’une œuvre de l’Américaine permet de mettre les points sur les i. Particulièrement difficile à catégoriser, l’œuvre de Chelsea Wolfe va aussi bien chatouiller les esgourdes des amateurs de musiques alternatives expérimentales que celles du plus fervent metalleux. Ce n’est d’ailleurs pas sa récente collaboration avec les excellents Russian Circles qui nous fera dire le contraire. L’américaine fait partie de ces artistes pouvant se targuer de n’avoir sorti aucun mauvais album en presque dix ans de carrière et pas moins de cinq efforts discographiques. Dans cette marche effrénée vers l’intemporalité, Abyss se positionne comme étant l’avènement d’un génie en pleine force de l’âge. Car cela ne fait guère de doute : il s’agit bien ici de son œuvre la plus aboutie.  

Aux grands maux les grands remèdes. Chelsea Wolfe poursuit ici sa quête d’inventivité en incorporant une nouvelle teneur Doom Rock des plus affriolante. Imaginez vous deux secondes ce que donnerait la rencontre entre Jarboe, Beth Gibbons (Portishead), Pharmakon et Earth (Oui oui, le groupe de Drone) pour obtenir le premier bout d’un fil d’Ariane bien utile face à cette effervescence de tous les instants.
Dès le début, le ton est donné. Carrion Flowers et sa rythmique alambiquée fait allègrement vrombir ses assauts Electro-Indus tandis qu’Iron Moon et Dragged Out viennent assommer l’auditeur non averti du poids de guitares plombées. Cette lourdeur s’explique notamment par la présence d’invités tels que D.H Phillips de True Widow mais aussi Mike Sullivan de Russian Circles. Du beau monde donc, notamment lorsque l’on connaît la qualité respective de ces deux groupes.
Si nous préfèrerons la première partie, globalement l’album surprend par sa maturité et son ingéniosité. Les productions regorgent en effet de cuivres, d’effets diverses et autres joyeusetés que l'on prend un malin plaisir à débusquer. Alternant ballades Darkwave et envolées Electro-Doom-Indus, Chelsea Wolfe frappe à la porte du royaume des bizarreries avec fracas.

Abyss est l’aboutissement d’une démarche créative entamée depuis plusieurs années. Jamais la californienne n’avait été aussi percutante et à propos. C’est maintenant chose faite avec cet album qui, à n’en pas douter, fera date dans cette déjà très belle discographie.

14.5 / 20
9 commentaires (16.56/20).
logo amazon

Pain is Beauty ( 2013 )

 Se voir confier la première partie de la prochaine tournée nord-américaine des Queens of the Stone Age n’est qu’une preuve supplémentaire de la reconnaissance de plus en plus unanime du talent de Chelsea Wolfe. Après avoir profondément marqué son monde en 2011 avec le joyau d’obsidienne qu’était Apokalypsis puis dévoilé avec brio une facette plus dépouillée sur Unknown Rooms l’année suivante, ce Pain is Beauty, annoncé comme un album aux penchants électro, devrait en toute logique définitivement asseoir la réputation de Chelsea Wolfe en tant qu’artiste parmi les plus intéressants du moment.

  L’annonce de la sortie de Pain is Beauty aurait pu laisser perplexe ; difficile en effet de voir comment la noirceur plombée d’Apokalypsis, que certains dans leur emballement n’ont pas hésité à qualifier de ‘doom folk’ (iiitch), ou le minimalisme émouvant d’Unknown Rooms pourraient se conjuguer à des expérimentations électro. Et pourtant ça fonctionne, sans que cela ne soit une réelle surprise pour quiconque connaissant la discographie toute en expérimentations de Chelsea Wolfe

  Ces éléments électro sont bien présents, sans pour autant être omniprésents ; effets plutôt discrets, ils soutiennent à merveille les facettes plus familières de Chelsea Wolfe, du sombre "Feral Love" qui aurait eu sa place sur Apokalypsis à l’émouvant "We Hit a Wall", semblant s’être échappé d’Unknown Rooms, ou encore l’ovni lo-fi qu’est "Destruction Makes the World Burn Brighter", qui rappelle les premières heures de l’artiste sur The Grime and the Glow. Pourtant Chelsea Wolfe sait véritablement surprendre, à l’image de "The Warden" et son beat électro entraînant à la mélancolie poisseuse, qui évoque (toutes proportions gardées) ce qu’on peut ressentir à l’écoute des premiers Boards of Canada. Assurément un des titres de l'année.

  Globalement, les quelques doutes éventuels sont largement dissipés dès les premières minutes : écouter Chelsea Wolfe, c’est toujours comme s’allonger dans un lit de coton, mais du coton noir, et se faire bercer par cette voix magnifiquement éthérée, lancinante, presque suppliante, et immédiatement reconnaissable, qui chante la douleur, la tristesse, le désespoir d’une façon si personnelle. Oui, la douleur peut être synonyme de beauté, comme le prouve le brumeux "House of Metal", qui invite à s’allonger et se laisser porter par la mélancolie.

  Toutefois, cet album aurait été parfait s’il avait été plus concis. Sans toutefois aller jusqu’à l’extrême brièveté de son prédécesseur, Pain is Beauty aurait dû se limiter à ses six premiers titres. En effet, passé la moitié de l’album, il devient plus difficile de rester focalisé sur l’écoute, la faute à des titres plus longs, moins originaux, moins intéressants ("Kings", "Reins", "They Will Clap when You’re Gone", "The Waves have Come"). Sans pour autant être mauvaise, cette seconde partie d’album aurait sans doute dû comprendre uniquement les deux seuls titres ayant un véritable intérêt, à savoir "Ancestors, The Ancients" et sa lourdeur écrasante où une guitare électrique vient même se balader, ainsi que le beau final tout en fragilité de"Lone". 

  Au final, Chelsea Wolfe démontre encore une fois, avec "Pain is Beauty", sa capacité à se réinventer. Si ce disque n’est pas parfait, il mérite, grâce à sa première partie, de figurer parmi les meilleures sorties de l’année, et celui-ci devrait placer pas mal de titres dans les playlists spécial 2013. Ce ne serait que justice pour une artiste dont l’immense talent semble enfin être reconnu. Et il paraîtrait même qu’elle serait présente sur un album dont tout le monde parle, un truc à base de cercles russes…

A écouter : La première partie !