Mingus Mingus Mingus Mingus Mingus est un disque à part dans la discographie du contrebassiste dans la mesure où il ne comporte qu'une seule nouvelle composition (Celia). Après l'unanimement acclamé The Black Saint and the Lady Sinner Mingus semble faire le point sur sa carrière en réenregistrant ses meilleurs titres sur un seul et unique album sur lequel figure également une reprise de Mood Indigo de Duke Ellington, son musicien préféré.
Le disque s'ouvre sur II B.S, qui est en fait une version accélérée de la célèbre Haitian Fight Song (The Clown) bénéficiant également des apports du grand Eric Dolphy au saxophone. La contrebasse se promène en Walking Bass tout du long fournissant un sacré groove au titre et ce ne sont certainement pas les cuivres déchaînés fusant de toute part qui iront dans le sen contraire. Même chose pour Better Get Hit In Yo' Soul qui un réarrangement de Better Git Hit In Your Soul (Mingus Ah Um) où il faut vraiment s'accrocher pour suivre le rythme.
Au contraire II B.S Hora Decubitus ralentit un tantinet le tempo de l'originale – E's Flat, Ah's Flat Too (Blues & Roots) – mais bénéficie encore une fois d'une ré-orchestration plus fouillée à travers ses nombreux cuivres. La chanson reste tout de même sacrément rapide et le riff d'introduction de Mingus avec ses glissés apparaît plus puissant que jamais. L'avantage d'être leader d'un groupe c'est que l'on peut imposer son instrument sans problème, et Mingus ne se gêne pas en mettant bien en avant sa contrebasse.
Les autres titres sont plus lents, I X Love et ses cuivres si emplis de tristesse en tête, même si la reprise de Duke Ellington n'est pas loin derrière grâce au talent du pianiste Jaki Byard. Et que dire du magnifique Theme For Lester Young, version alternative de Goodbye Pork Pie Hat (Mingus Ha Um), musique reprise maintes et maintes fois qui est sans doute l'une des plus belles ballades jamais écrites, et ce tout genre confondu. Peu de musique s'accroche à l'âme autant que celle-ci. Six minutes d'une intense émotion distillée au compte goutte par un ensemble de musiciens au sommet de leur art.
Le disque s'achève sur une chanson toute particulière dans la discographie de Mingus puisqu'elle non seulement chantée (même si narrée sera le terme plus exact), mais aussi parce qu'elle reprend des sonorités et rythmes employés par les Noirs pendant l'esclavage. Mingus a toujours lutté contre le racisme et cette ultime musique intitulée Freedom est comme son nom l'indique une ode à la Liberté. Les choeurs sont véritablement envoûtants et la voix de Mingus hypnotique. L'arrivée de la batterie puis des cuivres déchirants l'ambiance oppressante créée précédemment par les voix annonce la rupture entre la narration et la partie Jazz endiablée.
L'intérêt principal de Mingus Mingus Mingus Mingus Mingus c'est qu'il regroupe quelques uns des plus grands morceaux d'un jazzman incontournable solidement épaulé en la personne d'un autre grand nom, Eric Dolphy. Le son est également bien meilleur avec une contrebasse nettement plus appuyée.
Entre morceaux déjantés et langoureuses ballades, Mingus Mingus Mingus Mingus Mingus est un disque idéal pour aborder le contrebassiste, ou même tout simplement le Jazz à travers un bon nombre de classiques.
A écouter : En entier bien sûr