Nous sommes en 2012. Tout le monde en a soupé du Post-Rock. D'ailleurs, la flamme s'éteint et seuls restent les inébranlables, les pierres angulaires et les derniers pousses, ceux qui ont su grandir dans la masse comme And So I Watch You From Afar, Red Sparowes ou Immanu El, pour n'en citer que quelques-uns. Parmi eux : Caspian.
Il faut garder espoir. Il y a dans cette nouvelle mouture de Caspian quelque chose qui donne envie d'y croire. Quelque chose de beau. De simple et de beau. Peut-être une ligne de mire que beaucoup de groupes (et d'auditeurs) ont perdu de vue. Caspian renoue avec le Post-Rock qui sait nous toucher, dès les frémissements du titre éponyme avec cette magnifique mélodie au piano touchée par la grâce. Il est le parfait exemple d'une musique chargée émotionnellement, ni tout à fait triste, ni tout à fait joyeuse, qui laisse l'auditeur à son propre ressenti, selon son état d'esprit du moment.
Waking Season, rayonne, file tout droit vers la lumière, s'élève vers les hautes sphères (Porcelous) et tutoie les nuages parce qu'il y a dans cet album une résonance à la subtilité et au côté évanescent qu'on aimait dans They'll Come, They Come d'Immanu El. Caspian, voit plus large, côtoie de nouveaux espaces et sait rendre sa musique vivifiante, jamais ennuyante comme sur l'incroyable Gone In Bloom And Bough, de 10min, pièce maîtresse de ce Waking Season. Ce dernier recèle justement d'une profondeur insoupçonnée, de motifs et d'harmonies qui vont droit au cœur (Long The Desert Mile et ses tristes arpèges décharnés en milieu de titre).
En considérant Waking Season dans la discographie de Caspian, celui-ci marque surtout une évolution dans le son, plus ample, des américains. Certains seront surement déçu des murs soniques qui se font assez rares (High Lonesome) parce que le groupe a choisi de calmer le jeu, y préfère les mélodies soignées, raffinées et celles-ci ne manquent pas d'émotions (Akiko). Pas tout à fait non plus. En conclusion, Caspian brûle les amplis sur Fire Made Flesh, se montre grandiloquent et fracassant, mais toujours avec justesse. Autre changement, c'est celui de la voix (Gone In Bloom And Bough), une première pour le groupe, même si celle-ci est peu présente et demeure à l'état de spectre sur ce titre. On pourra aussi être surpris par la tournure prise sur Halls Of Summer, à la limite de beats Indus ou des rythmiques sautillantes de History '54 qu'on croirait issues du Með Suð í Eyrum Við Spilum Endalaust de Sigur Ros.
Waking Season est une très belle surprise. Il est la preuve qu'un groupe de Post-Rock peut évoluer vers une musique plus douce, sans que celle-ci ne soit dénaturée. Pire, qu'elle devienne pénible et plate. Non, Caspian s'en sort haut la main en explorant de nouvelles voies, quitte à laisser de côtés les amoureux de vibrations soniques de la première heure. Il fait désormais parti des groupes de Post-Rock sur lequel il faut fortement compter, j'en suis pleinement convaincu. Si vous n'aviez qu'un disque de Post-Rock à écouter en 2012, c'est sans doute celui-ci.
A écouter : 1
Chro très juste, autant dans les références que l'exposé du propos général.
Pour tout amateur de post-rock, il nous était obligé d'avouer un creux ces derniers temps. Caspian, en prenant la roue d'Immanuel El, renoue avec la tradition du post-rock "esthétique" plutôt qu'épique,
et ne joue pas sur l'unique ressort de la longueur étirée.
Et le pari fonctionne.
"Gone in Bloom and Bough", à ce titre, vient se caler tout en haut de la pyramide des morceaux touchés par la grâce,
avec un souffle quasiment Mouving Mountainiens dans sa tension interne et ses voix intérieures.