Carmen Sea, toute fraîche formation parisienne, déboule en ce frisquet 18 novembre avec HISS, premier EP qui arbitre une jonglerie habile et plus ou moins frontale entre Rock, Noise, Prog, Metal, Indus, Post Rock, Psychédélisme et même du (Néo)Classique à travers un violon épileptique et mouvant tout à fait savoureux. Programme un tantinet chargé, résumé en cinq excellents titres, bien plus faciles à assimiler que prévu.
Ce violon justement, d’obédience bruitiste (mais pas que), qui siffle à nous en faire vriller les tympans de plaisir dès le retentissement du captivant Frames, et s’impose le long de l’objet, en chef d’orchestre ajustant les ambiances singulières, nécessairement cinématographiques, qui osent et s’y déposent. Aucun chant véritable n’aura sa place en ces lieux, tout est dans la recherche sonore et la finesse instrumentale, mise en valeur par une production impressionnante pour un premier jet. Ainsi l’entêtant Black Echoes taille dans le gras à l’aide d’un alliage Noise / Indus serein et nous amène sans crier gare à remuer le séant le sourire aux lèvres, pour finalement péter l’ambiance et nous plomber sous les basses dans un mouvement qui rappelle Chaos E.T. Sexual. L’étrangeté gagne ensuite du terrain sur le Psyché lynchien Anthems For, où les guitares pleurent et se mouchent dans le satin, où la basse déroule une ligne délicieuse qui nous enveloppe et où l’omniprésent violon s’étale en accompagnant cette mélancolie sous stupéfiants. Transition idéale vers Un Dernier Appel qui monte progressivement en intensité, jusqu’à devenir désespéré, sous une forme Post-Metal grisante. Puis les onze minutes et quelques de Glow In Space continuent de manier les contrastes et les reliefs avec maestria, en un édifice forgé par le temps et l’espace, tel un monolithe paumé au centre du néant mais qui renfermerait les secrets de l’univers. Le violon, encore lui, se mue en saxophone en apesanteur, supplée un instant par une basse matheuse, puis l’ensemble explose en supernova, la guitare s’exprime alors lourdement, en harmonie avec une batterie au groove incandescent, le bruit et la stridence s’affirment de plus belle, et la boucle est bouclée.
Le quatuor parisien balance un joli pavé expérimental dans la mare, néanmoins rien d’insurmontable pour des oreilles non préparées, tant les titres de HISS s’enchaînent de manière très fluide, via des ambiances sublimes qui stimulent l’imaginaire sans pour autant nous caresser dans le sens du poil. Carmen Sea s’appréhende déjà comme un projet rôdé, rafraîchissant et singulier. On a donc vraiment beaucoup hâte d’écouter la chose en plus longue durée.
A écouter : Oui.