Bossk joue à l'ancienne. Du Postcore - ou du Post Metal, c'est comme vous voulez - "à l'ancienne". Le concept est paradoxal puisque le style est somme toute assez récent. Oui mais voilà, Bossk, en trois ans d'existence véritable, a accompli ce que beaucoup dans le genre avaient peut être déjà un peu oublié: faire toner son ensemble.
Quand Bossk se lance les influences sont bien présentes car, quoiqu'on en dise, les premiers enregistrements restent encore bien souvent des mètres étalon du genre. Cult of Luna et Isis, désormais affairés à développer une musique plus éthérée et lumineuse qu'à leurs débuts, planent loin au dessus du quintet britannique, tentant de l'arracher à l'attraction terrestre. Ce sort, l'immense majorité du genre l'a déjà connu... pour le résultat que l'on sait. C'est sur ce point que la formation d'Ashford va se démarquer: soumis comme ses comparses aux lois de la gravitation, Bossk refuse pourtant d'aller baver sans retenue sur le Post Rock épico-larmoyant, tendance générale qui à mené le Postcore à décliner sans fin la même alternance prévisible *ambiance cristalline gonflée à l'hélium/doooooom* rempompée aux deux groupes précités jusqu'à l'écœurement.
Bossk ne s'envolera pas. Bossk ne se perdra pas - peut être parce que le groupe n'en aura pas eu le temps. Et c'est tant mieux. Derrière une filiation évidente, le leitmotiv est clair. .1&.2, son heure de durée et ses quatre titres (soit la totalité de .1 et .2) reprend les codes à l'origine du genre, faisant des accalmies tantôt des moments de recueillement, tantôt des moments de tension, élevant juste ce qu'il faut ses compositions pour rester dynamique et écrasant au moment ou il retombe, brisant ses élans stratosphériques avant que la montée ne soit incontrolable. Il faut juste leur en laisser le temps. Solidement ancré sur le plancher des vaches par une basse organique, Bossk étale sa progression (qualitative), partant d'un I relativement classique mais très plaisant pour finir sur un très solide Truth. Une heure, quatre titres: un instrumental en ouverture et un titre qui voit intervenir le chant sur chaque EP. Un .1 académique, bien emmené, spontané et dynamique qui évite de s'auto-contempler dans une béatitude mièvre et un .2 plus sombre et virulent, au traitement sonore alourdi à mi chemin entre Australasia (Pelican) et fuzz Stoner/Doom. Car là est aussi l'intérêt de ce double LP: constater la (marge de) progression énorme à chaque nouveau titre d'un groupe disparu juste avant d'exploser. Frustrant mais O combien réconfortant sur les possibilités encore existantes pour le genre.
Bossk n'invente certes rien mais ces quatre titres sont loin de sonner comme des faces B des ténors du genre. Ce n'est pas rien. Adeptes du mouvement perpétuel plutôt que du remplissage et de l'empilement de plans aux transitions hasardeuses, les cinq anglais démontrent qu'il est encore possible de faire du Postcore autre chose que de la musique d'hospice. Ne serait-ce que pour cette raison, ils méritent bien une écoute. Posthume, malheureusement.
A écouter : .1 et .2