Si, l'âge aidant, certaines formations ont tendance à lever progressivement le pied, d'autres en revanche cultivent toujours cette notion de l'extrême. Blockheads, combo nancéen qui, dix ans après ses débuts, vient de sortir son quatrième album, se charge de nous le prouver.
Produit par Stéphane Buriez (Loudblast), Shapes of Misery étale sa violence le long de 20 morceaux qui ne laissent aucune place à la rêverie. Développant son grindcore dans un acier bien trempé dans la scène des 80-90, Blockheads déclenche ses salves par l'intermédiaire de morceaux aussi courts qu'efficaces. Alliant la vitesse d'exécution de Carcass et la vitalité technique de Terrorizer, le tout est saupoudré d'une ambiance totalement hardcore rappelant le FETO ou le SCUM de Napalm Death dont l'écoute aurait pu s'avérer indigeste si les nancéens s'étaient contenté d'exécuter leurs compositions sur un mode supersonique et linéaire. Bien au contraire, le combo fait état d'une rigoureuse méticulosité dans ses enchaînements, démontrant sa maîtrise des variations de tempo et des stop-and-go inspirés ("Bow Down", "Borders", "Despair") qui, non contents de ne pas freiner la progression de Shapes of Misery, permettent à ce dernier de s'autorégénérer sans lasser une seule minute.
Toutefois l'incontestable purisme de Blockheads ne doit pas masquer une réelle volonté d'aller de l'avant, ne serait-ce que par la signature chez Overcome Records qui, sauf le respect pour Bones Brigade, devrait lui procurer une meilleure diffusion. Mais cette progression se manifeste surtout par l'injection d'une bonne dose de sang neuf contenue dans des accords aux contours maladifs et malsains dans l'esprit de Combat Wounded Veteran, voire même de Converge qui, bien que succints et parcimonieux ("Social Fracture", "Back To Dogma", "Parasite"), n'en laissent pas moins une profonde empreinte tout en offrant aux nancéens d'intéressantes possibilités d'évolution.
Bref, on ressort malaxés, broyés, compressés par ce nouvel épisode Blockheads, mais également heureux d'y trouver une fraîcheur et une énergie intacte. Certains auront sûrement trouvé l'attente longue depuis Human Parade mais, la qualité de Shapes of Misery l'atteste, elle n'en aura été que plus bénéfique.
A écouter : Despair, Social Fracture, Loser