A croire que c'est une manie typiquement britannique: mais qu'ont-ils tous à vouloir sortir leur Ok Computer? Dans la lignée de Radiohead qui avait alors sorti en 1997 un des albums majeurs de la décennie, plusieurs groupes s'essaient à l'exercice de style qui consiste à pondre un album expérimental et novateur. Si certains y arrivent avec un certain succès, comme Blur avec Think Tank, d'autres ont eu, apparemment, les yeux plus gros que le ventre.
Bloc Party est de ceux-là. Après avoir sorti en 2005 Silent Alarm, un album de rock d'obédience new wave qui alliait mélodie et groove implacable, le groupe s'essaie lui aussi à ce périlleux saut en hauteur. Les parallèles entre A Week End In The City et l'album du quintet d'Oxford sont multiples; d'abord la pochette dans le même esprit, le sens aigu de l'expérimentation sans compter l'admiration avouée de Kele Okerere, tête pensante de Bloc Party, pour Thom Yorke. Mais ils s'arrêtent là. En essayant d'insuffler un souffle electro branchouille, Bloc Party montre surtout son manque de maturité comme sur l'audacieux mais décevant single The Prayer. Là où les guitares alliaient nervosité et mélodies cristallines, où la basse grandiloquait sans honte et où Matt Tong derrière ses fût impressionnait par un jeu chirurgical, on laisse la place à des samples, des rythmiques lourdement martelées. La voix de Kele se fait plus modulée, mais moins directement émotionnelle. Le groupe a pris le parti de l'album réfléchi, sans pouvoir assumer encore leurs velléités artistico-intellectuelles.
L'album reste malgré tout cohérent dans son ensemble. Bâti autour d'une thématique générale, l'hédonisme de la jeunesse anglaise d'aujourd'hui, A Week End In The City, bénéficie de textes assez pertinents. Pour éviter l'indigestion, les groupes a ponctué son oeuvre de chansons plus pop, qui s'avèrent malheureusement généralement décevantes comme l'exaspérant I Still Remember. Certains morceaux relèvent l'ensemble malgré certaines imperfections : Hunting For Witches et son riff electro inspiré s'effondre lorsque le gratteux se prend pour un (sous)Johny Greenwood, Uniform et son entrée en matière doucereuse sont plombés par des effets electros de mauvais goût et Where Is Home? est sauvé de justesse ses intonations salvatrices du chant sur le refrain.
Si l’album s’avère décevant dans l’immédiat, il dévoile cependant un véritable désir d’innover, ce qui reste quoi qu’il en soit, louable. Peut être avec le temps, le groupe pourra t-il nous offrir un album plus abouti, se plaçant ainsi effectivement dans la lignée de ceux qu'ils admirent...
Trois titres du nouvel opus sont en écoute sur le Myspace du groupe.
A écouter : Hunting For Witches, Uniform, Where Is Home?