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Biographie

Birdy Nam Nam

Birdy Nam Nam est né de la rencontre de 4 DJ surdoués et dont la collection de titres a de quoi laisser pantois. Choc des générations, entre Crazy B (Alliance Ethnik), l’un des tous premiers DJ Hip-hop en France, sacré champion de France des années durant, DJ Pone, officiant avec les punks des Svinkels, lui aussi titré à de nombreuses reprises, et la relève incarnée par DJ Need et LilMike, deux révélations de la fin des années 90, le groupe est issu de la Scratch Aktion Hiro, team créée pour gagner les championnats du monde par équipe (objectif atteint en 2000). Après avoir écumé les clubs, pour des démonstrations et mixs hauts en couleurs, le groupe décide en 2004, après une signature sur le label KIF, d’enregistrer le résultat de ses jam sessions sur son premier album, après deux maxis fort remarqués.

Birdy Nam Nam y propose un savoureux mélange d’influences sous forme de trip-hop, entièrement réalisé grâce à du matériel de Deejay (hors samplers). La musique du groupe casse les standards de DJing, pour proposer de véritables morceaux composés et recherchés dans un objectif d’esthétisme constant. Ce premier album éponyme sorti en 2005, de par son concept et sa qualité, fait connaître très rapidement le groupe au grand public, et la qualité de ses shows, avec un aspect très visuel, assied cette notoriété soudaine auprès de personnes n’ayant pas forcément une culture hip-hop.

Chronique

18 / 20
10 commentaires (17.65/20).
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Birdy Nam Nam ( 2005 )

Sous ses airs de bande de potes, Birdy Nam Nam est un sacré All-Star band : retournons un petit peu en arrière pour comprendre. Nous sommes dans les 90’s, période faisant désormais partie du passé (j’ai du mal à l’admettre tout de même…), et le hip-hop explose en France, et si le grand public est atteint par des groupes comme NTM ou IAM, le réseau underground se tisse indubitablement et répand à travers l’Europe et l’hexagone tout ce que représente la culture hip-hop. Je vous laisse vous référer à vos manuels d’histoire si vous ne savez pas de quoi il s’agit, pour ne me consacrer qu’à un seul élément : le Djing. Au cours de la décennie, les championnats de DJ se développent, sous l’égide de grands fabricants, et l’heure est encore à la mise en place d’une technique tape-à-l’œil qui offre une grande marge de progression. La France offre d’ailleurs un vivier de talents non négligeable, et c’est ce microcosme de Deejays surdoués qui crée ce qui est devenu à l’heure actuelle une tradition du Deejaying. Ce n’est que plus tard dans la décennie que naît l’idée de combinaison de talents de Djs, avec la création de championnats par équipe, et c’est de là qu’est créé le Scratch Aktion Hiro, crew de 4 figures du milieu, toutes sur-titrées (championnats de France, d’Europe, du monde) et presque blasées de l’aspect démonstratif de leur discipline. On retrouve donc au sein de ce qui représente les prémices de Birdy Nam Nam, Crazy B (ex-Alliance Ethnik), DJ Pone (Svinkels, ex-Triptik), Lil’ Mike et DJ Need. Le crew ainsi formé se dirige vers la consécration ultime : un titre de champion du monde par équipe, et tout cela rien qu’en proposant un angle d’approche de la discipline très différent. C’est celui-ci qu’on retrouve 5 années plus tard, à travers le premier album d’un groupe qui n’a plus rien à prouver, et qui s’est débarrassé de tous les carcans que pouvaient représenter la compétition.

Chez Birdy Nam Nam, vous l’aurez donc compris, les seuls instruments sont des platines, accouplées à des tables de mixage, et nos quatre (ex)Hiros composent une sorte de mixture trip-hop très fine à huit mains. Là où Birdy Nam Nam est révolutionnaire dans son approche, c’est qu’il démocratise (et de fort belle manière) une pratique qui était jusque là confinée à l’underground US. Ici, il n’est pas du tout question de démonstration de techniques de pointe, d’enchaînements à 200 à l’heure avec les mains dans le dos et le pied derrière la tête. Birdy Nam Nam exploite simplement une notion laissée de côté des années durant dans le Deejaying, en proposant quelque chose d’extrêmement musical. Les 4 français ont simplement eu envie de mettre en retrait leur technique et de la mettre au service de la construction de véritables morceaux, de développer leur propre vision de la musique, en allant au-delà de figures imposées en concours, ou de beats répétitifs mixés pour des groupes où le flow prend toute la place. Ainsi, le scratch n’a plus seule fonction de démo, et la combinaison des platines des Birdy Nam Nam révèle des possibilités jusqu’alors peu exploitées. Les mélanges les plus improbables entre sonorités opposées deviennent une formalité, simplement par la rencontre de vinyls superposés et mixés en joutes étranges. Jeux de Question-Réponses, canons, mises en abîmes, superpositions, les possibilités sont nombreuses, et les 4 français ne s’embarrassent plus de mélanger des rythmiques Bossa Nova à des sonorités psychédéliques (New Steps/Breaking Barriers), à recréer des ambiances Lounge avec des bois et des beats très trip-hop (Body, Mind, Spirit), ou à utiliser le côté très agressif du geste de scratching au service de véritables monstres de dancefloor (Too Much Skunk Tonight, Abbesses – le titre qui leur a permis de gagner les championnats du monde-, Jazz It At Home). Birdy Nam Nam est d’ailleurs un album très disparate, et la seule cohésion provient sans cesse de petits éléments dans le son qui rappellent qu’il ne s’agit en fait que d’une illusion musicale recréée par la superposition de couches de grande qualité sonore (vinyl oblige). Le fait que la culture Deejay ratisse la musique de manière très large contribue d’ailleurs à proposer un nombre d’influences invoquées assez énorme. Jazz, Big Band, Electro, Hip-Hop, musique ambiante, Breakcore, le spectre est large, et pourtant d’une cohésion étonnante.

Ce premier album des Birdy Nam Nam est un objet suprenant où la vision que la culture DJ pouvait nous renvoyer (au grand public s’entend) est piétinée. Ici, la notion de groupe est pleinement utilisée, dans des titres écrits dans un but d’esthétisme et de cohérence. Chacun des morceaux est une petite perle de construction, étonne par les mélanges mis en jeux, et le résultat de cette évolution ambitieuse est à la hauteur du CV des membres du quatuor. Et si Birdy Nam Nam n’est peut-être pas l’inventeur du Turntablism, son succès outre-Atlantique et en Europe prouve aisément qu’il l’a révélé au grand public, et de fort belle manière.

A écouter : Si l'on aime le hip-hop ; si l'on est ouvert et que l'on aime les groupes qui bougent l'ordre �tabli.