La scène Norvégienne n'a pas à rougir. Entre Ulver, Darkthrone, Manes, Enslaved ou Dominic, les groupes sont de qualité (certes plus ou moins discutable selon les albums). Ainsi, lorsque Benea Reach sort son second disque, encensé par la presse suédoise, on est en droit de s'attendre à un objet qui ravira le moindre auditeur adepte de Post Hardcore.
Lorsque les premières notes d'Awakening résonnent, le doute s'installe. Encore une énième groupe de Death Mélo / Metalcore qui livre sa galette insipide à souhait ? Et pourtant non, une fois dépassé les deux premières minutes, l'incertitude disparait. Benea Reach a quelque chose dans les tripes, s'offre même le luxe de séduire sans difficulté malgré le chant clair (pour une fois réussi). Difficile de cataloguer le groupe tant les compos oscillent entre Hardcore, Post-Hardcore et Metal Lourd.
Formation à première vue classique (comprenez par là 2 guitares, une batterie, une basse et un chanteur), Benea Reach détonne pourtant grâce à une fraîcheur glaciale se dégageant d’Alleviat, pourtant brûlant musicalement. Alleviat ne tombe pas aussi délicatement que le voile rouge qui l'incarne, mais plombe plutôt l'auditeur comme le corps qu'il contient. Pour résumer en quelques mots ce brûlot : massif, intense et prenant. Les cordes ne partent pas dans tous les sens, la batterie ne piétine pas sur place, le rythme parfois haché donnera des frissons dans les cervicales tandis que les différentes facettes du chant offrent un souffle et évitent à Benea Reach de plomber leur disque sur ce simple aspect (que ce soit chant hurlé, chant clair, chant aigu ou même quelques passages plus emos). Le timbre clair, le plus souvent banal et inefficace sur d'autres groupes, est pourtant ici intéressant et distillé avec parcimonie. Quelques passages, comme l'envolée sur la seconde moitié de Rejuvenate ou même l'excellent Unconditional, font vraiment de cet album une pièce de qualité. Le tout est suffisamment lourd pour tenir l'auditeur au sol, mais pas assez pour le tuer par exaspération. Benea Reach sait aussi adoucir l'onde sonore, se faire plus léger : l'introduction de Lionize, la quasi totalité de Reason qui fait preuve d'une grâce poétique (notamment grâce au double chant masculin / féminin uni) ou même le postcore/rock de Illume qui réussit le pari de tenir en haleine l'auditeur.
Une faiblesse ressort de l'écoute d’Alleviat. Benea Reach n'est en effet pas parfait, comme le prouve le premier morceau Awakening, qui malgré une fin intéressante, démarre comme un mauvais groupe de Metalcore. Si ce n'est cet aspect, les norvégiens ne font pas de cadeaux, et malgré des compositions qui ne sont pourtant pas révolutionnaires, font un sans-faute sur 50 minutes.
Alleviat n'est pas un album léger, le genre de truc qui s'écoute en fond sonore lors d'une soirée arrosée. Benea Reach possède un vrai talent pour séduire et Alleviat est un album réfléchi, posé et construit. On regrettera toujours certains choses, on tiquera toujours sur un passage, mais Benea Reach réussi le pari de ne pas fatiguer et de ne pas livrer un album inégal. Sans révolutionner la musique, sans prétention, Benea Reach offre donc un disque agréable, séduisant et efficace.
A écouter : Lionize - Rejuvenate