Biographie

Belong

Formé en 2002 à la Nouvelle Orleans (Louisiane) Belong est le fruit de la collaboration de Turk Dietrich et Michael Jones. Bien qu’occasionnellement accompagnés au cours de certaines de leurs prestations live, c'est à quatre mains que les deux artistes livrent un premier album Drone/Ambient marquant et remarqué en 2006 avec October Language. Il faudra néanmoins attendre cinq longues années entrecoupées par la sortie d'un sibngle en 2008 pour retrouver le duo dans les bacs. Sur leur second disque, les deux musiciens très marqués par les scènes Ambient/Techno et Shoegaze des années 1990 se réinventent et font le choix de s'orienter vers une approche pus pop et classique de leur univers sonore. Common Era reste pour l'heure l'ultime production de Belong.

Chronique

16.5 / 20
1 commentaire (16/20).
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Common Era ( 2011 )

L'ouverture de Common Era ne laisse que peu de place à l'hésitation: le très discret duo, près de dix ans après ses débuts a tranché lorsqu'est venue l'heure des choix. Changement de label, de style, de format(s), ce second album au parfum de nouveauté avait potentiellement tout pour que l'on assiste au crash de l'association Turk Dietrich/Michael Jones. Ou confirmer que c'est bien dans la prise de risques qu'un projet finit par s'imposer et que se détachent les formations qui, alors que les années passent, finissent par compter.

Malgré ce constat de départ et bien que l'évolution soit évidente une fois la galette lancée - pour peu que l'on ait précédemment goûté à October Language - difficile néanmoins de sentir complètement perdu dans la brume électrique de cette dernière (?) offrande. Belong y marque, certes, une cassure nette dans sa discographie en introduisant d'entrée chant et rythmique dans un univers bourdonnant jusqu'à présent vide de repères pour s'inviter sur le terrain de la Pop éthérée et bruitiste mais refuse catégoriquement de remiser ses prétentions Drone/Ambient au placard pour autant ("Keep still"). Quiconque n'ayant pas encore posé l'oreille sur Common Era, rassasié de groupes evanescents atteints de fièvre revivaliste, pourrait logiquement en rester là et estimer que Belong n'est qu'une énième formation en pleine régression New Wave. Constat qui aurait d'ailleurs probablement pu se révéler tout à fait exact si seulement le groupe n'avait pas eu l'intelligence de tracer sa route à distance respectable du peloton de l'amicale du synthé vintage cotonneux, et de le faire savoir d'entrée (nerveux "Come see").

Détaché, planant vraisemblablement au dessus de toute considération stylistique précise et complètement seul au monde dans un trip urbain brumeux en bullet-time, Belong se tourne bien plus en 2011 vers l'aube des années 90 dans une idée de continuité que le cœur gonflé d'une nostalgie irritante car trop souvent simpliste, et d'un idéalisme naïf.
Common Era se déploie en une oeuvre synth-pop ambiante et spectrale, irradiée de shoegazing, d'electronica et parcourue d'une tension sous-jacente omniprésente héritée du Post-Punk renouant avec des sonorités laissées à l'abandon par ses aînés quelques quinze ans plus tôt. Bien que tous les cadrans semblent pointer vers la case revival, le terme semble ici dramatiquement étroit. Common Era est bien plus que cela car tout à la fois un hommage vibrant et la résurrection plus ou moins consciente d'une certaine idée de la créativité et de l'esprit de conquête en matière de musique. Celui développé, notamment, par la structure chicagoanne complice de cette sortie et associée de nombreuses formations perchées en apesanteur depuis le milieu des années 90: Kranky. Car s'il évoquera fortement la rencontre des premiers méfaits de Flying Saucer Attack et Joy Division, un nom s'impose finalement au dessus de tous au moment d'évoquer l'esprit animant ce second disque: Bowery Electric. De "Come See" à "Make me Return" sans oublier le morceau titre, Common Era déborde de sonorités vaporeuses au croisement des deux premiers immenses albums de cet autre duo (tiens donc) héros des premières heures du label tout en creusant son sillon ("A walk", ballade hallucinée au gout d'infini). De là à conclure que Common Era est peut être le disque le plus "Kranky" du catalogue récent du label il n'y a qu'un pas que chacun franchira ou non.

Quoiqu'il en soit le fameux "changement dans la continuité" a encore frappé. Ce qui surprendra peut être pour une fois c'est que Common Era parvient à offrir une idée bougrement précise d'un concept à l'origine on ne peut plus nébuleux. Le genre de petit exploit qui vous pose là le niveau d'excellence des quatre mains s'étant affairées derrière leurs machines deux années durant alors que l'essentiel se trouve en définitive ailleurs. Soit dans la charge émotionnelle délivrée par cette alchimie fragile entre textures sonores à la puissance évocatrice impressionnante et mélodies lugubres. En un mot: frissonnant.

A écouter : Seul dans la nuit