Parmi les tôliers du Death Old School, une chose est sûre : Autopsy n'a jamais fait dans la dentelle, et ce ne sont pas leurs deux décennies au compteur qui ont assagi les Américains. Il faut dire que l'on parle là des géniteurs de Severed Survival qui annonçait déjà pas mal la couleur; musique primitive, pochette brute et sans détour, et logo façon saucisses de chair humaine. Mais avant tout, ce premier opus aura révélé cette passion pour les tempos écrasants, devenus la marque de fabrique du groupe.
Mental Funeral, sorti deux ans plus tard vient confirmer la tendance. Servi par un Death gorgé de Doom, l'objet est un pur étalage de gras qui frappe dès ses prémices par son aspect caverneux et repoussant. Alors que la même année paraissaient des Human (Death) et autres Testimony Of The Ancients (Pestilence), Autopsy mise sur une production étouffante qui fait tout le charme de ces douze pistes. Pas de concours de technique, de duels de soli, Mental Funeral c'est plutôt une basse qui tache, du riff parfois simplissime mais qui a le mérite d'aller droit au but. Derrière les fûts, on enfonce le clou avec une rythmique lourde et du blast, ou on se la joue tribal par moments (Slaughterday, Dead). Sans parler du chant de Chris Reifert et son timbre sinistre, rauque à souhait, apportant à l'ensemble une nouvelle couche de dégueulasserie. Mais malgré son aspect très monolithique, ce deuxième effort trompe l'ennui comme peu savent le faire. Armé d'un groove à toute épreuve, le quatuor ne peut s'empêcher des vas et viens constants entre tirs de mortier Doom et courses Death, le tout avec un naturel déconcertant lors des changements rythmiques. Quelques notes traînantes avec un soupçon de malsain et on envoie le bois une fois la proie endormie, en soi rien de sorcier mais la recette est suffisamment osée pour insuffler une identité forte à un album constamment à cheval entre deux genres.
Pied de nez à tout un panel de groupes engagés dans la course au son, Mental Funeral semble avoir été fait avec trois bouts de ficelle et se hisse sans doute parmi les sorties de l'époque ayant le plus de cachet. Que l'on pense à In The Grip Of Winter et ses quatre notes (en boucle) d'interlude diablement mémorables, à Dead et ses six cordes pleines de simplicité, pas mal de choses sentent les moyens du bord mais épaulées par un génie de composition certain. Dans la démarche d'ailleurs, comme dans la musique elle-même, Autopsy n'hésite pas à exposer son influence Punk, marquée en premier lieu par les coups de masse de Reifert (Robbing The Grave, Dark Crusade). Noyé au milieu de riffs très primaires, le batteur tire souvent son épingle du jeu et offre de sacrés coups de fouet aux titres en ne restant jamais bien longtemps fixé sur ses patterns (Hole In The Head).
Naviguant toujours sur la brèche, les Américains maintiennent le cap et collent à cette aura asphyxiante tout au long du disque, dans la violence aveugle de Bonesaw comme dans le final éponyme, minimaliste et peu réconfortant.
Mental Funeral est de ces œuvres singulières qui ont fait du Death Old School un genre à part entière plus qu'une simple période, porté par une multitude d'acteurs avec leur propre patte, mais unis par cette capacité à développer une ambiance singulière et inédite plutôt qu'un déballage de vitesse et de prouesses sans âme.