Après un premier 12" qui en a fait vibrer plus d'un, Aussitôt Mort revient, mais avec un léger changement : le départ de leur chanteur Greg qui se remarque dès les premières secondes d'écoute de Montuenga. Là où la touche Amanda Woodward se faisait énormément ressentir sur la démo, la nouvelle vague se dirige plutôt vers un registre plus postcore / postrock, délaissant cette voix malmenée et éraillée tout en conservant l'aspect sombre initial dépourvu, toutefois, de cette étincelle, de cette lueur au fond des yeux qui faisait frémir auparavant. Quelques passages rappellent l'excellent Nord de Year Of No Light ("Huit" et son côté glacial) ou "On A Qu'A Se Dire Qu'on S'En Fout" mais les riffs sont tellement éculés qu'ils en sortent lavés de tout intérêt, dénués de sens. On ne peut reprocher aux musiciens d'Aussitôt Mort de jouer avec sincérité, motivation et talent, mais les morceaux n'éveillent pas les sens, semblent fatigués avant même d'avoir débutés. En effet, le principal défaut de Montuenga est de rappeler une foule de choses, sans jamais arriver à vraiment trouver la nouveauté, le moment de grâce qui fait passer le groupe de l’ombre à la lumière.
Le chant lointain, complètement étouffé, semble en équilibre précaire sur "Le Veilleur Du Grand Marché", où les cordes le supplantent trop pour qu'on puisse arriver à déterminer s'il est volontairement ou non prêt à basculer... Même sans être forcément lassantes, les compositions gagneraient sans doute en intérêt sans ce jeu de cache-cache avec l'auditeur, et les mots clamés par Aussitôt Mort parviendraient peut-être à nous toucher au lieu d’être juste un son distant…
Les seuls titres à tenir la longueur sans lasser ni tomber dans la banalité sur Montuenga restent "Le Kid De la Plage" et "Une Heure plus Tard". Le premier des deux, aux cordes suppléées de quelques sons cristallins, alterne entre plusieurs sentiments, cheminant entre différentes ambiances au bord d'une mer sous le regard de la Lune. Le second, largement au-dessus des six autres compositions, retrouve presque l'essence d'Aussitôt Mort, avec un chant bien plus présent, bien que parfois maladroit. Sans ces deux compositions, Montuenga n’aurait que peu d’intérêt, le genre de disque qui, à peine écouté, basculerait dans les limbes de notre mémoire…
Montuenga est clairement un album qui ne s’écoute que le temps de s’apercevoir que l’on s’ennuie. Un zeste de mélancolie au fond des yeux, on ne peut que s’assoir au bord du chemin et observer le cortège funèbre avancer. Aussitôt Mort n’est plus, ses derniers instants furent deux spasmes musicaux. Montuenga ira rejoindre le tas de disques prenant la poussière, et on ne le ressortira que pour mieux l’y remettre.
A écouter : Le Kid De la Plage et Une Heure plus Tard