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Biographie
Nicolas Chevailler (Guitare) Julien Loizeau (Batterie) David Demesmay (Basse) Fred Nivard (Chant) Sébastien Deschamps (Synthétiseur)
Asidefromaday se forme en 2000 du coté de Besançon et s'inscrit de prime abord dans un registre clairement metal pour finalement s'orienter vers un hardcore hybride et technique aux relents emo et noise joué de façon chaotique, lourde et intense. Le groupe tourne aux côtés de Lack, Catharsis, Cult Of Luna, The Dillinger Escape Plan, Tantrum, Gantz, Gameness ou encore Comity. En 2005, un premier album, Divine Proportion, sort via Impure Muzik. Asidefromaday attend 2009 pour lui donner une suite avec Manufactured Landscape qui sort aux formats CD, LP et numérique sous le label Division Records. Mêmes formats distribués en 2012 pour la sortie de Chasing Shadows, sur lequel le quintet apporte un nouvel élément à ses compositions, un synthétiseur analogique.
On ne l’attendait pas tellement ce disque, enfin je ne l’attendais pas spécialement, n’ayant pas eu d’expérience auditive approfondie sur le groupe en question. C’est l’occasion d’en avoir une avec ce troisième long format des bisontins. Un bloc de quarante minutes, animé d’une puissance démesurée, dévale une pente vertigineuse et prodigieusement accidentée. La chute est contrôlée, un synthé sci-fi l’accompagne de son début à sa fin. Les guitares sont le fruit d’un mariage polygame entre Breach, Converge et Neurosis. Le hurleur vomit tout ce qu’il peut tant qu’il en reste sur sa glotte, avec précision et musicalité toutefois. Le frappeur, bien que sensiblement étouffé parfois, apporte un groove persistant sur tout l’objet, chaque morceau proposant des structures post-hardcore métallisées, légèrement alambiquées, propres au quintet. Voici la valeur ajoutée d’Asidefromaday, une déflagration quasi-permanente, mesurée, réfléchie, posée. De ce fait, sur ce Chasing Shadows, le travail de production semble avoir été particulièrement minutieux, le résultat n’en est que plus éblouissant. Sept titres survolés par cet étrange et fameux synthé dont la greffe aux compositions fut décidément une brillante idée, tant cet instrument – et surtout la sonorité qu’il génère – donne à l’ensemble un souffle épique tout à fait inédit, le monumental Wolf’s Tears Are Falling Stars en tête.
En cet album résident une mélancolie et un désespoir constants, pas bien dépaysant pour du post-hardcore me direz-vous, seulement ces émotions inhérentes au genre sont ici complètement justifiées, portées par une communion instrumentale infaillible. Tout le monde va dans la même direction, les plans s’enchaînent avec une fluidité déconcertante. Il sera d’ailleurs inconcevable pour certains (dont celui qui écrit ces lignes) de lancer le disque sans se le farcir entièrement.
Chasing Shadows est un monolithe d’émotions texturées, agencées par des musiciens inspirés de bout en bout. Et malgré cette impression de se manger un gros parpaing bien compact en plein faciès, chaque morceau, qu’il dure quatre ou huit minutes, est chargé ras la gueule de variations et d'ambiances surprenantes. Asidefromaday signe un troisième effort long ingénieux et ambitieux, profitant de l’intégration du synthé analogique pour emmener l’auditeur adepte de lourdeur mélodique vers de plus cosmiques contrées, toujours ombragées.
A écouter : en entier, mais pas en boucle.
De retour aux affaires, Aside From A Day burine, creuse et segmente la roche comme un Titan en mal de création. Ce n'est ni le titre de l'album, Manufactured Landscape, ni "Geodesy", introduction venteuse à l'intitulé explicite, qui feront voler ce propos en éclat. Ces 9 bas-reliefs sculptés à la force du poignet, compte la Genèse, l'enfantement de la Terre suivi de celui de l'Homme.
De l'eau a coulé sous les ponts depuis Divine Proportion, laissant le temps aux caillasses acérées de perdre de leur mordant. Pourtant, si Aside From A Day a succombé à l'appel des (désormais inévitables) digressions placides et harmonieuses, ces dernières restent brèves et légitimes, tant le reste, le versant ténébreux, subsiste viscéral et résiste à l’érosion. Le propos reste intense et toujours ancré dans les mêmes travers. Même en injectant un concept à leur musique, les gaziers ne s’infiltrent que rarement hors des zones balisées, aux creux des fissures périlleuses. Pour cause, Precambrian de The Ocean, s'est déjà approprié cette même brèche thématique et géologique. Quant à la forme proprement dite, Aside From A Day mise sur ses fondamentaux biens connus : un souffle vocal monocorde et extrême éructé sur une strate du béton râpeux. Une énième couche de post hardcore chaotique saturée de guitares. Certes. Mais Aside From A Day, comme un élève appliqué, s'extirpe un peu au delà de la moyenne. Les responsables ? Ce batteur ultra dynamique, inventif sans être démonstratif, qui fourni une énergie motrice considérable. Puis ce jeu tout en nuances et variations, qui fait le pas entre les attaques épineuses propres au groupe ("Alone") et une orchestration tout en itérations, froide et industrielle, qui jouxte le cœur pulsatif et mécanique du Is.Land de Time To Burn ("The Idea Of Creation").
Usiné de A à Z, Manufactured Landscape est un disque progressif qui ne laisse presque rien au hasard. En ce sens, il ne lui manque qu’une part de démence et d’insouciance pour devenir indomptable et tenir en haleine de bout en bout. Au demeurant, Aside From A Day est revenu l’œil vif et la lame hors du fourreau. Le prochain coup il faudra attaquer pour de bon.
A écouter : Alone
Après un EP d'une violence viscérale, Divine Proportion matérialise les véritables ambitions de Aside From A Day, qui sans compromis, déversent tripes et boyaux à chaque invectives tout en visant un niveau d'écriture et d'interprétation plus mature. Le pas est franchi vers une véritable densité et richesse musicale. Aside From a Day reste cet hybride insaisissable entre hardcore chaotique aux relents metal (Botch, Breach) et noise (Anodyne) qui progresse avec une aisance et une assurance accrues. La bête a gagné en volume et férocité. "Phil" / "Engine", la morsure est immédiate, soulève le coeur et laisse une plaie béante. La dissonance, l'urgence et l'hystérie ("Cristal Tree") se côtoient en permanence, se bousculent et s'entrechoquent. Et lorsque le prédateur laisse de l'air et dégage le terrain ("Last Secret Before The Lapse Of Memory"), ce n'est que pour achever par surprise avec ses atouts les plus fatals ("We Are Stalingrad", "Divine Proportion"). Les vocalises littéralement aboyées, toujours sur la brèche, intensifient la raclée et confère à ce premier album l'apreté et la force des rocailles acérées et monolithiques. L'héxagone compte un nouveau chef de meute.
A écouter : We Are Stalingrad - Humano Mantica - Crystal Tree
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